Démission de Benoît XVI : ce qui attend le Vatican jusqu'à l'élection du prochain pape
Après l'annonce de la démission de Benoît XVI, francetv info revient sur les prochaines étapes qui conduiront à l'élection du nouveau chef de l'Eglise catholique.
Le Vatican va devoir élire un 265e successeur à saint Pierre, après l'annonce du pape Benoît XVI, lundi 11 février. Ce dernier a expliqué en latin ne plus avoir "les forces" de diriger l'Eglise catholique en raison de son âge, 85 ans. Il va donc démissionner le 28 février 2013.
Ironie du sort, au milieu des années 1990, Benoît XVI – qui n'était alors que le cardinal Joseph Ratzinger – s'était penché sur l'éventualité, pour un pape, de démissionner. C'était alors pour le compte de Jean-Paul II, dont il était le confident et chargé de la doctrine de la foi. "[Benoît XVI] a déjà longuement mûri cette question", explique ainsi Hervé Yannou, journaliste et historien, auteur de Jésuites et compagnie (éd. Lethielleux), contacté par francetv info. Retour sur une succession annoncée, et la réorganisation provisoire du Saint-Siège.
Une "grande rupture" dans l'histoire de l'Eglise
Que dit le Code canonique ? Certes, le Code de droit canonique du Vatican (canon 332, article 2) prévoit une telle éventualité : "S'il arrive que le Pontife Romain renonce à sa charge, il est requis pour la validité que la renonciation soit faite librement et qu'elle soit dûment manifestée, mais non pas qu'elle soit acceptée par qui que ce soit." Le droit explique donc que la démission (ou renonciation) est possible. Mais cette option ne se traduit pour ainsi dire jamais dans les faits. "Dans la théorie catholique, le pape est élu par Dieu et il est le représentant de Dieu sur Terre", explique l'historien et journaliste Hervé Yannou, auteur de Jésuites et compagnie (éd. Lethielleux). Difficile dans ces conditions de décider de passer la main...
Les raisons invoquées. Dans le livre d'entretien Lumière du monde, de Peter Seewald, publié en 2010, Benoît XVI avait évoqué son éventuelle démission : "Quand un pape arrive à la claire conscience de ne plus être en mesure physiquement, psychologiquement et mentalement de mener la mission qui lui a été confiée, alors il a le droit, et dans certaines circonstances le devoir, de démissionner." Certaines sources évoquent la maladie du pape, qui serait atteint de leucémie.
Des précédents ? Il existe quelques précédents dans l'histoire de l'Eglise catholique, mais sont très anciens, la dernière démission d'un souverain pontife remontant au XVe siècle. Le cas le plus connu est celui du pape Célestin V, qui a abdiqué de sa fonction en 1294. Il avait vécu en ermite jusqu'à sa désignation comme pape, et ne se sentait pas prêt à assumer ce rôle dans l'Eglise. La décision de Benoît XVI reste donc rarissime. Elle représente "une grande rupture" dans l'histoire de l'Eglise, assure Hervé Yannou.
"C'est comme si le pape était mort"
La période de siège vacant. Après le 28 février, une période de 'sede vacante' (siège vacant) va débuter, a précisé lundi le père Federico Lombardi, porte-parole du Vatican. "C'est comme si le pape était mort, précise Hervé Yannou. Benoit XVI ne pourra plus rien signer, son règne sera terminé."
Qui expédiera les affaires courantes ? Une congrégation particulière sera mise en place pour "expédier les affaires courantes" et "animer les réunions préparatoires à la prochaine élection". Celle-ci sera composée de Tarcisio Bertone, le cardinal dit "camerlingue" (qui gouverne quand le Saint-Siège est vacant) et d'un groupe de trois cardinaux tirés au sort et remplacés tous les trois jours. A ses côtés, la congrégation générale, composée de l'ensemble du Collège des cardinaux, devra être consultée pour des questions plus difficiles.
Quid de Benoît XVI ? "Il est compliqué d'avoir deux papes", souligne Hervé Yannou. La situation est bien différente de celles des périodes de schisme (comme au XVe siècle, quand plusieurs papes catholiques étaient élus et rivaux). Mais la coexistence d'un pape élu et d'un pape "émérite", Benoît XVI, peut brouiller le message de l'Eglise. L'actuel pape a d'ailleurs la particularité d'avoir poursuivi un travail de théologien durant son pontificat, quitte à signer des ouvrages du nom de "Ratzinger". Une activité qu'il devrait poursuivre après sa démission. "On ne sait pas où il va se retirer : en Italie ou en Allemagne ? Dans un monastère ou non ?"
La guerre intestine est lancée. Il y a "toujours des luttes, des clans" au Vatican. Mais cette fois, les débats seront un peu différents. "Les querelles se cristallisent d'habitude autour d’un cadavre, et là n’y en a pas", ajoute Hervé Yannou. Les débats devraient être sensiblement différents, avec un thème de plus en plus important dans le choix du futur souverain pontife : celui de l'âge.
Des élections à la fin mars
Rendez-vous à Pâques. Les choses vont aller vite, puisque de nouvelles élections devraient se tenir "un mois seulement" après la démission de Benoît XVI. Celle-ci étant prévue pour le 28 février, les cardinaux devraient donc désigner un nouveau pape "pour Pâques", dimanche 31 mars, a indiqué le porte-parole de Benoît XVI. "La seule différence, pointe Hervé Yannou, c'est que jusqu'ici, le rite électoral et le rite funéraire se croisaient durant cette préparation".
Le conclave de la chapelle Sixtine. Place aux cardinaux, qui devront élire un successeur à Benoît XVI. Comme lors de son élection, ils se réuniront en conclave dans la chapelle Sixtine, dans un isolement total. Les cardinaux âgés de plus de 80 ans ne pourront pas participer au conclave, en vertu d'une décision de Paul VI. Benoît XVI lui-même, âgé de 85 ans, ne pourra donc pas voter. Le pape est élu par scrutin, aux deux tiers de suffrages exprimés. Lorsque le vote est enfin obtenu, une fumée blanche s'échappe de la cheminée extérieure d'un poêle, visible depuis la place Saint-Pierre.
Qui pour lui succéder ? Il est encore tôt pour se lancer dans les pronostics, même si quelques noms circulent déjà sur la toile (en italien), dont le cardinal français Jean-Louis Tauran, président du Conseil pontifical pour le dialogue inter-religieux. Et pourquoi pas un pape africain ? A la mort de Jean-Paul II en 2005, le Nigérian Francis Arinze, préfet de la congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, faisait partie des cardinaux susceptibles d'être élus. Mais pour Hervé Yannou : "Tout est envisageable, un pape africain, asiatique, nord ou sud-américain." Contacté par francetv info, l'historien Philippe Levillain pronostique plutôt l'élection d'un pape italien.
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