Rachat d'Alstom : le droit de veto divise chefs d'entreprise et politiques
Un décret publié jeudi 15 mai oblige les entreprises à se soumettre à des engagements pour obtenir l'aval de l'Etat dans une offre de rachat. En plein dossier Alstom, les avis sont contrastés.
L'idée d'un droit de veto de l'Etat pour sauver les entreprises françaises est loin de faire l'unanimité. Un décret a été publié jeudi 15 mai au Journal officiel. Il oblige les investisseurs étrangers à respecter des engagements afin d'obtenir l'autorisation de l'Etat pour formuler une offre de rachat, comme dans le dossier Alstom.
Francetv info fait le point sur les réactions suscitées par ce décret.
Les chefs d'entreprise divisés
"Ce décret est une mauvaise réponse à une vraie question : celle de l'attractivité de notre pays", a déclaré Pierre Gattaz, le président du Medef. "En effet, notre économie se porte mal et les derniers chiffres le montrent, a-t-il ajouté. Mais ce décret est une réponse tactique à un problème stratégique : comment faire pour développer des champions français et européens qui peuvent partir à la conquête du monde ?"
Autre son de cloche du côté du Club des entrepreneurs, qui se montre favorable à cette initiative. "Nous saluons cette initiative gouvernementale en ce qu’elle tente de placer la compétitivité de nos entreprises stratégiques au cœur de la politique économique française, ce qui jusque-là, était une lacune grave de notre stratégie économique, a déclaré dans un communiqué Guillaume Cairou, président du Club des entrepreneurs. Ce décret constitue la pierre angulaire utile d’un arsenal offensif qui doit être déployé par le gouvernement pour renforcer et développer des leaders mondiaux français."
L'UMP inquiète
"C'est une nouvelle foucade d'Arnaud Montebourg dont le bilan au gouvernement est absolument désastreux", a affirmé Jean-François Copé, le patron de l'UMP. "Cette mesure, qui vient en droite ligne de la philosophie qui est la sienne, dirigisme, interventionnisme, négation de la réalité économique, va évidemment continuer de dissuader les investisseurs étrangers d'investir en France", a-t-il détaillé, alors que se "multiplient les délocalisations" et "les sinistres industriels".
De son côté, Valérie Pécresse est plus nuancée. La députée UMP trouve "tout à fait légitime que l'Etat cherche à protéger les intérêts stratégiques français", mais elle demande au gouvernement d'être attentif pour ne pas faire fuir les investisseurs étrangers.
Le FN outré
Marine Le Pen conteste la notion de "patriotisme économique" avancée par Arnaud Montebourg. "Le patriotisme économique, ce n'est pas d'écarter l'achat d'Alstom par les Américains pour vendre Alstom aux Allemands, tance la présidente du FN. Ça, c'est le dépeçage d'entreprises stratégiques françaises et l'abandon de toute démarche de patriotisme économique."
Elle souligne aussi au passage la proximité des élections : "Ça arrive une semaine avant les élections européennes, donc je pense qu'on est en plein enfumage électoraliste."
L'Europe prudente
Bruxelles a mis en garde la France contre le protectionnisme économique. "L'objectif de protéger les intérêts essentiels stratégiques dans chaque Etat membre est essentiel dès qu'il s'agit de sécurité ou d'ordre public. C'est clairement prévu dans le traité. Mais nous devons vérifier si [cet objectif] est appliqué de manière proportionnée, sinon cela reviendrait à du protectionnisme", a déclaré Michel Barnier, commissaire européen en charge du Marché intérieur.
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