Météo : Roland-Garros est-il le festival du parapluie ?
C'est le casse-tête des organisateurs du tournoi de tennis parisien. Tous les ans, les intempéries entraînent des interruptions et parfois des reports, au risque de bouleverser le programme des rencontres.
Chaque année, les organisateurs de Roland-Garros craignent que le ciel leur tombe sur la tête. Lors de la première journée de l'édition 2017, dimanche 28 mai, les premiers matchs ont été brièvement interrompus par la pluie. Ces intempéries ont la fâcheuse conséquence d'entraîner des retards, voire des reports, ce qui alourdit le calendrier déjà complexe du tournoi. Les enjeux financiers sont colossaux. Une journée sans rencontres entraîne un manque à gagner de deux millions d'euros, selon l'évaluation communiquée en 2016 par Guy Forget, directeur du tournoi.
>> Roland-Garros : quand la pluie fait le beau temps (pour certains joueurs)
Les journées sous le parapluie sont-elles une fatalité aux Internationaux de France ? En réalité, la situation est très variable au fil des ans, comme le montrent ces relevés pluviométriques réalisés à partir des données recueillies par Météo France (station du 16e arrondissement de Paris). Les éditions 2009, 2011 et 2015, relativement sèches, tranchent avec les éditions 2012, 2014 et surtout 2016, marquée par des pluies diluviennes qui ont largement perturbé les joueurs et le public.
Les règles sont claires : l'oganisation rembourse intégralement les billets des spectateurs en dessous d'une heure de jeu, mais seulement la moitié quand les joueurs se sont affrontés entre une et deux heures. En 2016, certains spectateurs furieux avaient reproché à la direction d'avoir interrompu une rencontre entre Novak Djokovic et Roberto Bautista Agut au bout de deux heures et une minute. Une petite minute au coût mal digéré par les spectateurs.
Trois jours sans matchs en 88 ans d'existence
Compte tenu des conditions météorologiques, aucun match ne sera joué aujourd'hui. La FFT remboursera les billets des spectateurs du jour.
— Roland-Garros (@rolandgarros) 30 mai 2016
La pluie a également joué des tours à Rafael Nadal et Novak Djokovic, lors de leur finale en 2012. L'Espagnol avait finalement remporté le titre le lundi, après un match disputé sur deux jours.
Entre fin mai et début juin, les précipitations sont relativement instables. "C’est plutôt le caractère orageux qui domine à cette époque de l’année, précise Frédéric Nathan, prévisionniste à Météo France, contacté par franceinfo. Les précipitations tombent davantage en deuxième partie d’après-midi que la nuit ou la matinée, même si cela n’a rien de systématique. En effet, la chaleur de la journée crée une situation instable, qui va générer des averses ou des orages. Cela tombe plutôt en journée, ce qui est un désavantage pour Roland-Garros".
Des prévisionnistes sous le court central
Il pleut en moyenne 20 mm sur toute la durée du tournoi, mais il faut nuancer ces chiffres bruts. "Si on a un ou deux millimètres dans la journée, ce n’est pas grand-chose, mais si cela tombe sous forme de bruine, ça peut durer un moment, précise Frédéric Nathan. A l'inverse, on peut comptabiliser 5 mm après une grosse averse, alors qu'il fera beau le reste de la journée".
Pour tenter d'anticiper les aléas climatiques, le tournoi travaille avec l'agence Météo France depuis 1988, afin de disposer de données précises sur les intempéries. Les prévisionnistes sont installés dans un local situé sous le central, et reçoivent les données collectées par le radar de Trappes (Yvelines) et un radar mobile installé sur la base militaire de Villacoublay (Yvelines). Ce dernier, de plus faible portée, permet toutefois de détecter les faibles précipitations, même à l'échelle de la bruine.
"Les minutes qui précèdent, les prévisionnistes peuvent faire des simulations de déplacements de cellules d’averses ou d’orages pour prévoir la trajectoire de l'averse, explique Frédéric Nathan, prévisionniste à Météo France. Le problème, c’est quand elle se déclenche juste au-dessus de Roland-Garros".
La température, elle, varie peu au fil des éditions, avec une moyenne de 21 °C durant cette période. "Il y a des années plus chaudes, avec une moyenne de 25 °C en 2003, ou plus fraîches, avec 20 °C en 2013, précise Frédéric Nathan. Mais il n'y a pas de gros écarts, car le soleil est assez haut à cette période de l'année".
L'organisation fait la pluie et le beau temps
La pluie n'entraîne pas systématiquement l'interruption du match. La décision revient à l'organisation du tournoi, parfois critiquée pour ses choix. En 2016, toujours, la Polonaise Agnieszka Radwanska avait laissé éclater sa colère, après son élimination. "Ce matin au deuxième set, nous avons joué sous la pluie ! Je ne peux pas jouer dans ces conditions de jeu (...). Après quelques coups, la balle devient lourde. C'est glissant aussi." Novak Djokovic avait préféré rire de la situation, en empruntant un parapluie à une spectatrice.
Le tournoi de Roland-Garros, toutefois, ne semble pas plus mal loti que les autres. Entre 2008 et 2012, cinq finales consécutives de l'US Open (qui se déroule fin août-début septembre) ont été reportées en raison des intempéries, rappelle Slate, et celle de 2015 a été retardée de trois heures. Les finales messieurs de Wimbledon (juillet) ont dû être retardées au lundi à quatre reprises (1992, 1996, 2000 et 2001), et l'organisation programme parfois des rencontres le dimanche entre les deux semaines de compétition pour rattraper son retard, alors qu'il s'agit du jour traditionnellement dévolu à l'entretien des gazons.
Malgré tout, la direction du tournoi réclame depuis plusieurs années l'installation d'un toit rétractable pour le court Philippe-Chatrier. Ce sera chose faite en 2020, avec la pose d'une structure composée de "onze ailes, semblables à des ailes d'avion, qui se déploient en douze minutes à l'aide de 20 moteurs", précise Gilles Jourdan, directeur du projet de modernisation, interrogé par Les Echos. Un parapluie gigantesque, estimé à 25 millions d'euros, qui devrait permettre aux joueurs concernés de passer entre les gouttes.
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