Rugby : condamnation, mise en retrait, rejet du vote de son successeur... La démission de Bernard Laporte en huit actes
Sa démission paraissait de plus en plus inévitable. L'ancien demi de mêlée de Bordeaux-Bègles Bernard Laporte a annoncé, vendredi 27 janvier, sa démission de son poste de président de la Fédération française de rugby. Une décision qu'il avait d'abord refusé de prendre malgré les condamnations judicaires à son encontre. Mais la pression s'est encore un peu plus intensifiée sur lui ces derniers jours.
2017, le début de "l'affaire Altrad"
En février 2017, Bernard Laporte et Mohed Altrad, président du Montpellier Hérault rugby, signent un contrat dans lequel est stipulé que le nouveau président de la FFR (depuis 2016) accepte de participer à des opérations de communication pour le groupe Altrad. La contrepartie financière est fixée est à 180 000 euros. Toutefois, si la somme sera bien versée, le contrat lui, ne sera jamais exécuté. En parallèle, Bernard Laporte rend une série d'arbitrages favorables au même groupe Altrad, ce qui commence à éveiller les soupçons au sein de l'exécutif, qui saisit la justice fin 2017.
Le 10 octobre 2022, Claude Atcher, proche de Laporte, révoqué de son poste de directeur général du Mondial 2023
Un autre homme dans l'œil du cyclone. Claude Atcher, l'un des plus proches de Bernard Laporte, est révoqué de son poste de directeur général de la Coupe du monde 2023, le 10 octobre. Cette décision est prise lors d'un conseil d'administration extraordinaire du groupement d'intérêt public (GIP) France 2023, chargé d'organiser cette compétition en France (du 8 septembre au 28 octobre 2023). Claude Atcher était déjà mis à pied à titre conservatoire, depuis fin août, après la dénonciation d'un climat social "extrêmement dégradé" et des "pratiques managériales alarmantes", pointés par deux rapports, le dernier signé de l'Inspection du travail. Cette figure du rugby français, qui a contribué à l'obtention du Mondial en France, est poussée vers la sortie pour "faute grave", précise alors sa convocation.
Une affaire de plus pour Bernard Laporte, puisque les deux hommes sont très proches. Claude Atcher avait notamment participé à sa campagne pour la présidence de la FFR fin 2016. Ce dernier figure aussi sur le banc des accusés dans l'affaire de trafic d'influence et de corruption autour de Bernard Laporte et Mohed Altrad.
Le 13 décembre 2022, Laporte condamné
Après plusieurs années d'enquête de la justice française, Bernard Laporte est condamné à deux ans de prison avec sursis et 75 000 euros d'amende, pour corruption passive, trafic d'influence, prise illégale d'intérêts, recel d'abus de biens sociaux et abus de biens sociaux. Il écope également de deux ans d'interdiction d'exercer toute fonction en lien avec le rugby, prononcée sans exécution provisoire. Dans la foulée, Bernard Laporte interjette appel de sa condamnation, ce qui suspend son exécution.
Le président de la Fédération française de rugby est donc jugé coupable d'avoir rendu une série d'arbitrages favorables au groupe Altrad – dont l'octroi du sponsoring maillot du XV de France – après avoir perçu de sa part 180 000 euros en mars 2017 en vertu d'un contrat d'image jamais exécuté. Dans cette affaire, le patron du club de rugby de Montpellier, Mohed Altrad, a été condamné à 18 mois de prison avec sursis. Le même jour que sa condamnation, Bernard Laporte a annoncé quitter "temporairement et volontairement", ses fonctions de vice-président de World Rugby. La Ligue nationale de rugby (LNR) réclame de nouvelles élections à la tête de la FFR.
Le 19 décembre 2022, sa mise en retrait
Après sa condamnation, six jours plus tôt, Bernard Laporte balaye l'idée d'une démission. Sous pression de la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra, le dirigeant accepte alors de "se mettre en retrait à titre provisoire" de ses fonctions de président de la Fédération française de rugby (FFR), le 19 décembre. Cela "implique notamment que le président ne participera plus aux différentes instances décisionnelles de la Fédération française de rugby (Bureau Fédéral et Comité Directeur) et ne signera plus aucun engagement au titre de la FFR", précise le communiqué de la Fédération. Pour le remplacer, le comité d'éthique et de déontologie du rugby français organise un référendum auprès des clubs amateurs, pour valider (ou pas) la nomination d'un candidat.
Le 6 janvier 2023, il propose Patrick Buisson pour le remplacer
Pour remplacer l'ancien demi de mêlée de Bordeaux-Bègles à la tête de la FFR, Bernard Laporte décide de proposer un autre ancien numéro 9, Patrick Buisson. Informaticien de profession, il est décrit comme un travailleur de l'ombre, engagé et sérieux. Cette désignation est désormais soumise à l'approbation des 1 600 clubs amateurs de France.
Le 24 janvier 2023, son placement en garde à vue
Si elle n'a duré que quelques heures, la garde à vue de Bernard Laporte pour "blanchiment de fraude fiscale aggravé" a été un nouveau coup dur pour le président de la FFR. "Ça n'a aucun rapport avec la précédente affaire", assurait alors son avocat, après avoir appris "ce mardi matin par L'Équipe" que son client était placé en garde à vue. Bernard Laporte en est ressorti quelques heures plus tard, sans poursuite à ce stade.
Le 26 janvier 2023, les clubs amateurs rejettent la désignation de Patrick Buisson pour remplacer Bernard Laporte
Invités depuis lundi à se prononcer sur la nomination de Patrick Buisson à ce poste, les clubs amateurs avaient trois jours pour répondu à la question : "Approuvez-vous la proposition de M. Bernard Laporte de désigner M. Patrick Buisson en qualité de Président-Délégué de la FFR ?". Avec un taux de participation atteignant les 90,6%, 51,06% des voix des clubs ont voté contre cette proposition. Un résultat qui a de nouveau affaibli le président de la FFR, de plus en plus dos au mur. D'autant plus que la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra, annonce alors dans un communiqué souhaiter que le comité directeur, réuni dès le lendemain, trouve "un chemin pour stabiliser rapidement une gouvernance claire et légitime".
Le 27 janvier 2023, Bernard Laporte démissionne
Le rejet de la nomination de Patrick Buisson lors du vote des clubs amateurs a sans doute été le coup de grâce. Vendredi, dos au mur, Bernard Laporte a annoncé sa démission de son poste de président de la Fédération française de rugby. Lors d'un comité directeur convoqué en urgence en présence de la ministre des Sports auquel il ne pouvait pas assister, il n'a eu d'autres choix que de démissionner. "Je peux vous confirmer la démission de Bernard Laporte", a indiqué la ministre dans la foulée.
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