"Panama Papers" : comment réagissent les gouvernements ?
Le Royaume-Uni ou les Pays-Bas veulent en savoir plus sur ces révélations avant de se prononcer. La France et l'Allemagne veulent des suites judiciaires à ce scandale. Le Kremlin dénonce, lui, "des spéculations".
Les révélations des "Panama Papers" ont provoqué une onde de choc mondiale, lundi 4 avril. De nombreuses personnalités, mais aussi des dirigeants d'Etat, sont mises en cause pour avoir établi des stratégies d'évasion fiscale et de blanchiment d'argent. Plusieurs gouvernements ont réagi à ces annonces. Certains se réjouissent de ces révélations, d'autres demandent à en savoir plus. Enfin, d'autres enfin crient à la manipulation.
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Ceux qui veulent en savoir plus
Au Royaume-Uni, c'est avec une certaine circonspection qu'ont été accueillies les révélations des "Panama Papers". Il faut dire que, parmi les noms de bénéficiaires de mécanismes d'évasion fiscale cités dans la presse britannique, figurent celui du père (aujourd'hui décédé) du Premier ministre David Cameron, ainsi que ceux de plusieurs membres, anciens élus et donateurs du Parti conservateur, actuellement au pouvoir.
Cela n'a pas empêché l'équivalent du fisc britannique de demander au Consortium international des journalistes d'investigation, qui a révélé le scandale, de partager ses données avec lui. "Nous étudierons attentivement ces données et nous agirons rapidement et de manière appropriée", assure la directrice générale de la conformité du fisc et des douanes britanniques.
Les Pays-Bas ont également officiellement annoncé qu'ils allaient mener l'enquête pour savoir si de riches Néerlandais sont bien concernés par des affaires d'évasions fiscales, comme le présentent les documents révélés dans cette affaire. Ces derniers mettent également en cause plusieurs sociétés néerlandaises qui auraient joué le rôle de "cheville ouvrière" dans le placement de sommes liées au scandale de corruption à la Fifa, l'instance mondiale du football, selon le journal néelandais Trouw.
La Suède a, elle, demandé des comptes à un autre pays, en l'occurrence le Luxembourg. Le régulateur financier suédois a annoncé avoir contacté son homologue luxembourgeois au sujet des révélations sur la première banque scandinave, Nordea, qui aurait facilité l'évasion fiscale de ses clients, via une filiale installée au Luxembourg. "D'une part pour voir s'ils étaient déjà au courant, d'autre part pour voir quels renseignements nous devons récolter pour donner suite", a indiqué un responsable suédois.
Ceux qui veulent aller plus loin
La France. C'est avec un esprit offensif que François Hollande a réagi aux révélations des "Panama Papers". "Toutes les informations qui seront livrées donneront lieu à des enquêtes des services fiscaux et à des procédures judiciaires", a déclaré lundi le chef de l'Etat. Le président français a également remercié les "lanceurs d'alerte et la presse" pour ces révélations qui vont, selon lui, permettre de nouvelles "rentrées fiscales".
Alors qu'un millier de Français seraient impliqués dans ce scandale, le ministère des Finances a par ailleurs confirmé que Paris solliciterait la transmission des fichiers "Panama Papers", dans le but de "redresser les impôts éludés et d'appliquer les pénalités, et notamment pour la détention de comptes non déclarés à l'étranger ou de sociétés écrans permettant d'échapper à l'impôt qui serait normalement dû à la France". La justice pénale pourra, par ailleurs, être "saisie d'affaires de blanchiment de fraude fiscale", ajoute Bercy.
En Espagne. A Madrid, le fisc s'est lui aussi mis sur les rangs, selon El Pais, se penchant notamment sur les cas du footballeur Lionel Messi ou de Pilar de Borbon, la sœur de l'ancien roi d'Espagne Juan Carlos.
En Australie, selon new.com.au, des enquêtes ont immédiatement été lancées contre plus de 800 riches contribuables australiens qui apparaissent dans les documents de la firme panaméenne Mossack Fonseca.
En Nouvelle-Zélande, le gouvernement a appelé tout contribuable susceptible d'avoir été impliquée dans des arrangements d'évasion fiscale à se présenter volontairement pour éviter d'avoir à répondre ultérieurement de faits sanctionnés par des peines plus sévères.
L'Allemagne veut également que ce scandale donne un coup de collier à la lutte contre le blanchiment d'argent et la fraude fiscale. "Nous pouvons tout à fait mettre à profit cette dynamique, et exprimer l'espoir que de fortes restrictions seront posées [à certaines pratiques]", même si elles ne disparaîtront pas "en claquant des doigts", a déclaré le porte-parole de Wolfgang Schäuble, le ministre des Finances.
Ce dernier a beaucoup œuvré ces dernières années, aux côtés d'autres Européens, pour davantage de coordination internationale dans la lutte contre l'évasion fiscale et le blanchiment d'argent, par exemple par le biais de l'échange automatique d'informations des administrations fiscales. Selon son ministère, les réunions de printemps du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale, la semaine prochaine à Washington, seront une première occasion de remettre le sujet sur le tapis.
Ceux qui ne voient pas où est le problème
En Russie, en revanche, ces révélations ne devraient pas provoquer de grands chambardements judiciaires. Le Kremlin a en effet balayé les accusations liées aux "Panama Papers". Il faut dire que, d'après Moscou, la principale cible de cette enquête journalistique pleine d'"inventions" et de "falsifications" n'est autre que le président russe Vladimir Poutine, dont certains proches seraient impliqués dans un détournement de quelque 2 milliards de dollars.
"Il n'y a rien de concret ou de nouveau sur Poutine, il n'y a pas de détails, et tout le reste se fonde sur des spéculations", a estimé le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, en ajoutant que Moscou n'avait pas l'intention de poursuivre en justice les auteurs de l'enquête. Il a conclu qu'il est "évident que le niveau de poutinophobie a atteint un tel niveau qu'il est impossible de dire quoique ce soit de positif à propos de la Russie."
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