Taux records de prosulfocarbe en Charente-Maritime : un maire demande au gouvernement de "prendre ses responsabilités" en appliquant "un moratoire"
Dans la plaine céréalière d’Aunis, proche de La Rochelle (Charente-Maritime), les mesures ont révélé des concentrations en prosulfocarbe dans l’air jamais observées en France. Un maire réclame un moratoire sur son utilisation.
Marc Maigné appelle ce vendredi 22 juillet le gouvernement à "prendre ses responsabilités" sur l'utilisation du prosulfocarbe, un pesticide utilisé par les céréaliers. Marc Maigné est le maire de Nieul-sur-Mer, une commune située à quelques kilomètres au nord de La Rochelle, médecin de profession et délégué aux questions de santé publique pour la Communauté d’agglomération de La Rochelle.
Une étude indépendante d'Atmo Nouvelle-Aquitaine, l’observatoire régional de surveillance de la qualité de l’air, a révélé des concentrations records de ce désherbant dans l'agglomération de La Rochelle. Un cluster de cancers pédiatriques a été identifié dans la plaine céréalière d'Aunis, aux portes de la cité rochelaise. Les élus locaux interpellent le ministère de l'Agriculture et réclament un moratoire sur son utilisation : "C'est une mesure d'urgence sanitaire. Un principe de précaution qui doit s'appliquer", a-t-il affirmé.
Le ministère de l'Agriculture n'a pas retenu la demande immédiate de moratoire sur l'interdiction du prosulfocarbe a déclaré le maire de Nieul-sur-Mer contacté ce vendredi par France Inter. Le ministère a en revanche demandé un avis, en urgence, avant le 30 septembre, à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) sur le produit. Le gouvernement prendra sa décision une fois cet avis remis.
franceinfo : À quel niveau se situe la concentration de cet herbicide à La Rochelle ?
Marc Maigné : Notre réaction a été une grande surprise. Les concentrations dans l'air qui nous ont été communiquées par Atmo Nouvelle-Aquitaine sont tellement élevées qu'on s'est d'abord demandé si ce n'était pas une erreur. Mais c'était bien la réalité après vérification.
"On arrive à des concentrations moyennes dans l'air qui peuvent être 6 à 8 fois supérieur dans la plaine d'Aunis par rapport à ce qu'on peut trouver dans d'autres plaines céréalières françaises"
Marc Maigné, référent des questions de santé publique pour la Communauté d’agglomération de La Rochellefranceinfo
Comment l'expliquez-vous ?
C'est bien ce qui nous préoccupe. Pour avoir une différence tellement importante, il faut qu'il y ait un problème de pratique au niveau agricole, au niveau des pulvérisations. On ne peut pas l'expliquer uniquement par des différences de climat ou des différences de conditions en ce qui concerne le vent, la pluie, etc. Pour qu'il y ait de telles différences entre la Nouvelle-Aquitaine et les Hauts de France, il faut qu'il y ait un problème de pratique. Donc, nous pensons tout simplement que ce produit est utilisé de façon beaucoup trop importante localement.
Pour vous, le lien est établi entre les nombreux cancers et ce pesticide ?
Je ne peux pas dire que le lien est évident parce que scientifiquement, il n'a pas été démontré. Par contre, ce que l'on sait, c'est que cette famille de produits est potentiellement dangereuse pour la santé humaine, puisqu'il y a d'autres produits qui sont des cousins germains du prosulfocarbe dont on a démontré la dangerosité et pour lesquels, d'ailleurs, certaines maladies professionnelles ont été reconnues par la Mutualité sociale agricole pour les agriculteurs qui utilisent ces pesticides.
S'il y a des produits très voisins qui provoquent des leucémies, des cancers, des maladies neurodégénératives, des maladies de Parkinson chez des agriculteurs, c'est qu'il y a un risque pour la santé humaine. Donc, ce que nous demandons, c'est l'application de ce qu'on appelle le principe de précaution. À court terme, ce que nous demandons, c'était le sens de la demande auprès du Ministère, c'est un moratoire, une date pour l'arrêt de l'utilisation et donc l'arrêt de vente de ce produit. C'est maintenant qu'on l'achète pour l'utiliser dans six mois. Il y a une forme d'urgence qui nous a poussés à envoyer cette demande par écrit au ministère de l'Agriculture. Il faut que le gouvernement prenne ses responsabilités. Pour nous, c'est une mesure d'urgence sanitaire. Un principe de précaution qui doit s'appliquer. Nous demandons l'arrêt de la vente et l'utilisation de ce produit dès maintenant. Et, cela ne peut venir que du gouvernement.
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