Sécheresse : le stockage de l'eau "devient une priorité absolue pour gérer la crise et l'offre"
Au total, 196 arrêtés ont été pris et sont en cours jeudi pour inciter les professionnels et particuliers à économiser l'eau. Des mesures insuffisantes pour les spécialistes interrogés par franceinfo.
"On vit actuellement une crise profonde au niveau de la sécheresse", a déploré jeudi 29 août sur franceinfo Yannick Pognart, inspecteur de l’environnement à l’Agence française pour la biodiversité et membre du Syndicat national de l’Environnement (Sne-FSU), alors que 87 départements français sont encore soumis à des mesures de restriction d'eau. Seuls deux départements de France métropolitaine, les Côtes d'Armor et le Morbihan, sont totalement épargnés par les mesures.
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"37% des cours d'eau sur le territoire au 28 août qui sont à sec ou en rupture d'écoulement", a expliqué Yannick Pognart, qui déplore le manque de moyens pour faire respecter les restrictions d'eau. Certaines communes se ravitaillent en eau courante via des camions citernes. "Il y a des milliers de contrôles qui sont menés sur le territoire chaque été par nos services mais nous avons tout un tas d'autres missions, donc cela devient de plus en plus difficile avec la réduction des effectifs d'assurer cette mission", a-t-il observé.
Des mesures de restriction insuffisantes
Aziza Akhmouch, responsable du programme de l'OCDE sur la gouvernance de l’eau, a estimé de son côté sur franceinfo qu'il faut "élever le sujet de l'eau comme un enjeu de développement économique et pas uniquement un enjeu sectoriel de politique environnementale". L'experte insiste sur la nécessité de changer de système et ne pas faire de l'eau uniquement une "priorité environnementale mais un instrument de bien-être, de cohésion territoriale, de croissance économique". Les mesures de restriction sont un outil important pour gérer la demande à court terme selon elle, mais elles restent insuffisantes.
La France a vraiment besoin d'un système plus visible que des arrêtés sécheresse
Aziza Akhmouchà franceinfo
Alors quelles solutions doivent-être mises en place ? D'après Aziza Akhmouch, le stockage de l'eau "devient une priorité absolue pour gérer la crise et l'offre". Elle estime qu'il faut "passer d'une gestion de crise à une gestion de risque et anticiper les problèmes" en plus d'"adopter des mesures beaucoup moins court-termiques et coûteuses".
Pour ce faire, les agriculteurs doivent s'adapter mais aussi bénéficier d'un soutien dans ce changement. "Il faut que les agriculteurs commencent à planter ce que les conditions climatiques et hydrologiques permettent à court et à moyen terme", explique Aziza Akhmouch, en ajoutant, qu'il faut "combiner des outils réglementaires et d'autres formes d'incitation et de compensation, sinon ça ne marche pas".
Les "zones humides", la solution miracle ?
De son côté, Yannick Pognart insiste sur le rôle déterminant des "zones humides" en cas de sécheresse, disparues à "70% sur le territoire français"."On se focalise beaucoup sur les bassines qui semblent être la solution ultime", mais "c'est intéressant de réfléchir plus largement sur le rôle des zones humides qui sont de véritables éponges et qui reçoivent l'eau cumulée l'hiver et qui vont la redonner lentement toute la période estivale", a-t-il rajouté.
Selon lui, les zones humides sont "une vraie problématique importante en terme de solution". "Pendant des décennies, on a favorisé l'écoulement très rapide de l'eau pour lutter notamment contre les inondations mais on s'aperçoit aujourd'hui que c'est une véritable problématique", regrette Yannick Pognart. "On perd l'équivalent d'un département tous les dix ans", conclut-il.
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