Affaire Cahuzac : un témoin affirme avoir une liste de politiques détenteurs d'un compte en Suisse
Cette liste contiendrait une "quinzaine de noms".
"On a fait du citoyen Cahuzac un fusible. On dit que c'est le mensonge d'un homme, mais des Cahuzac, il y en a d'autres." Pierre Condamin-Gerbier, ex-cadre de l'établissement financier suisse Reyl et Cie et témoin dans l'enquête sur l'affaire Cahuzac, affirme jeudi 13 juin disposer d'une liste "d'une quinzaine" de noms d'ex-ministres ou d'actuels ministres détenteurs d'un compte en Suisse. Interrogé avant son audition à l'Assemblée nationale par le député PS Yann Galut, rapporteur du projet de loi de lutte contre la fraude fiscale, il a ainsi confirmé ce qu'il a dit aux sénateurs mercredi.
Pierre Condamin-Gerbier a aussi déclaré que ses documents, "des éléments de preuve", avaient été remis à "une partie tierce". "C'est le mensonge d'un système et d'un Etat", a-t-il assuré ensuite à plusieurs journalistes. Interrogé sur l'éventuelle divulgation des noms de la liste qu'il dit détenir, il a répondu : "J'attends le bon moment pour le faire", notamment lorsque cela "aura le moins de répercussions pour moi et ma famille". L'ex-banquier de Reyl et Cie a expliqué, comme il l'a déjà fait dans d'autres médias, qu'il subissait "des menaces de mort". Il a raconté jeudi qu'il avait récemment retrouvé sa moto "trafiquée", "destinée à lâcher", et qu'il avait "porté plainte" à ce sujet.
"Système généralisé"
"Ce que M. Condamin-Gerbier nous a dit de manière générale, c'est qu'il avait eu connaissance d'hommes politiques, sans nous citer ni leur appartenance, ni leur sensibilité qui, d'après lui, auraient pratiqué cette évasion fiscale", a dit Yann Galut, le rapporteur du projet de loi de lutte contre la fraude fiscale. "Il nous a dit qu'il réservait ses déclarations aux autorités judiciaires", a poursuivi le rapporteur.
Le député a rappelé que les membres de la commission des Finances n'étaient pas des juges d'instruction ou le parquet, qu'il appelle à ne pas prendre ces révélations "à la légère". "Nous ne sommes pas entrés dans le détail, mais il nous a confirmé, sans nous dire 'c'est l'actuel ou l'ancien gouvernement', que c'était un système généralisé qui touchait une minorité d'élus qui avaient des postes importants de notre République", a dit Yann Galut. "Il a des documents, il a des preuves. Il faut absolument, bien entendu, dans cette affaire comme dans d'autres, que la justice fasse son travail en toute indépendance."
"Un secret de polichinelle"
Pierre Condamin-Gerbier a été entendu dans l'affaire Cahuzac, par les policiers dans un premier temps. Le 18 avril, il a ensuite été auditionné par le juge Van Ruymbeke, dans le cadre de l'information judiciaire pour "blanchiment de fraude fiscale" visant l'ex-ministre du Budget. A la suite de quoi les juges ont demandé au parquet une extension de leur enquête à d'éventuels autres détenteurs de comptes non déclarés, comme le rapportait Le Monde.
Le fait que de nombreux responsables politiques français aient utilisé des places financières comme la Suisse, pour eux-mêmes, ou pour leur parti, est un "secret de polichinelle", avait-il déjà déclaré fin avril en Suisse. Pierre Condamin-Gerbier a été responsable de la délégation UMP en Suisse, notamment lors de la campagne présidentielle de 2007, mais a quitté son poste en 2009.
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