Quand vos gestes parlent de vous
Jean-Pierre Veyrat a créé en 1983 la morphogestuelle, une méthode qui explore la personnalité en se fondant sur l'analyse des aspects morphologiques et gestuels du comportement observable. Pour cet expert, il ne s'agit pas pour autant de faire des projections trop hâtives. La connaissance de la morphogestuelle n'est pas destinée à "coincer" l'autre, mais à l'aider à "se décoder".Dans quelle mesure les gestes et les attitudes sont-ils importants dans les relations professionnelles ?Jean-Pierre Veyrat : "Ils sont en effet déterminants. Dans les entreprises, on attend que les salariés aient les attitudes et comportements qui correspondent à leur statut et à leur fonction. S'ils n'ont pas les postures ou les mimiques attendus, par exemple de prévenance, d'accueil, d'empathie, de compassion qui peuvent se manifester par le sourire ou la main tendue, ils peuvent choquer ou décevoir."Les personnes ont-elles conscience de l'importance de leur comportement ?J. -P. V. : "Aujourd'hui, on demande à certains dirigeants ou cadres une vigilance qui peut dépasser là où ils en sont. Certains font très attention à bien maîtriser leurs faits et gestes. Parfois jusqu'à l'outrance, jusqu'à l'absurde. Prenez les hommes politiques : certains ont un discours affectif alors que leur comportement n'est pas conforme à leur propos."
Qu'est-ce que ces comportements nous apprennent sur nous ? Sur nos pensées ? Nos envies ?
J. -P. V. : "Ils nous apprennent nos propres assurances, nos détestations, nos blocages. Par exemple, vous pouvez avoir besoin d'être rassuré par l'autre, de savoir quel impact vous avez sur lui. Comment ? Par les signes de reconnaissance qu'il émet comme son sourire, la main qu'il vous tend. Il y a des recruteurs qui font ainsi très attention de manifester des signaux d'accueil vis-à-vis d'un candidat, de le mettre à l'aise corporellement."
Que nous apprennent-ils sur les autres ?
J. -P. V. : "On se rend compte que l'on est très souvent piégé par l'apparence et l'attitude de l'autre. On peut par exemple avoir une sympathie ou une répulsion pour quelqu'un qui n'a rien à voir avec ce qu'il est vraiment parce qu'il manifeste un comportement inapproprié. Cela nous apprend aussi comment l'autre nous considère. Par exemple, lorsqu'on vous annonce une nouvelle fâcheuse, que vous n'êtes pas retenu pour tel poste ou que la promotion que vous attendiez vous a été refusée, vous aimeriez qu'on vous regarde dans les yeux lorsqu'on vous l'annonce et pas par terre..."Peut-on les maîtriser ? Les "travailler" ?J. -P. V. : "La particularité du corporel, c'est qu'il est dix fois moins contrôlable que le discours. Jusqu'à l'âge de trois ans, la gestuelle est l'unique langage de tous les bébés du monde.Après, on lui apprend un langage oral et il oublie le gestuel qui reste inconscient. Vous pouvez le travailler dans les codes et les rituels, et avoir ainsi des gestes de composition. Si vous ne pouvez pas changer de comportement, vous pouvez faire l'effort de changer une attitude.En même temps, il ne s'agit pas de tenter de ressembler à quelqu'un d'autre. Il faut se poser la question de savoir quels sont les ignaux comportementaux que l'on émet, ceux qui sont invalidants ou qui peuvent porter préjudice - et qu'il serait bon de corriger - et ceux qui vous appartiennent et qu'il ne faut surtout pas changer. Il ne s'agit donc pas d'essayer de se composer un personnage mais d'avoir pleinement conscience de qui l'on est."En savoir plus- La morphogestuelle : le site de Jean-Pierre Veyrat. Vous y trouverez un quiz sur le langage corporel.
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