: Témoignage Guerre en Ukraine : "Un idiot comme Poutine va briser des vies", la colère de ce producteur ukrainien de blé
Depuis l'invasion russe, les exportations de céréales, et notamment de blé, sont au point mort, en raison du blocus des ports ukrainiens par la marine russe. L'ONU craint un risque de famine dans les pays qui en dépendent, en particulier en Afrique et au Moyen-Orient.
Les hangars de Volodymyr sont pleins, ici, dans des exploitations autour de Kryvyï Rih, à une cinquantaine de kilomètres du front de Kherson, dans le sud de l'Ukraine. "Venez, je vais vous montrer le blé, pour que vous compreniez notre malheur. C’est à la fois notre fierté et notre douleur. C’est de l’or. Et c’est dommage qu’un idiot comme Poutine brise des vies : c’est lui qui provoque volontairement une famine mondiale", accuse-t-il.
Et pour cause, cet agriculteur se retrouve avec quelques 5 000 tonnes de blé sur les bras, qui ont désormais perdues la moitié de leur valeur, et qui ne trouvent pour le moment pas preneur. Il y a encore quelques mois, pourtant, ce producteur de céréales exportait sa production par les ports d’Odessa, de Mykolaïv et de Kherson.
"80% des exportations de céréales en Ukraine passaient par la mer. Aujourd’hui, tout s’est arrêté. On a essayé par le train mais la liste d’attente est longue, pas avant décembre pour nous. C’est impossible de passer par le train, on ne pourra pas honorer nos commandes..." soupire-t-il.
La Russie, qui a envahi son voisin le 24 février, bloque les ports ukrainiens de la mer Noire et empêche donc l'exportation de ces céréales, qui ont nourri 400 millions de personnes l'année dernière. Les Nations unies mènent d'ailleurs d'intenses et discrètes négociations pour libérer ces dizaines de millions de tonnes de céréales ukrainiennes et empêcher ainsi une crise alimentaire mondiale, selon le coordinateur de l'ONU en Ukraine.
"On a quand même de l’espoir car notre survie en dépend"
Selon l’association céréalière ukrainienne, qui rassemble producteurs et exportateurs de céréales, dix millions de tonnes sont toujours stockées dans des silos. Avant le conflit, le pays était le quatrième exportateur mondial de maïs, en passe de devenir le troisième exportateur de blé, et assurait, seul, 50% du commerce mondial de graines et d'huile de tournesol avant le conflit.
Une situation d'autant plus urgente que la prochaine récolte va bientôt arriver. Et pourtant, malgré la guerre, Volodymyr continue de semer. Ce blé, ce sera pour la rentrée, l’orge, en octobre. Et et en ce moment, c’est le tournesol.
"Ce blé-là a été semé à l’automne dernier, avant la guerre. On vient de semer le tournesol mais deux fois moins que l’année dernière, explique Volodymyr. On ne prend pas de risque parce que l’avenir est incertain. Donc on travaille… Nous sommes des agriculteurs, nous exploitons la terre et on a quand même de l’espoir car notre survie en dépend. Les villageois croient que la raison va prendre le dessus et que l’on pourra arrêter ce désastre."
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Et puis, il y a les prix de l’essence et des engrais qui explosent : Volodymyr devrait perdre cette année entre 50% et 60% de ses revenus. Il doit rembourser plus de 600 000 euros d'ici l’automne prochain, dans le cadre d'un prêt à taux zéro garanti par Kiev.
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