"On est sur un retour au naturel" : le monde du jouet se met au vert pour satisfaire la demande des clients
Au salon du jouet de Nuremberg en Allemagne la tendance est au jouet plus responsable en matière d'environnement.
C’est l’un des plus grands salons du jouet au monde, assurément le plus grand d’Europe. Chaque année, quelques semaines seulement après Noël, tous les professionnels du jouet se retrouvent en Bavière à Nuremberg en Allemagne. Avec une tendance très nette cette année pour un jouet plus responsable en matière d’environnement.
"On est sur un retour au naturel. Pour nous, c’est la nature avec nos figurines animalières, explique Alexandre Pratlong, directeur général pour la France du fabricant allemand Schleich. Pour d’autres fabricants, ce seront des jouets en bois. Au quotidien, on parle très souvent de la biodiversité, de la protection de l’environnement et les enfants y sont sensibilisés très tôt. On voit qu’on a une demande qui s’accélère très fortement et ce n’est pas la première année, c’est depuis 3 à 5 ans".
Un besoin de nature
Depuis 85 ans, avec ces figurines en plastique d’animaux de la ferme, d’animaux sauvages et plus récemment de dinosaures, Schleich a toujours proposé un jouet très classique. La marque s’est développée massivement en France, "dès qu’on a ressenti un besoin des familles à détourner les enfants des écrans", raconte ce professionnel dont l’entreprise affiche une croissance à deux chiffres confortée par un autre besoin, la nature.
"Les contraintes environnementales aujourd’hui et les prises de conscience des populations à travers le monde font que l’entreprise a engagé une démarche de gestion de son empreinte carbone et une amélioration de la sélection des matériaux utilisés. Nous entrons dans une démarche écoresponsable qui sera dévoilée au second semestre", précise Alexandre Pratlong.
Nous voulons être acteurs et pas suiveurs, c’est une démarche qui compte pour nous.
Alexandre Pratlong, directeur général France du fabricant allemand Schleichà franceinfo
En France, 2 000 classes de maternelle utilisent ces figurines Schleich dans le cadre de l’apprentissage du langage, de la motricité, de la géographie ou de l’évolution des espèces. Ce sont certes des figurines en plastique "mais du plastique haut de gamme", nuance son directeur général pour le marché français, dans un secteur où le plastique est presque omniprésent depuis le début des années 1960.
Les clients attentifs aux matières utilisées
À tel point que fabriquer des jouets en bois passait presque il y a moins d’une dizaine d’années encore, pour une absurdité. "Avec nos jouets en bois, il y a quelques années, on nous regardait comme les derniers des Mohicans", se souvient Catherine Varacca. Elle dirige l’entreprise française Jeujura qui ne fabrique que des jouets en bois 100% français depuis 1911.
"On nous posait la question : mais pourquoi vous continuez de fabriquer en France ? Pourquoi vous ne délocalisez pas la production en Chine comme tout le monde ?", se souvient la dirigeante de cette entreprise plus que centenaire. Aujourd’hui, elle est certaine d’avoir fait le bon choix même si elle regrette que produire en France reste contraignant. "C’est un parcours du combattant mais je sais pourquoi je me bas pour maintenir ma production en France", affirme-t-elle.
Et puis désormais, depuis cinq ans environ, les consommateurs lui posent des questions qu’ils ne posaient pas avant : D’où vient ce produit ? Comment est-il fabriqué ? Votre bois est-il français ? Vos teintes sont-elles à l’eau ? Les distributeurs non plus ne posaient pas ces questions. Aujourd’hui, explique Catherine Varacca, ils font des choix en fonction de l’origine du produit, en privilégiant la proximité et ils sont attentifs aux matières utilisées.
Réduire au maximum le plastique et les emballages
"Ça fait déjà trois ans et demi qu’on travaille sur ce dossier, tout ce qui est emballage, clips pour tenir les produits, les boîtes fenêtres qu’on demande à supprimer, pas besoin de plastique autour du jouet. C’est bien aussi de pouvoir le toucher", témoigne Olivier Donval. Cet homme connaît ce salon du jouet de Nuremberg comme sa poche. Il y vient chaque année depuis 17 ans avec en moyenne une dizaine de rendez-vous par jour pendant quatre jours. Tous les fabricants savent qui il est et l’importance qu’il représente. Olivier Donval est sélectionneur de jouets pour l’un des plus grands distributeurs français : JouéClub. Il est lui-même propriétaire d’un magasin franchisé à Vire dans le Calvados. Il connaît son affaire et boucle chaque année en Allemagne le prochain catalogue de Noël et prépare déjà celui de Noël 2021.
Cet homme expérimenté voit bien la place de plus en plus grande que prend le jouet écoresponsable, comme les professionnels l’appellent. Derrière ce terme, on retrouve la responsabilité sociale, sanitaire et environnementale. "Depuis la fin de l’année dernière, fin 2019, c’est devenu la tendance dans le jouet, explique Olivier Donval qui s’en félicite. Tout le monde s’y met. Les plastiques recyclés et recyclables, les peintures naturelles..."
"Un engouement" nouveau
Sur le stand du fabricant italien Clementoni, un des leaders du marché pour les jeux scientifiques et les puzzles, on affiche fièrement sur un grand fond vert le label crée par la marque "Play for future, recycled materials" au milieu d’une feuille en forme de cœur. Plus bas, sur un écran de télévision, on voit des gaz d’échappement de voitures et les cheminées fumantes des usines. Gaylor Cornuault, directeur marketing pour la France chez Clementoni, raconte : "Tous les enfants de la famille Clementoni ne jouent qu’avec les jouets de la marque familiale. Outre le fait que 90% des produits sont fabriqués en Italie, les propriétaires-parents ont, avec conviction depuis 2014, cherché à limiter l’impact de la production sur l’environnement. Recycler, utiliser moins d’eau, avoir des matières premières venant de fournisseurs proches des usines pour limiter la présence de camions sur les routes…"
"Ça ne répondait pas au départ à une demande des consommateurs ou des distributeurs, fait valoir Gaylor Cornuault. L’entreprise n’a même pas investi dans la communication sur cet aspect-là, constatant que ça n’intéressait pas grand monde à ce moment-là". Puis les temps ont changé explique le directeur marketing : "Il se trouve qu’on rencontre une demande du marché qui vient des consommateurs et qui fait réagir aussi les distributeurs qui sentent que les consommateurs qui viennent en magasin cherchent ce type de produit plus propre, recyclé, recyclable, etc. Et ça date vraiment de maintenant, de la fin de l’année dernière, on sent une tendance depuis le deuxième semestre 2019 et aujourd’hui, on a un vrai engouement, on sent que ça parle à tout le monde !"
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