Hollande "ne connaît rien" des investissements de son trésorier dans un paradis fiscal
Jean-Jacques Augier, homme d'affaires et trésorier de la campagne de François Hollande en 2012, est actionnaire de deux sociétés offshore basées dans les îles Caïman, un paradis fiscal.
Après les aveux de Jérôme Cahuzac, c'est une révélation qui risque d'entacher un peu plus l'image de "République exemplaire" promise par François Hollande. Jean-Jacques Augier, homme d'affaires et trésorier de la campagne du chef de l'Etat en 2012, est actionnaire de deux sociétés offshore basées dans les îles Caïman, un paradis fiscal, selon des informations publiées par Le Monde, jeudi 4 avril. Le président de la République assure qu'il "ne connaît rien" des activités de son ancien trésorier.
Francetv info revient sur ce nouveau scandale.
Qui est Jean-Jacques Augier ?
Jean-Jacques Augier, 59 ans, est un vieil ami de François Hollande. Les deux hommes se connaissent depuis la fin des années 1970 et l'ENA, où ils font tous les deux partie de la fameuse promotion Voltaire. Polytechnicien et ancien inspecteur des finances, Augier fait fortune dans les années 1990 en dirigeant la compagnie de taxis G7. Il quitte la société en 2000, avec un parachute doré de 11 millions d'euros.
Il profite de cette petite fortune pour investir en Chine, dans la boucherie et la librairie. Passionné de littérature, il devient parallèlement l'actionnaire principal du magazine Books, et rachète début 2013 le magazine gay Têtu à Pierre Bergé, pour un euro symbolique.
Que lui est-il reproché ?
Selon les informations publiées par Le Monde, Jean-Jacques Augier fonde en 2005 International Bookstores Limited. Une société qu'il monte avec un ami français et un investisseur chinois, et qu'il implante aux îles Caïman.
Le Monde précise qu'en 2008-2009, Jean-Jacques Augier "participe à la création d'une deuxième entité offshore, également localisée aux Caïmans, cette fois avec plusieurs actionnaires internationaux".
Que répond l'intéressé ?
Jean-Jacques Augier confirme ces informations au Monde, mais dément toute activité illégale. Dans un entretien à l'AFP, il prend également soin de mettre hors de cause le président de la République. "François Hollande n'a rien à voir, ni de près ni de loin, avec mes activités. Il n'en a eu connaissance en aucun cas", assure-t-il.
"Ce que je regrette, c'est de voir ce maelström qui n'a pas de fondement", ajoute-t-il, avant de s'insurger contre "l'utilisation que l'on essaye de faire de [s]a personne pour atteindre le chef de l'Etat". Au Monde, il précise enfin que c'est à la demande de son partenaire chinois que le choix s'est porté sur les îles Caïman. Il n'a "ni compte bancaire personnel ouvert aux Caïmans ni investissement personnel direct dans ce territoire", explique-t-il.
"J'ai investi dans cette société par l'intermédiaire de la filiale d'Eurane en Chine, Capital Concorde Limited, un holding qui gère toutes mes affaires chinoises", précise Jean-Jacques Augier. "L'investissement dans International Bookstores apparaît au bilan de cette filiale. Rien n'est illégal", ajoute-t-il, reconnaissant toutefois avoir "peut-être manqué de prudence".
Que répond François Hollande ?
Depuis le Maroc, où il est en visite officielle, le président de la République a affirmé qu'il n'était pas au courant des activités privées de son ancien trésorier. "Je ne connais rien de ces activités et si elles ne sont pas conformes à la loi fiscale, je demande à l'administration de s'en emparer et de faire les rectifications si elles sont nécessaires", a-t-il déclaré.
Il rappelle au passage que ses "comptes de campagne ont été considérés comme parfaitement réguliers". Une manière de rappeler que ceux de son rival Nicolas Sarkozy ont été rejetés fin 2012.
D'où proviennent ces révélations ?
Ces informations sont issues de milliers de documents transmis au Monde par des journalistes américains de l'International consortium of investigative journalists (ICIJ), dont le siège est situé à Washington. Le groupe a eu accès à des millions de fichiers concernant des fonds et des compagnies installées dans les îles Vierges britanniques, dans les îles Cook et dans d'autres paradis fiscaux.
En analysant ces données, ils ont mis au jour le nom de plusieurs évadés fiscaux VIP. Parmi eux figurent le défunt magnat suisse Gunter Sachs, l'ancien ministre des Finances de Mongolie, un richissime homme d'affaires américain ou encore une collectionneuse espagnole liée à la famille d'industriels allemands Thyssen.
Selon une estimation du cabinet de conseil McKinsey, citée par le Guardian, qui a collaboré avec l'ICIJ sur cette affaire, le montant des fonds dissimulés dans les paradis fiscaux du monde entier pourrait atteindre 24 000 milliards d'euros. Soit près de dix fois le produit intérieur brut (PIB) annuel de la France.
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