UMP : et si Christine Lagarde s'invitait à la table de Fillon et Copé en 2017 ?
La guerre fratricide entre Copé et Fillon pourrait bénéficier à l'actuelle patronne du FMI, devenue le mois dernier personnalité politique préférée des Français. Enquête.
POLITIQUE – La guerre Copé-Fillon divise sa famille politique ? Officiellement, Christine Lagarde s'en tient très éloignée. Directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) depuis juin 2011, l'ancienne ministre de l'Economie et des Finances est de toute façon astreinte à un strict devoir de réserve, qui lui interdit formellement d'intervenir dans les affaires politiques de son pays. "Ce qui ne l'empêche pas de suivre les actualités, et de juger ce spectacle désolant", assure à francetv info l'une de ses anciennes collaboratrices. "Elle est attristée. Elle ne comprend pas l'attitude des deux belligérants, et pour tout dire, elle trouve ça pitoyable", appuie un autre proche. Pourtant, le duel fratricide auquel se livrent actuellement le président proclamé de l'UMP et l'ancien Premier ministre pour diriger le premier parti de France pourrait bien faire ses affaires… pour 2017.
Courant octobre, lors d'un bref passage à Paris, Christine Lagarde a juré ne pas y penser une seconde. "La crise est trop grave (...) pour que je m'amuse à gamberger sur ce que je ferai" à ce moment-là. Avant d'ajouter que "l'ambition présidentielle n'est pas une maladie qui s'attrape à Washington".
69% des Français ont une bonne opinion d'elle
En coulisses pourtant, rien n'est écarté. A 56 ans, la patronne du FMI n'a jamais été aussi populaire qu'aujourd'hui. En novembre, elle est devenue la personnalité politique préférée des Français dans le baromètre mensuel Ifop (PDF), tous bords confondus. 69% des Français interrogés ont une bonne opinion d'elle, soit treize points de plus qu'en mai 2011, juste avant son départ pour Washington !
"En quittant le champ politique national, elle échappe aux méfaits du clivage droite-gauche. En quelque sorte, elle se place en apesanteur, et devrait le rester tant qu'elle ne remettra pas le pied dans la politique française, analyse Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l'Ifop. Une telle popularité constitue un capital précieux. Tout dépend ensuite de ce qu'elle fera de ce capital."
Ses amis et anciens collaborateurs forment une association
Pour "entretenir des liens d'amitiés" – mais surtout pour se tenir prêts à faire fructifier ce capital sympathie –, une quarantaine de proches et d'anciens collaborateurs de Christine Lagarde ont fondé une association au mois de juin, "La Grande Dame", et se sont rassemblés autour de leur favorite lors d'un grand repas convivial cet été.
Parmi eux, Jacques Le Pape (son ancien directeur adjoint de cabinet à Bercy), Isabelle Deleu (qui a longtemps été sa conseillère politique et parlementaire), Sonia Criseo (sa plus ancienne collaboratrice), Marc Vanghelder, Bruno Silvestre et Jean-Marc Plantade (ses conseillers en communication), ou encore ses anciens directeurs de cabinet Stéphane Richard et Alexandre de Juniac (devenus respectivement PDG de France Télécom-Orange et d'Air France).
Début octobre, le blog "La com' tranquille" a également remarqué que le mari de Christine Lagarde, Xavier Giocanti, avait réservé plusieurs noms de domaine aux noms évocateurs : "Lagarde-2017.com", "ChristineLagarde-2017.fr" ou encore "Christine-Lagarde2017.fr". Simple maladresse de communication, ou étrange coïncidence ? "Une boulette" qui visait simplement à éviter que ces adresses internet soient cybersquattées par des internautes malintentionnés, s'est depuis défendu Xavier Giocanti dans les colonnes de L'Express.
"Une femme élégante, solide, travailleuse, compétente"...
Il n'empêche. Si la guerre Copé-Fillon s'éternisait et lassait durablement les électeurs UMP, si la crise économique perdurait, si les sondages continuaient à la plébisciter… L'hypothèse d'une personnalité connue sur la scène internationale, dont l'expertise sur le plan économique n'est pas à remettre en cause, et qui est moins ancrée que d'autres dans la politique-politicienne car issue de la société civile, pourrait tout à fait faire sens.
"C'est une femme solide, capable de faire passer des idées avec extrêmement de clarté et de pédagogie. C'est une vraie qualité", note le député UMP Hervé Mariton. Son collègue Gilles Carrez, rapporteur général du budget à l'Assemblée lorsque Christine Lagarde était à Bercy, acquiesce : "Sur la forme, c'est une femme qui a beaucoup de classe, d'élégance, de courtoisie. Et sur le fond, elle est indéniablement travailleuse et compétente."
"Quand on lui parle de 2017, elle se marre !"
Reste à savoir si Christine Lagarde a un appétit présidentiel suffisamment gros pour se lancer dans la future primaire qui aura lieu à droite en 2016. Dans le premier cercle, le sujet n'est absolument pas tabou. "Évidemment, on en parle entre nous, entre anciens collaborateurs, entre amis. Certains disent qu'elle n'aime pas la petite politique et qu'elle n'aura pas envie d'y aller. D'autres se disent aussi qu'elle en a toutes les compétences, et que ce serait une chance formidable pour notre pays", explique à francetv info l'une de ses anciennes conseillères.
Un autre proche de Christine Lagarde assure que certains de ses ex-collaborateurs en ont discuté directement avec elle : "Quand on lui parle de 2017, elle se marre. A chacun d'en déduire ce qu'il veut !" D'autant que depuis Washington, tout ça peut lui paraître très éloigné. Ses brefs passages en France (à raison d'un par mois en moyenne) sont davantage consacrés à la famille – à Marseille, en Corse ou en Normandie – plutôt qu'à la politique. Et puis Christine Lagarde sait qu'elle reste visée par une enquête de la Cour de justice de la République (CJR) pour "complicité de faux" et "complicité de détournement de biens publics" dans le cadre de l'affaire Tapie-Crédit Lyonnais. Des soupçons passibles de dix ans de prison et 150 000 euros d'amende.
Son mandat à la tête du FMI, lui, se terminera en juin 2016. "Si elle décide d'y aller et que la primaire se tient à l'automne 2016 sur le modèle du PS, ce sera le timing parfait", pronostique l'un de ses amis. "Mais ce mandat est renouvelable", a également fait remarquer la principale intéressée en octobre lors d'un passage à Paris. Façon de dire que tout est possible, et que rien n'est exclu.
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