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Corans brûlés en Afghanistan : un scandale qui attise les violences

Les émeutes durent depuis trois jours dans le pays. Elles ont été déclenchées par l'autodafé d'exemplaires du livre sacré par des militaires américains. Retour sur les faits et leurs conséquences.

Article rédigé par Benoît Zagdoun
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Des policiers anti-émeute afghans face à des manifestants qui protestent contre l'autodafé d'exemplaires du Coran, à Kaboul (Afghanistan), le 23 février 2012.  (SHAH MARAI / AFP)

Barack Obama a présenté ses excuses "les plus sincères" au "peuple afghan", jeudi 23 février, pour l'incinération d'exemplaires du Coran sur ordre d'un officier américain sur une base militaire en Afghanistan. Le président des Etats-Unis a écrit une lettre à son homologue afghan au troisième jour d'émeutes dans le pays. Ces heurts ont provoqué la mort de deux soldats américains, tués par un militaire afghan, ainsi que de 12 manifestants. FTVi revient sur cette brusque flambée de violences.

• Des exemplaires du Coran brûlés

Dans la nuit de lundi à mardi, des exemplaires du Coran, confisqués à des détenus de la prison de la base américaine de Bagram, à 60 km au nord-est de Kaboul, ont été brûlés. Selon des responsables à Washington, ces livres servaient à faire passer des messages entre prisonniers.

Dans sa lettre au président afghan, Hamid Karzaï, Barack Obama parle d'une "erreur (...) commise par inadvertance". Pour la présidence afghane, cette "erreur" est le fait d'un "officier américain" qui, "par ignorance", a ordonné l'incinération du texte sacré de l'islam.

• Deux soldats américains et douze afghans tués

Dès que le scandale a éclaté, des émeutes se sont produites dans plusieurs provinces afghanes. Des milliers de manifestants ont marché aux cris de "mort à l'Amérique" dans le Kunar (nord-est), le Nangarhar (est) et l'Orozgan (sud). Ils ont parfois attaqué des bases de l'Otan et ont même essayé de marcher sur la base française de Nagrab, en Kapisa (est). Au troisième jour de ces manifestations, jeudi, trois Afghans ont été tués par balles, venant s'ajouter aux neuf qui ont péri la veille. 

C'est dans ce climat de tension que deux militaires américains ont été tués par un soldat afghan, dans la province de Nangarhar. Le gouverneur du district de Khogyani, où s'est produit l'incident, a assuré que le drame était directement lié à ces troubles. "Alors que les manifestants s'approchaient de la base américaine, un soldat afghan à ouvert le feu sur des militaires américains, en tuant deux. Il s'est ensuite enfui dans la foule."

• Le sentiment anti-américain au plus fort

En dix ans de conflit, le sentiment anti-américain n'a jamais été aussi fort dans la population afghane. Il est alimenté par les bavures de l'Otan dont les frappes aériennes tuent fréquemment des civils ou encore par la récente profanation de cadavres par des marines.

Ces derniers blasphèmes interviennent au moment où les Etats-Unis veulent retirer progressivement leurs 100 000 soldats combattants d'Afghanistan. Ce retrait doit avoir lieu d'ici à fin 2014 et laisser un pays pacifié, notamment grâce aux pourparlers de paix qu'ils tentent de lancer avec les talibans au Qatar, comme le relate Le Monde.fr.

• Condamnations et excuses

Dans ce contexte, de hauts responsables américains, à Washington comme à Kaboul, se sont confondus en excuses auprès du "peuple afghan", avant même le courrier de Barack Obama. 

Quant aux talibans, ils ont appelé jeudi les Afghans à "attaquer courageusement les bases militaires des envahisseurs" pour "leur donner une leçon". Mais la veille, leur porte-parole, Zabiullah Mudjahid, tout en condamnant la "profanation" du Coran avait assuré qu'elle "n'affecterait pas le processus au Qatar", où les rebelles pourraient ouvrir un bureau de représentation pour discuter avec les Etats-Unis. 

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