Exclues du bouclier tarifaire énergétique, les banques alimentaires "pourraient ralentir" leurs "actions auprès des plus fragiles"
"Cette hausse attendue d'électricité, de gasoil, de gaz, va avoir un impact sur notre activité", s'inquiète ce dimanche 9 octobre sur franceinfo Laurence Champier, directrice générale de la Fédération française des banques alimentaires, qui ne bénéficie pas du bouclier tarifaire.
Tout comme les locataires des HLM, les banques alimentaires font parties des oubliés du bouclier tarifaire énergétique, mis en place par le gouvernement pour amortir les coûts liés à l'augmentation des prix de l'énergie. La directrice générale de la Fédération française des banques alimentaires, invitée de franceinfo ce dimanche 9 octobre, s'inquiète des conséquences pour les bénéficiaires.
francinfo : Quelles conséquences cela va avoir pour vous de ne pas bénéficier du bouclier tarifaire énergétique ?
Laurence Champier : Cela pourrait ralentir nos actions auprès des personnes les plus fragiles. Nous sommes le premier réseau d'aide alimentaire, c'est 125 000 mètres carrés d'entrepôt, 400 camions qui tous les jours vont chercher des denrées alimentaires, ce sont 7 000 bénévoles qui les trient, les stockent et les redistribuent aux associations sur le terrain. On accompagne 2,2 millions de personnes et cette hausse attendue d'électricité, de gasoil, de gaz, va avoir un impact sur notre activité.
Que représente l'énergie pour votre activité ?
Jusqu'à aujourd'hui c'était à peu près 10% du budget des banques alimentaires. Si on regarde sur le terrain, les chiffres qui remontent, cela peut aller de 20% à 70% pour le gasoil par exemple à la banque alimentaire de Bordeaux, sur une année.
Comment êtes-vous financés ?
Nous avons à la fois des subventions des collectivités, de l'Etat, des mécènes, le grand public au travers de sa générosité. Donc, c'est paradoxal aujourd'hui de ne pas être inclus dans ce bouclier tarifaire qui nous permettrait de continuer notre activité, mais aussi d'utiliser l'argent le plus efficacement possible. Le budget (autour de 50 millions d'euros) n'est pas extensible, il agrège toutes les banques alimentaires, il y en a 110 sur tout le territoire. En Charente-Maritime, une banque alimentaire va voir sa note d'électricité quadrupler d'ici janvier 2023 et il n'y a aucun moyen, aucune trésorerie pour y faire face.
Avez-vous alerté les pouvoirs publics ?
Oui, depuis plusieurs semaines, y compris les députés et les sénateurs sur l'envolée des prix. On alerte aussi sur le fait qu'il faut qu'on soit considérés comme une activité essentielle. C'est une demande que l'on fait pour éviter les coupures électriques cet hiver. Si les chambres froides ne fonctionnent plus c'est autant de denrées alimentaires qui ne pourront plus être distribuées aux personnes qui en ont besoin. Il ne faut pas oublier le monde associatif.
Avez-vous bon espoir ?
On espère parce que sinon on ne sait pas sur certains territoires comment on va pouvoir faire face aux augmentations en 2023. On ne voudrait pas arriver à une situation qui nous oblige à éteindre nos chambres froides, de ne plus pouvoir aller chercher et distribuer de denrées alimentaires. Au-delà de nos activités, ce sont nos 7 000 partenaires qui elles sont aussi touchés par ces augmentations. Toute la chaîne de solidarité qui va être concernée à l'entrée de l'hiver ce n'est pas un très bon signe.
Est-ce qu'il y a plus de demandes dans les banques alimentaires ?
On enregistre plus 9% de demandes depuis le début de l'année par rapport à la même période en 2021. Les citoyens doivent faire des choix aujourd'hui. Fin novembre, on va appeler à une collecte nationale alimentaire en magasin, mais on va avoir besoin aussi de dons pour assurer la continuité de notre service.
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