: Reportage "La filière est en transition" : la culture des tomates sous serre chauffée tente de s'adapter face à la crise énergétique
Y aura-t-il des tomates dès le mois de mars ? La culture sous serre chauffée, grosse consomatrice de gaz, a-t-elle encore un avenir ? En Bretagne, de nombreux maraîchers se sont mis à cultiver des tomates sous serre chauffée ces dernières années. Plantés à Noël, les premiers fruits arrivent sur les étals début mars, et ils arriveront cette année 2023 encore grâce à des économies drastiques ou grâce à des innovations.
Un chauffage crucial pour les trois hectares de tomates de Dominique Picard. La température de la serre doit être de 16 à 17 °C en moyenne et jamais en dessous de 12 °C . Chaque kilowattheure gagné est donc vital.
"Par le passé, on tablait toujours autour de 30% des charges au niveau des coûts de chauffage. Aujourd'hui, on peut arriver autour de 50, 60 ou 70%."
Dominique Picard, agriculteurà franceinfo
La chaudière à cogénération est la première source d'économies : "On brûle du gaz et on produit deux énergies qui sont l'électricité, revendue sur le réseau, et de la chaleur qui va servir à chauffer les serres", explique l'agriculteur. "On récupère le CO2 et on le réinjecte dans la serre pour améliorer la photosynthèse. Si on n'apporte pas de CO2, le rendement de la photosynthèse prend une claque." La serre est protégée la nuit par d'immenses toiles qui permettent de conserver la chaleur du jour. "L'écran thermique nous permet aujourd'hui de faire des économies de l'ordre de 43-45% par rapport à une serre qui n'en serait pas équipée", souligne Dominique Picard. La serre est aussi alimentée par des panneaux solaires, tandis que l'eau de pluie fournit la moitié de l'arrosage nécessaire.
"La filière est en transition"
Si tous ces dispositifs ont permis jusque-là de continuer à produire des tomates à un coût raisonnable, les producteurs souhaiteraient ne plus dépendre des cours du gaz. Charlène Richard-Breyne, la responsable du pôle énergie du Groupement de producteurs Prince de Bretagne, assure que "la filière est déjà en transition". Selon elle, 10 à 15% des exploitations maraîchers Prince de Bretagne utilisent des énergies renouvelables.
"Certains récupèrent la chaleur d'un incinérateur de déchets sur le territoire. On est également sur des études géothermiques. Et puis, pourquoi pas l'hydrogène, à dix ans ?"
Charlène Richard-Breyne, responsable du pôle énergie du Groupement de producteurs Prince de Bretagneà franceinfo
Certains avaient même anticipé cette transition. Simon Le Coz est passé peu avant la crise de l'énergie sur un chauffage 100% bois pour ses trois hectares de tomates sous serre : "Je travaille avec du bois de recyclage. L'avantage, c'est que c'est plus stable. Je sais où je vais demain." Sa chaudière à coût constant implique quand même aussi quelques contraintes : "On est sur une installation qui est beaucoup plus complexe qu'une installation de chaufferie au gaz. On a des normes et des choses à respecter au niveau de l'environnement, notamment en termes de rejets."
L'ultime gisement d'économies serait de retarder la production de quelques semaines, mais avec l'inconvénient d'abandonner le marché à la concurrence étrangère.
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