Six nations 2024 : l'ascension supersonique de Nicolas Depoortere, titulaire chez les Bleus un an après ses débuts en pro

Le trois-quarts centre de l'Union Bordeaux-Bègles (21 ans) fait partie des quatre nouveaux titulaires lancés par le staff au pays de Galles dimanche.
France Télévisions - Rédaction Sport
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Nicolas Depoortere, auteur d'un superbe essai contre le Racing 92 avec l'UBB le 2 mars 2024. (ROMAIN PERROCHEAU / AFP)

Il va vite, Nicolas Depoortere. Très vite, même. Et s'ils ne le savaient pas déjà, les joueurs du Racing 92 en ont fait l'amer constat samedi 2 mars. Parti de ses 22 mètres, le trois-quarts centre de l'Union Bordeaux-Bègles a mis les gaz. Droit devant. Plein fer. C'était déjà trop tard pour l'arrêter. 80 mètres plus loin, le Girondin de 21 ans n'est descendu de son nuage que pour plonger dans l'en-but. Un geste peu académique pour lequel personne ne lui tiendra rigueur, la note esthétique maximale étant déjà atteinte depuis bien longtemps.

Puisque tout est question de vitesse chez lui, Depoortere s'apprête à honorer, huit jours plus tard, sa toute première cape avec le XV de France, dimanche 10 mars à Cardiff (à 16 heures, en direct sur France 2 et france.tv). Cette chevauchée fantastique en Top 14 a-t-elle précipité ses débuts dans le Tournoi des six nations ? Très peu pour Fabien Galthié. "C'est une première sélection, mais qui a été préparée, construite", a indiqué le sélectionneur en conférence de presse d'avant-match. 

Ces débuts au pays de Galles, Nicolas Depoortere les doit un peu à la suspension de Jonathan Danty, beaucoup à son propre talent, mais avant tout à... une feuille de papier distribuée à son frère Jules à la sortie de l'école. "On lui a donné un flyer de l'école de rugby et il a essayé, se remémore leur père, Alexandre. Le petit frère était sur le bord du terrain et, quand il a pu, il a voulu y aller aussi."

Un déclic pendant le Covid-19

Dans les pas du frangin, le Girondin originaire de Vayres, à 30 kilomètres à l'est de Boredaux, commence à tripoter le cuir dans le village voisin d'Izon, entre la voie ferrée et la rivière Dordogne. "Il était déjà un peu au-dessus du lot, narre Jean-Pierre Nowak, secrétaire général de l'US Izon. Il avait déjà beaucoup de puissance et c'était en même temps un gamin adorable, sans aucune méchanceté."

Ses prouesses atteignent rapidement l'école de rugby de Bègles, où il atterrit à 14 ans. Sans autre horizon que le simple plaisir. "C'est un compétiteur, il aime le challenge, mais il n'a jamais évoqué le fait d’être professionnel", déroule son père. Depoortere fait tranquillement ses gammes jusqu'en 2020, quand la pandémie liée au Covid-19 chamboule le quotidien des équipes de jeunes de l'UBB.

"Quelque part, il en a profité, car il s'est entraîné très dur avec son frère pendant l'arrêt des compétitions, explique le directeur du centre de formation, Frédéric Garcia. Arrivé en août 2020, ce dernier patiente jusqu'à la majorité de Depoortere (en janvier 2021) pour le surclasser en Espoirs. La dernière marche avant les professionnels. "Il est arrivé sur la pointe des pieds, avec des garçons de deux ou trois ans de plus, poursuit Garcia. Et il s'est imposé comme un leader par l'exemple."

Sélectionné en équipe de France des moins de 20 ans, Depoortere en devient très vite capitaine, à l'été 2022. Au point, en toute logique, de faire ses débuts en Top 14 la veille de Noël de la même année, à La Rochelle. Jusque-là linéaire, sa trajectoire bascule, peu avant ses 20 ans, dans l'exponentiel. En moins d'un an, le centre s'impose comme un titulaire à l'UBB, remporte le Mondial des moins de 20 ans, enquille les essais neuf, à cheval sur deux saisons  et contribue à terrasser les Saracens en Champions Cup. "Il était très bon lorsqu'il était enfant, mais là, waouh !", salue Jean-Pierre Nowak.

Puissance, finesse et coupe mulet

Mais, même si tout s'enchaîne très rapidement, Depoortere n'est pas du genre à prendre la grosse tête. "Dès qu’il peut, il vient nous voir pour des matchs, il a encore beaucoup de copains ici", poursuit le dirigeant de l'US Izon, qui a depuis fusionné avec les clubs des villes voisines de Saint-Loubès et Ambarès. "Il vient aussi souvent aux entraînements des Espoirs de l'UBB", complète Frédéric Garcia. Ses seules extravagances, le néo-international les réserve à sa coiffure. "Tant que j'ai des cheveux, je tente des trucs !", en rigolait-il en janvier dans L'Equipe. A Cardiff, on devrait le voir arborer une coupe mulet.

"C'est un bon vivant... Enfin, je ne dis pas ça par rapport à la bringue. C'est juste quelqu'un de joyeux !"

Emilien Gailleton, joueur de Pau et international français

à Sud Ouest

Sur le pré, le trois-quarts centre allie sa vitesse à sa puissance (1,94 m, 94 kg) et ses envies d'extérieur, dans une équipe girondine portée sur l'offensive. "C'est un garçon qui se protège bien et parvient à passer à côté des blessures, complète son formateur Frédéric Garcia. En défense, il faisait des fautes de lecture, mais ce n’est plus le cas. C’est devenu un joueur très complet."

"Lorsqu'il y a un essai ou un temps mort, je le vois parfois parler à ses coéquipiers, poursuit l'Izonnais Jean-Pierre Nowak. Il faisait déjà comme ça quand il était tout petit, avec son caractère de leader." Pas impressionné malgré son déficit d'expérience, Nicolas Depoortere se fond dans un collectif où figure son grand pote Louis Bielle-Biarrey. "Ils sont inséparables, ils ont grandi ensemble en U20 et en club", indique son père, Alexandre Depoortere.

De six mois son cadet, mais plus expérimenté (une saison pro et neuf sélections supplémentaires), "LBB" va accompagner son ancien colocataire sur la pelouse à Cardiff. Avec Nolann Le Garrec et Léo Barré, également titulaires au pays de Galles, ils incarnent cette nouvelle génération de jeunes talents insouciants. Quelque part, il était écrit qu'un gamin de Vayres, l'un des meilleurs endroits pour observer le Mascaret une surélévation impressionnante de l'eau sur la Dordogne – parviendrait à prendre la bonne vague.

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