"Cœurs Noirs" : la nouvelle série sur les forces spéciales françaises en Irak est-elle crédible ?
Sortie le 3 février sur Prime Video, la série Cœurs noirs a battu des records en détrônant la série The Last of Us sur la plateforme. Réalisée par Ziad Doueiri, à l'origine de l'excellente série politique Baron Noir, la série a aussi bénéficié du travail de Duong Dang-Thai et Corinne Garfin, deux anciens scénaristes du Bureau des légendes. S'ajoute à cela, un très bon casting, composé de Nicolas Duvauchelle dans le rôle titre, Thierry Godard (Engrenages), Marie Dompnier (Les choses humaines), Jérémy Nadeau (Profilage), ou encore Nina Meurisse (Camille).
Cœurs noirs raconte l'histoire d'un commando des forces spéciales en 2016 à Mossoul. Leur mission : exfiltrer la fille et le petit-fils d'un émir de Daesh pour lui soutirer des informations. Pour nous aider à décrypter la série, nous avons sollicité l'avis d'Alexandre Alex qui a passé près de 11 ans au 1er RPIMa, un régiment d’élite des forces spéciales de l’Armée de terre française. Auteur du livre Stick Action Spéciale (2022), Alexandre est aussi connu sous le nom d'alex_french_sas sur Instagram, pour décrypter les scènes de guerres dans les films et jeux vidéo.
Globalement, cet ancien militaire a été plutôt impressionné par le réalisme de la série, en lui donnant une note de 15/20. Point par point, nous sommes revenus sur différents éléments mis en avant par la série et leur réalisme.
La prise de risques
Le commando du "45" est envoyé de façon officieuse à Mossoul, alors que la ville est en proie à la guerre civile avec l'armée irakienne qui tente de reprendre le contrôle sur les combattants de l'État Islamique. Un terrain hostile donc, mais qui intéresse la France qui traque ses djihadistes. Engager des forces spéciales sur un théâtre de guerre dans le but de récupérer des informations, est-ce réaliste ? "Oui, en convient Alexandre, prendre des risques pour exfiltrer des gens en échange de renseignement, ça se fait", explique-t-il.
Le chef d'équipe, Martin, incarné par Nicolas Duvauchelle prend aussi de nombreux risques, en décidant à plusieurs reprises de poursuivre des opérations contre l'avis de ses chefs. "Si on ne veut pas suivre les ordres, on coupe la radio et on dit qu'elle ne marche pas. C'est rare mais ce sont des choses que j'ai déjà vues quand la situation est tendue sur le terrain et que les ordres sont en contradiction", nous raconte Alexandre. Des prises de risques réalistes en somme, même si légèrement accentuées pour le bien de la fiction.
La tenue et les armes utilisées
Pendant le tournage, les acteurs ont suivi des entraînements militaires pour s'immerger et être plus crédibles. C'est le 13e régiment de dragons parachutistes qui les a formés pendant près de 10 jours. "Globalement, j'ai été assez impressionné. L'équipement, les armes et les attitudes sont cohérents, surtout par rapport à ce qui a été fait dans des précédents films. On sent qu'ils ont été conseillés", estime l'ancien militaire.
Pour autant, un œil expert parvient forcément à trouver quelques détails qui clochent. "Par exemple, les forces spéciales n'ont pas de noms sur leur uniforme ou bien les vitres des véhicules blindés, ça ne peut pas se baisser", raconte Alexandre. "Selon moi ce qui manque le plus de réalisme, c'est la post-production sur le son et le flash des coups de feu. Pareil pour les impacts de balle", ajoute-t-il.
Des femmes dans le commando
C'est un élément peu commun et qui saute tout de suite aux yeux : une femme au sein d'un commando de forces spéciales. L'actrice Nina Meurisse incarne cette snipeuse d'exception qui va rejoindre non sans difficulté cette unité d'opérateurs composée uniquement d'hommes.
"Les forces spéciales ne sont pas interdites aux femmes, mais il n'y en a aucune, il n'y a pas suffisamment de candidates pour que l'une d'entre elles se retrouve au sein d'un commando. Je n'en ai jamais vu et disons que c'est assez improbable d'en voir dans la série, mais ce n'est pas irréaliste pour autant, car ça pourrait être possible", estime Alexandre.
La rivalité entre les différentes unités
Autre fait intéressant dans la série, les équipes françaises et américaines coopèrent dans le cadre de différentes missions. "Disons que le copinage est un peu exagéré", réagit Alexandre. "Il y a toujours une grande rivalité, surtout entre les chefs, c'est la chasse à la médaille", poursuit-il. Une rivalité qui existe aussi au sein même des unités françaises, puisque la série montre la DGSE tentant de récupérer la mission confiée au commando du "45".
Globalement, selon notre expert militaire Alexandre, les forces spéciales sont fidèlement représentées, "on voit bien le côté souple, plus détendu, qui existe dans ces unités, plus qu'ailleurs", indique-t-il. Il a aussi été séduit par la dimension psychologique mise en avant : "Ça permet de s'identifier aux personnages, c'est pas juste des combattants. Ils ont une vie et c'est intéressant de voir comment ils allient cette vie perso avec la vie professionnelle", nous raconte-t-il. Cœurs noirs démystifie les forces spéciales tout en racontant une palpitante histoire, elle s'inscrit au palmarès des meilleure séries d'actions françaises.
"Cœurs noirs", le 3 février 2023 sur Prime Video. 6 épisodes d'environ 50 minutes.
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