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Fin de l'aide au carburant : le sénateur centriste Michel Canévet appelle à "une taxation" de la pêche étrangère pour que les pêcheurs français "puissent engager leur transition énergétique"

Le sénateur centriste du Finistère, Michel Canévet, appelle à une "meilleure solidarité au niveau de la filière" de la pêche, qui passerait par "une taxation" afin d'investir dans de nouvelles technologies.
Article rédigé par franceinfo
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Des pêcheurs en mer à bord d'un chalutier au large de Sète (Hérault), en janvier 2021. (GUILLAUME BONNEFONT / MAXPPP)

Michel Canévet, sénateur centriste du Finistère, a appelé vendredi 22 septembre sur franceinfo à "une taxation" de la pêche étrangère vendue en France pour "soutenir les pêcheurs français de façon à ce qu'ils puissent engager leur transition énergétique".

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Alors que le gouvernement a annoncé la fin des aides au carburant pour les pêcheurs à partir du 15 octobre, les pêcheurs français, réunis aux Assises de la pêche à Nice, dénoncent une "trahison". Selon le sénateur, "il faudrait que les technologies puissent évoluer rapidement" pour que la pêche française ne dépende plus du gazole. "On fonde beaucoup d'espoir sur l'hydrogène, mais les technologies ne sont pas matures", souligne-t-il. En attendant, une "meilleure solidarité au niveau de la filière" qui passerait par une taxation de la pêche étrangère permettrait de sauver les pêcheurs français, selon lui.

franceinfo : Vous comprenez l’inquiétude dans la profession ?

Michel Canévet : Je comprends l'inquiétude des pêcheurs. L'essentiel de la pêche française, aujourd'hui en volume, provient de la pêche au chalut. Le chalut est un filet que l'on traîne au fond de la mer. Cela demande beaucoup de puissance sur les bateaux et donc beaucoup de consommation de carburant. Ça pèse sur l'équilibre économique des navires de pêche. Le prix du carburant est à un niveau élevé puisqu'il est à hauteur de 0,90 euro (détaxé). Les pêcheurs bénéficient d'une aide de 0,20 euro jusqu'au 15 octobre. Tout le monde ne l’a pas. Tout simplement parce qu’il y a un maximum par entreprise de pêche pour obtenir ces 330 000 euros. Autant les pêcheurs artisans qui ont leurs propres bateaux et un seul bateau ont encore de la marge pour arriver à ce plafond de 330 000 euros. Par contre, les armements à la pêche qui ont plusieurs navires, et qui font l'essentiel des volumes, ont déjà atteint ce niveau d'aide depuis le début de l'année. Ils ne peuvent plus y prétendre. Ces armements aujourd'hui ont beaucoup de difficultés à équilibrer leurs comptes puisqu'ils n'ont pas l’aide. Le poids du carburant pèse beaucoup sur leurs charges.

Que faut-il faire alors ?

L’idéal serait effectivement qu’on puisse déplafonner de façon à ce que l'aide puisse être octroyée à tout le monde. Le problème de la pêche, c'est qu'on n'a pas aujourd'hui d'alternative au moteur thermique, c'est-à-dire qu'il n'existe pas de navires qui aujourd'hui permettent d'effectuer la pêche avec un autre mode de propulsion que le gazole. Il faudrait que les technologies puissent évoluer rapidement. On a un peu la même difficulté dans le secteur aérien. Il n'y a pas d'alternative aujourd'hui aux moteurs thermiques. Ils sont contraints à l'utilisation du carburant. Effectivement, aujourd'hui avec le prix du poisson assez bas et le prix du carburant qui est très haut, forcément la rémunération des patrons des pêcheurs se réduit.

Ne faudrait-il pas, avec des aides financières, renouveler la flotte avec des bateaux moins consommateurs de carburant ?

Oui, bien sûr. Les pêcheurs n'ont d'ailleurs pas attendu pour construire des bateaux neufs, mais aussi pour remotoriser les bateaux, pour avoir un moteur un peu moins consommateur. Les gains sont de l'ordre de 20% de consommation. C’est appréciable, bien entendu. Mais ce n'est encore pas suffisant dans le contexte que je viens d’évoquer. Ceux qui l'ont déjà fait ne gagneront rien. Des appels à projets ont été lancés par le ministère pour essayer d'expérimenter d'autres technologies, comme par exemple une partie carburant et une partie électrique. On fonde beaucoup d'espoir aussi sur l'hydrogène, mais les technologies ne sont pas matures.

En attendant, comment font les pêcheurs français pour vivre de la pêche surtout qu’ils souffrent de la concurrence étrangère notamment britannique depuis le Brexit ? Faut-il avoir une politique plus ferme au niveau européen pour tenter de sauver la filière française ?

Clairement, oui. La France est un grand pays maritime. Pourtant, nous importons quasiment les deux tiers des produits de la mer que nous consommons. On appelle à une meilleure solidarité au niveau de la filière. C'est-à-dire qu'il peut y avoir une taxation de ces produits de la mer qui, pour l'essentiel, arrivent de l'étranger et qu'ils puissent contribuer à soutenir les pêcheurs français de façon à ce qu'ils puissent engager leur transition énergétique. Sans cette solidarité, il sera difficile de trouver les moyens permettant effectivement d'assurer cette transition énergétique.

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