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Loi Travail : tenir ou lâcher du lest, le dilemme des députés socialistes

Plusieurs élus de la majorité évoquent des modifications ou un retour aux négociations sur la loi Travail.

Article rédigé par Marie-Violette Bernard
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
La ministre du Travail, Myriam El Khomri, durant une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, à Paris, le 11 mai 2016. (MARTIN BUREAU / AFP)

Rester sur ses positions ou lâcher du lest : le doute s'installe chez les socialistes. Les déclarations contradictoires sur la loi Travail se sont enchaînées, jeudi 26 mai, au sein de la majorité. Si le retrait du texte n'est plus réclamé par les frondeurs, les appels à reprendre les négociations avec les organisations syndicales se font de plus en plus nombreux.

Alors que les manifestations et les blocages contre la loi El Khomri se poursuivent, certains socialistes craignent, en effet, que le bras de fer entre le gouvernement et les syndicats ne se solde par un échec. "D’un côté, on ne va pas retirer la loi, et de l’autre, on ne ralliera pas la CGT avec deux mini-amendements sur l’article 2, analyse une ministre, citée par LibérationDonc, on tâtonne tous."

"Peut-être qu'il faut toucher à l'article 2"

Une solution commence, toutefois, à faire son chemin dans les rangs socialistes : revoir le texte. Le rapporteur de la loi Sapin 2, Sébastien Denaja, a été le premier à semer le trouble. Il a proposé, mardi 24 mai, de "réenclencher un tour de table" pour retravailler "un certain nombre de points" du projet, rapporte BFMTV

Le lendemain, c'est au tour du chef de file des députés PS d'en remettre une couche. Bruno Le Roux a, en effet, évoqué une évolution de l'article 2 sur les accords d'entreprises et proposé de revenir sur la question des heures supplémentaires, indiquent Les Echos.

Le coup de grâce a été porté par un membre du gouvernement, jeudi 26 mai. "Peut-être qu'il faut toucher à l'article 2 sur certains points", a lancé le ministre des Finances, Michel Sapin, sur LCP. 

"L'exaspération est trop importante"

Plusieurs députés socialistes sont déjà prêts à faire cette concession. "Il faut à tout prix éviter un nouveau recours au 49.3 en deuxième lecture", s'inquiète Eduardo Rihan-Cypel, joint par fancetv info. L'élu estime que "de nouvelles négociations avec les organisations syndicales" permettront non seulement de mettre un terme aux manifestations, mais aussi de faire approuver le texte par la majorité.

"Il faut bouger sur ce texte, car l'exaspération est trop importante, abonde le député PS de Haute-Garonne, Gérard Bapt. Qu'il s'agisse d'un retrait partiel du texte ou de nouvelles négociations pour en modifier certains points, il faut que le gouvernement prenne une initiative."

Manuel Valls reste ferme

Cette perspective ne séduit pas du tout le couple exécutif, qui redoute que le projet de réforme de Code du travail ne soit un peu plus vidé de sa substance. Manuel Valls a d'ailleurs tenté de rappeler tout le monde à l'ordre, jeudi 26 mai, à commencer par les membres de son propre gouvernement. "On ne touchera pas à l'article 2, a-t-il martelé au micro de BFMTV. Il est hors de question de changer le cadre."

Certains fidèles du Premier ministre et de François Hollande continuent de soutenir le gouvernement dans cette voie. Pour le socialiste Bernard Poignant, une réécriture du texte n'est ainsi "pas souhaitable". "La loi a trouvé son équilibre", estime le conseiller de François Hollande, interrogé par francetv info.

"L'article 2 ne fait que généraliser les accords d'entreprises, qui existent dans la loi depuis 2008 et qui avaient, à l'époque, été approuvés par le patronat et les syndicats, insiste-t-il. Mais la passion de ces dernières semaines fait qu'on ne regarde plus la loi."

Pour les frondeurs, le gouvernement finira par céder

Carlos Da Silva estime encore qu'il peut il y avoir "des améliorations" du texte, mais seulement sur d'autres articles. "On ne va pas réécrire l'article 2 car, si on [le fait], c'est la CFDT, l'Unsa et la CFTC qui se sentiraient floués", explique-t-il au micro d'Europe 1. Ces trois organisations syndicales ont accepté la nouvelle mouture du projet de réforme du Code du travail.

Cédera ? Cédera pas ? Les députés de la majorité semblent pour le moins divisés. Le frondeur Alexis Bachelay assure toutefois que l'exécutif finira par réviser l'article 2. "Les déclarations les plus martiales, en politique, précèdent souvent la réouverture d'un dialogue ou la recherche du compromis", a-t-il estimé sur France Info, jeudi 26 mai.

François Hollande a tout de même répété, vendredi, que "la philosophie - y compris de l'article 2 - doit être maintenue". Et de conclure : "Je tiendrai bon, parce que je pense que [la loi Travail] est une bonne réforme".

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