Alstom : trois questions autour du nouveau droit de veto de l'Etat
Un décret publié jeudi 15 mai dans le "Journal officiel" étend un dispositif de 2005 aux entreprises stratégiques de l'énergie et des transports pour permettre à l'Etat d'"avoir son mot à dire" dans le dossier Alstom.
En plein dossier Alstom, la France se dote d'un droit de veto pour protéger ses entreprises dans les secteurs de l'énergie et des transports, d'après un décret publié au Journal officiel, jeudi 15 mai. Désormais, les investisseurs étrangers devront respecter certains engagements afin d'obtenir une autorisation de l'Etat pour formuler une offre de rachat.
Le décret doit entrer en vigueur vendredi. Il a été examiné en procédure d'urgence au Conseil d'Etat, ce qui a pris une dizaine de jours. Francetv info se pose trois questions autour de ce nouveau droit de veto.
Quel est l'objectif de ce décret ?
"Nous pouvons désormais bloquer des cessions, exiger des contreparties", assure le ministre de l'Economie, Arnaud Montebourg, dans un entretien à paraître dans Le Monde. "Ce pouvoir d'autorisation nous protège contre des formes indésirables de dépeçage et des risques de disparition", ajoute-t-il, évoquant le choix du "patriotisme économique".
Pour obtenir une autorisation de l'Etat, les investisseurs étrangers pourront notamment être contraints de revendre certaines activités sensibles à une société indépendante. Depuis un décret de 2005, le dispositif existait déjà dans onze autres secteurs, comme la défense nationale, l'armement, les technologies de l'information ou les jeux d'argent. Il est étendu à l'énergie et aux transports.
Quels changements dans le dossier Alstom ?
L'adoption du nouveau décret a été accélérée par le rachat programmé d'une partie des activités d'Alstom, selon Le Monde. Alors que l'Américain General Electric convoite la branche énergie du groupe français, l'Etat endosse le rôle d'arbitre dans ce dossier. Le décret "va nous permettre d'avoir un dialogue et une négociation plus sereine avec les compétiteurs, que ce soit General Electric ou Siemens, puisqu'il s'applique à tous les investisseurs étrangers quelle que soit leur nationalité", précise-t-on à Bercy.
"A partir de demain, on rentre dans une phase de négociation active, ajoute un proche d'Arnaud Montebourg. Il faut discuter avec nous, il n'y a pas d'autre choix." Le feu vert de l'Etat doit intervenir "avant la conclusion définitive" d'un accord de reprise, indépendamment du calendrier fixé par Alstom.
Reste à savoir quelle sera la position finale de l'exécutif dans le dossier Alstom. Si Arnaud Montebourg privilégie clairement un rapprochement avec l'Allemand Siemens, la ministre de l'Ecologie, Ségolène Royal, a créé la polémique en évoquant sa préférence pour l'offre de General Electric.
Quelles sont les réactions ?
"Nous avons pris note du décret du gouvernement français publié ce matin, a indiqué General Electric à l'AFP. Nous reconnaissons l'importance du secteur de l'énergie pour la France, et nous poursuivrons nos discussions constructives avec le gouvernement."
L'Etat "doit avoir son mot à dire" concernant les investissements étrangers "quand des secteurs stratégiques sont en jeu", a expliqué pour sa part Matignon. L'entourage du Premier ministre, Manuel Valls, fait aussi valoir que ce type de dispositif existe dans d'autres pays comme l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie ou les Etats-Unis. Le ministre des Finances, Michel Sapin, ajoute qu'il s'agit de "dialogue avec les grandes entreprises internationales", et non pas d'interdiction.
Du côté des chefs d'entreprise et de la classe politique, les réactions sont contrastées.
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