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Coupe du monde de rugby : après sa victoire contre l'Afrique du Sud, l'Irlande ne peut plus cacher ses ambitions

Le XV du Trèfle a frappé un grand coup contre les Springboks (13-8), samedi à Saint-Denis.
Article rédigé par Elio Bono, franceinfo: sport - Au Stade de France
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
La joie des joueurs irlandais après la victoire contre l'Afrique du Sud (13-8), le 23 septembre 2023 à Saint-Denis. (FRANCK FIFE / AFP)

Certains signes ne trompent pas. Questionnés en conférence de presse sur le statut de favori de l'Irlande après la victoire épatante contre l'Afrique du Sud (13-8), samedi 23 septembre à Saint-Denis, le capitaine Johnny Sexton et le sélectionneur Andy Farrell se sont tous deux précipités pour répondre. Le sélectionneur a finalement eu le dernier mot, et si on savait cet ex-ouvreur habitué à botter en touche, il n'a pas fait dans la demi-mesure. "On se concentre sur le prochain match contre l'Ecosse", a-t-il soigneusement esquivé.

Plus que ces éléments de langage soigneusement convenus, les attitudes sur le terrain révèlent le réel état d'esprit de ces Irlandais sûrs de leurs nombreuses forces. Il fallait par exemple voir la pile électrique James Lowe exulter à chaque perte de balle adverse (18, tout de même) pour s'en persuader. Recroquevillés dans leur camp en seconde période et proches de la rupture, ses coéquipiers se sont démenés en défense. "J'ai apprécié notre résilience et la manière dont nous avons réussi à maintenir le score", s'est réjoui Andy Farrell. "On est sans cesse allés à la mine, on a insisté et insisté encore", a illustré le troisième ligne Ryan Baird.

Les Irlandais ont en effet dégoûté les Springboks dans les zones d'affrontement, récupérant plusieurs ballons décisifs. "Simon Easterby [entraîneur de la défense] en a fait des enragés !", a rigolé le sélectionneur. La performance n'est pas mince, surtout avec un pack adverse quasi entièrement remodelé en cours de match, avec sept avants sur le banc. Leur premier rideau n'a été franchi qu'à quatre reprises par les Springboks, à qui on ne peut pas reprocher d'avoir tenté. Même avec un essai encaissé – par Cheslin Kolbe, 50e –, l'Irlande n'est jamais redescendue de son nuage. "Quand une équipe est dans une telle euphorie, cela en dit long sur son attitude", a indiqué Andy Farrell.

Et pourtant, l'Irlande ne tourne pas (encore) à plein régime

Il fallait au moins cela pour s'adjuger ce "vrai bras de fer", dixit Johnny Sexton, plutôt dépeint par l'ouvreur adverse Manie Libbok comme un "match de l'enfer". Le niveau d'intensité et d'engagement a en effet atteint des sommets dignes d'une finale, et l'abnégation irlandaise malgré le score final étriqué lui donne une bonne tête de vainqueur final. Le Trèfle, première nation mondiale au classement World Rugby, partait déjà avec des arguments sur la ligne de départ mais paraît, après trois matchs, plus consistante que n'importe quelle autre équipe. Elle peut difficilement se cacher.

Au sein de cette sélection expérimentée, l'ossature victorieuse du dernier Tournoi des six nations joue ensemble depuis des années et se trouve les yeux fermés. Les deux premiers matchs contre la Roumanie (82-8) et les Tonga (59-16), remportés haut la main avec tous les cadres, ont permis au rouleau compresseur d'atteindre sa pleine mesure tôt dans la compétition. Mieux, si l'on est tatillon, les Irlandais restent perfectibles sur certains domaines dont la touche (12/18 et plusieurs munitions égarées près de la ligne adverse samedi), ce qui donne une certaine idée du potentiel final. "On n'a pas réussi à mettre notre jeu en place et eux non plus", a d'ailleurs concédé Johnny Sexton.

En interne, la confiance est décrite par le centre Bundee Aki comme "exceptionnelle" et l'Irlande a rarement paru aussi forte. "Et on a de la chance, on n'a aucune blessure sur les trois premiers matchs !", s'est réjoui Andy Farrell. Le visage marqué à ses côtés, le vétéran Johnny Sexton (38 ans) a été sonné par une charge de Damian de Allende (qui avait déjà éteint Garry Ringrose), mais sa conduite du jeu par la suite est un indice suffisant pour attester de sa bonne santé. Le contraste avec les autres favoris au titre mondial, dont l'Afrique du Sud, privé de Lukhanyo Am et Malcolm Marx ou la France, amputée de Romain Ntamack, Antoine Dupont ou Paul Willemse, est criant.

Le plafond de Vert des quarts à briser

A la faveur de cette victoire, les Irlandais devraient éviter les Bleus en quarts et se dirigent vers un affrontement contre la Nouvelle-Zélande. L'affiche n'est, pour l'heure, qu'une supputation, et il ne fallait pas attendre d'Andy Farrell un commentaire sur les All Blacks. Le sélectionneur sait pourtant y faire contre les Océaniens, battus deux fois sur leurs terres (32-22 et 23-12) en juillet 2022, aux prémices de cette formidable série désormais étendues à 16 victoires de rang.

Mais l'évocation de cet adversaire peut aussi ramener l'Irlande au souvenir plus fâcheux d'un cinglant 14-46 encaissé au même stade du dernier Mondial, à Tokyo. Il s'agissait alors de la septième élimination des Verts en quarts en neuf Coupes du monde, faisant de l'Irlande la seule nation du "Tier 1", avec l'Italie, à n'avoir jamais disputé une demi-finale. Pour soulever le trophée, espéré par tout un peuple massivement présent dans l'Hexagone – ils étaient près de 50 000 à chanter au Stade de France samedi –, il faudra briser ce plafond de verre. 

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