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Corrida : quatre questions sur la proposition de loi qui réclame son interdiction en France

Un texte déposé par des députés "insoumis" et écologistes, et notamment porté par l'ancien journaliste Aymeric Caron, est débattu jeudi à l'Assemblée nationale. 

Article rédigé par franceinfo
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Des manifestantes lors d'une mobilisation contre la corrida à Paris, le 19 novembre 2022.  (JULIEN DE ROSA / AFP)

La corrida est-elle un "spectacle de désolation terrible" ou une "œuvre d'art unique", comme l'affirment opposants et partisans de la tauromachie rencontrés par franceinfo à Nîmes ? Le débat autour de ce combat taurin est ravivé par une proposition de loi déposée par des députés "insoumis" et écologistes à l'Assemblée nationale et visant à abolir la pratique en France.

Des manifestations à la fois en faveur et contre la corrida ont eu lieu dans plusieurs villes de France, samedi 19 novembre. Le Parti animaliste a appelé à se mobiliser dans 28 villes "pour la fin de la corrida", tandis qu'une dizaine de "villes taurines" ont protesté pour défendre leur "patrimoine". La corrida reste pratiquée dans trois départements français qui bénéficient d'une exception à son interdiction sur le territoire national. Franceinfo revient en quatre questions sur le débat autour de cette proposition de loi, qui est débattue dans l'hémicycle jeudi 24 novembre.  

1Que contient la proposition de loi ? 

La proposition de loi comporte un article unique qui prévoit "l'abolition de la corrida sur tout le territoire français""La torture et la mort d'un animal ne peuvent légalement constituer un divertissement digne de l'éthique contemporaine", font valoir les plus de 80 députés LFI et écologistes signataires. 

Le texte prévoit de mettre fin aux exceptions sur la maltraitance animale. Les "sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux" sont punis par la loi à travers l'article 521-1 du Code pénal. Mais ces dispositions "ne sont pas applicables aux courses de taureaux lorsqu'une tradition locale ininterrompue peut être invoquée", précise l'article

Ce sont ces dérogations que ciblent les députés LFI. "Dans le Gard, les Pyrénées‑Atlantiques ou les Bouches‑du‑Rhône est donc admis ce qui est considéré comme une barbarie répréhensible dans la Sarthe ou dans les Vosges", dénoncent les élus de gauche.

2Pourquoi cette tradition locale est-elle remise en cause ? 

Pour les députés à l'initiative de la proposition de loi, l'exception au nom d'une "tradition locale ininterrompue" pour la corrida est "factice". Ils rappellent l'origine espagnole de la tauromachie, qui n'est "arrivée en France qu'en 1853, pour faire plaisir à Eugénie de Montijo, l'épouse andalouse de Napoléon III". Ils soulignent aussi que le Conseil d'Etat a abrogé en 2016 l'inscription de la corrida au patrimoine immatériel de la France, après cinq ans de bataille judiciaire, comme le détaillait France Inter

"La tauromachie, c'est notre identité, une culture vivante. Qu'on nous laisse vivre avec nos traditions", a rétorqué auprès de France 3 Occitanie Julien Dubois, maire de Dax, qui proteste contre la proposition de loi. Bien que d'origine espagnole, l'Observatoire national des cultures taurines (en PDF) assure que la corrida est aussi inspirée d'"une célébration millénaire du taureau, répandue sur l'ensemble du bassin méditerranéen sous des formes très diverses" et rapporte qu'"en France, des jeux taurins sont attestés dans le Midi dès le Moyen Âge". 

3Comment les partis politiques se positionnent-ils ? 

Les formations politiques sont partagées sur la corrida, y compris en leur sein. Le gouvernement s'oppose à cette interdiction, qui n'est pas une "priorité", selon le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu. Mais certaines figures de la macronie comme Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance à l'Assemblée nationale, se sont déjà positionnées contre cette pratique. Les élus du groupe auront donc la liberté de vote sur ce texte.

A gauche, les communistes sont "majoritairement opposés à ce texte de loi", selon le patron de leur groupe à l'Assemblée, André Chassaigne. Le Parti socialiste est, lui, partagé. La présidente PS de la région Occitanie, Carole Delga, s'est par exemple prononcée sur franceinfo "pour que les gens aient le choix d'aller ou pas à la corrida". La corrida, comme la chasse, faisait partie des sujets laissés à la "sagesse de l'Assemblée", dans l'accord de la Nupes, qui réunissait le PS, EELV, le PCF et LFI lors des élections législatives.

A droite, le groupe Les Républicains a annoncé qu'il voterait contre la proposition de loi, même s'il existe des voix dissonantes au sein du parti. Le député des Alpes-Maritimes Eric Pauget avait lui-même déposé une proposition de loi pour abolir la corrida. Il votera donc en faveur du texte, confirme-t-il à Nice-Matin

Du côté du Rassemblement national, Marine Le Pen n'a pas donné de consigne claire à son groupe. Elle est elle-même favorable à une interdiction de la corrida pour les mineurs, mais s'oppose à une abolition, comm elle l'a expliqué mercredi sur BFMTV. Les députés RN du Sud défendent la pratique, tandis que Julien Odoul, député RN de l'Yonne, la considère comme "une cruauté" et votera en faveur de la proposition de loi.

4Le texte a-t-il une chance d'être adopté ?

D'ores et déjà, la commission des lois de l'Assemblée nationale a rejeté le texte mercredi 16 novembre. Mais la proposition doit encore être débattue jeudi 24 novembre dans l'hémicycle, à l'initiative du groupe La France insoumise, qui disposera alors de sa "niche parlementaire", c'est-à-dire une journée lors de laquelle chaque groupe parlementaire peut inscrire ses propositions de loi à l'ordre du jour. Mais les douze sujets choisis par LFI pourraient rendre les délais intenables, et empêcher certains textes d'être discutés. L'opposition du gouvernement à ce texte fragilise, qui plus est, ses chances d'être adopté. 

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