Franceinfo en campagne. Whirpool au cœur des législatives dans la Somme
Jusqu’aux législatives des 11 et 18 juin prochains, franceinfo zoome chaque jour sur une circonscription. Vendredi, direction la première circonscription de la Somme où le dossier Whirlpool devrait peser dans le scrutin.
Franceinfo poursuit son tour de France des circonscriptions qui valent le détour avant les législatives des 11 et 18 juin. Après le Vaucluse, la Corrèze, la Sarthe, l'Hérault et la Corse-du-Sud, dernière escale avant le premier tour du scrutin : direction la première circonscription de la Somme, là où vivent de nombreux salariés de l'usine Whirlpool d'Amiens qui a marqué l'actualité sociale cette année.
Le fabricant d'électroménager américain a décidé de délocaliser sa production de sèche-linge en Pologne. Comme il a pesé dans la course à la présidentielle, ce dossier Whirlpool pèse sur la campagne des législatives. L'usine de matériel électroménager est située dans la deuxième circonscription, à la lisière de la première.
À 13h, devant l'usine, l'équipe du matin laisse la place à celle du soir. Sur les grilles qui entourent le parking des salariés, des drapeaux syndicaux flottent au vent. Ce sont presque des souvenirs déjà. La fermeture est actée. Ce sera en 2018. Syndicats et direction ont scellé un accord le mois dernier. Aujourd'hui, les salariés sont amers et fatigués. La politique est la dernière chose dont ils ont envie de parler. De tous les candidats dont les portraits fleurissent dans les rues, un seul émerge à l'usine : celui de François Ruffin, le journaliste de 41 ans, rédacteur en chef du journal satirique engagé Fakir et césarisé cette année pour son documentaire Merci patron ! sur Bernard Arnault. "Nous, on a l'occasion de voir monsieur Ruffin régulièrement", confirme l'un des ouvriers devant l'usine.
François Ruffin, soutenu par la France insoumise, se présente sous l'étiquette "La Picardie debout", dans la première circonscription. C'est là où vivent de nombreux salariés de Whirlpool. La lutte pour la sauvegarde du site a été l'un de ses chevaux de bataille. "Depuis 18 ans, je rencontre les ouvriers de chez Whirlpool, de chez Goodyear, de chez Abelia, de chez Parisot-Siège de France, explique le journaliste. Chez Whirlpool, les salariés ont accepté le gel de leurs salaires et les suppressions de RTT et, en face, on a des actionnaires qui, eux, dans le même temps où on fermait l'usine d'Amiens, ont augmenté leurs dividendes de 10%. Et la leçon que semble en tirer Emmanuel Macron, c'est que le problème de l'emploi, c'est du côté des salariés."
Je ne vais pas tout changer en étant à l'Assemblée nationale mais je serai un point d'appui pour une autre parole.
François Ruffin, candidat France insoumiseà franceinfo
Pour se qualifier, François Ruffin s'est engagé dans une intense campagne de terrain. Il compte aussi un peu sur les scores de Jean-Luc Mélenchon. Au premier tour de la présidentielle, le leader des Insoumis a recueilli entre 11 et 22% dans les communes de la circonscription et 24,87% à Amiens.
Le marcheur Nicolas Dumont promet "un rebond"
Nicolas Dumont, lui aussi, arpente le terrain. Candidat de La République en marche (LREM), il n'a rien d'un novice en politique. Maire d'Abbeville, il a pris ses distances avec le Parti socialiste en mars dernier. L'édile connaît bien les dossiers de la circonscription, à commencer par Whirlpool. Selon lui, un député ne doit pas être "simplement" dans "la revendication" mais dans l'action : "Même si on doit être à côté des salariés, c'est la proposition et le rebond, indique-t-il.
Le développement économique, ce n'est pas utiliser la misère ou la difficulté des gens, c'est, au contraire, être en capacité de tracer des pistes pour l'avenir.
Nicolas Dumont, candidat LREMà franceinfo
Nicolas Dumont rappelle qu'il a eu "beaucoup de difficultés industrielles" à Abbeville, notamment la sucrerie qui a fermé en 2007 et qui, aujourd'hui, bénéficie d'un "nouveau projet qui crée 450 emplois."
Lapersonne, candidat FN et atypique
En face de ces deux candidats, il y a le profil atypique du comédien Franck de Lapersonne. Ce dernier a endossé les couleurs de Marine Le Pen. La présidente du Front national est arrivée en tête dans presque toutes les communes de la première circonscription au premier tour de la présidentielle 2017, y compris à Abbeville et à Amiens. Plus connus pour ses participations à des émissions de télévisions des années 90 comme Palace, La Classe ou Sexy zap. Franck de Lapersonne est un candidat assez difficile à trouver. C'est finalement par téléphone, depuis Paris, qu'il accepte de revenir sur l'un des temps fort de la campagne de Marine Le Pen : son passage à l'usine Whirlpool d'Amiens, dans l'entre-deux-tours.
Je suis venu le lendemain de Marine pour leur dire qu'on ne les oubliait pas et qu'on continuait à travailler auprès d'eux. Si elle avait été présidente, cela aurait été simple. Elle aurait pu simplement fermer les frontières
Franck de Lapersonne, candidat FNà franceinfo
"C'est Marine qui a décidé de me donner la première circonscription de la Somme, raconte Franck de Lapersonne. Les Lapersonne sont des Picard depuis le XIIe siècle. Mon père était très attaché à Saint-Valery-sur-Somme [3e circonscription de la Somme]. On venait souvent en vacances ici."
LR et PS, les mêmes visages qu'il y a cinq ans
En campagne sur un tournoi de football junior au pied de la célèbre abbaye de Saint-Riquier, le candidat Les Républicains Stéphane Decayeux est à son aise. Finaliste malheureux en 2012, il espère troubler les plans du trio. "Qui mieux qu'un chef d'entreprise peut trouver des solutions pour l'emploi, entre nous ?, interroge-t-il. Je suis un peu en décalage par rapport à l'ensemble des candidats qui sont, aujourd'hui, mes adversaires." Son frère, Nicolas Decayeux, président du Medef de la Somme, s'est manifesté, mercredi dernier, pour reprendre 200 des 286 salariés de Whirlpool pour fabriquer des boîtes aux lettres.
Je sais parler le même langage que les chefs d'entreprise et les investisseurs. Je l'ai prouvé dans le passé sur un certain nombre de dossiers.
Stéphane Decayeux, candidat LRà franceinfo
Ancienne secrétaire d'État socialiste chargée du Droits des femmes puis des Personnes âgées et de l'Autonomie, Pascale Boistard est la candidate sortante. Élue députée en 2012, avec 60% des voix au second tour, elle a dû laisser son poste à son suppléant, Pascal Demarthe, lorsqu'elle est entrée au gouvernement en 2014. Ministre, elle n'a pas voulu abandonner le navire socialiste malgré le naufrage de la présidentielle : "Je revenais tous les week-ends ici. Donc, le contact est très bon parce qu'on me connaît."
J'ai des défauts certes, mais aussi des qualités comme la loyauté.
Pascale Boistard, candidate PSà franceinfo
Légèrement agacée quand on lui parle de Whirlpool, Pascale Boistard rappelle qu'il existe une autre usine, sur la circonscription cette fois, qui risque bien de s'inviter dans l'actualité. En mars dernier, un plan de départs volontaires est tombé comme un couperet chez le fabricant de pneus Dunlop. L'usine compte 850 emplois. Pascale Boistard a annoncé avoir déposé une plainte contre X, jeudi 8 juin, après que certaines de ses affiches de campagnes ont été déteriorées à l'acide.
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