Breivik : "J'ai levé mon arme et je lui ai tiré dans la tête"
Au cinquième jour de son procès, le tueur norvégien revient en détail sur la fusillade au cours de laquelle il a abattu 69 personnes en un peu plus d'une heure, le 22 juillet 2011.
Il s'agit "probablement de la journée la plus difficile" du procès. L'avocat d'Anders Behring Breivik avait prévenu : l'examen en détail, vendredi 20 avril, de la fusillade d'environ 75 minutes au cours de laquelle le tueur norvégien a abattu 69 personnes, le 22 juillet 2011, s'annonçait éprouvante pour les familles de victimes. L'accusé, appelé à décrire son état d'esprit avant et au moment des faits, a en effet enchaîné les déclarations choc, au cinquième jour de son procès.
• "Certains faisaient les morts, c'est pour cela que je tirais des coups de grâce"
Anders Breivik a raconté devant le tribunal d'Oslo, en détails et sans aucun signe d'émotion, cette journée du 22 juillet sur l'île d'Utoya. "J'ai levé mon arme et je lui ai tiré dans la tête", a-t-il raconté au sujet de sa première victime, un vigile. Et de poursuivre : "Certains faisaient les morts, c'est pour cela que je tirais des coups de grâce. (...) J'étais presque terrorisé. J'appréhendais vraiment. Je n'avais vraiment pas envie de le faire."
• "Je ne suis pas un cas psychiatrique"
"Quand on voit quelque chose de si extrême, on peut penser que c'est de la folie, mais il faut différencier extrémisme politique et folie dans le sens clinique du terme", a-t-il déclaré, insistant sur le fait qu'il n'était "pas un cas psychiatrique" mais "pénalement responsable".
La question de la santé mentale de l'extrémiste, jugé pénalement irresponsable dans une première expertise psychiatrique, puis responsable dans une contre-expertise, est centrale dans ce procès qui doit durer dix semaines. Déclaré pénalement irresponsable, il risque l'internement psychiatrique à vie. Responsable, il encourt 21 ans de prison, une peine qui pourrait ensuite être prolongée aussi longtemps qu'il sera considéré comme dangereux.
• "Je suis quelqu'un de très sympathique en temps normal"
Breivik a longuement expliqué, vendredi, comment il a refoulé ses émotions afin d'être capable de perpétrer ses attaques, mais aussi pour pouvoir s'en expliquer devant le tribunal. "Je suis quelqu'un de très sympathique en temps normal", a-t-il lancé.
Il affirme avoir notamment pratiqué la méditation et coupé ses liens sociaux en 2006 en vue de se préparer aux deux attaques. Scruté par les experts-psychiatres officiels assis devant lui, il a justifié son langage "technique" très froid, pénible à entendre pour les proches des victimes - qu'il qualifie notamment de "cibles légitimes" -, par la nécessité de "se distancier" de ses actes pour pouvoir témoigner. "Si j'avais utilisé un langage plus normal, je ne pense pas que je serais parvenu à m'expliquer du tout", a-t-il dit.
Pour pouvoir perpétrer la fusillade, l'extrémiste de droite de 33 ans a indiqué avoir recouru à un "mécanisme de défense" et qu'il avait "déshumanisé" ses victimes en s'entraînant mentalement pendant plusieurs années."Il faut déshumaniser l'ennemi (…) Si je ne l'avais pas fait, je n'aurais pas réussi" à les tuer, a-t-il expliqué.
• Il fustige "une révolution soviétique" en Norvège
Se disant en guerre contre "les élites" qui permettent "l'islamisation" de l'Europe, Breivik a reconnu les faits, mais refuse de plaider coupable."Ce sont des actes horribles, des actes barbares. Et je ne peux même pas m'imaginer comment les autres personnes le vivent", a-t-il déclaré à la défense. Mais il a expliqué avoir décidé de perpétrer une "opération-suicide" - il pensait mourir le 22 juillet - après avoir épuisé "toutes les voies pacifiques" pour promouvoir sa cause nationaliste. Une tentative qui s'est heurtée, selon lui, à "la censure" des médias, acquis au multiculturalisme.
Selon Breivik, ceux-ci ont systématiquement censuré l'idéologie nationaliste depuis la fin de la seconde guerre mondiale, tandis que l'école est, à ses yeux, un "camp d'endoctrinement" œuvrant pour le "marxisme culturel". Selon lui, c'est avec le soutien de l'Union soviétique que le parti travailliste, formation politique dominante dans l'après-guerre en Norvège, "a décidé de mettre en place une révolution communiste dans les écoles norvégiennes", a-t-il estimé. "Les garçons devaient soudain commencer à tricoter, faire du crochet et cuisiner, et les filles ont commencé à faire de la charpenterie", a-t-il déploré.
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