: Témoignages "J'ai décidé de vendre" : face à des travaux trop importants, ces propriétaires de "passoires énergétiques" préfèrent s'en séparer
Les annonces devaient disparaître des agences immobilières et des sites internet. À partir du 1er janvier 2025, les logements considérés comme des passoires thermiques, c'est-à-dire affichant un diagnostic de performance énergétique (DPE) classé G, ne peuvent plus être mis en location. Cela concerne près de 600 000 maisons et appartements mal isolés en France.
Qu'on se rassure : les locataires actuels ne seront pas mis à la porte... même s'il y a un flou juridique. Mais pour les logements classés G inoccupés, les propriétaires doivent engager des travaux, pour améliorer le DPE avant la remise en location.
G+, G, F, E...
Adoptée en 2021, la loi Climat et résilience prévoit de considérer progressivement comme indécents les logements à la performance énergétique médiocre. Ce sont d'abord les logements classés G+ au diagnostic de performance énergétique (DPE) qui ont été jugés indécents en 2023. C'est désormais au tour des classes G à partir du 1er janvier, avant les logements F en 2028, puis E en 2034. La loi oblige les propriétaires à fournir au locataire un logement décent.
Si ce n'est pas le cas, ce dernier peut réclamer des travaux au propriétaire, saisir un juge si nécessaire pour faire plier le bailleur, obtenir une réduction de loyer ou la suspension de son paiement en attendant les travaux. Or, face à ces travaux souvent très coûteux, ils sont nombreux à préférer attendre, voire à vendre leur bien.
"Je n'aurais aucun mal à trouver un locataire, mais c'est interdit"
Comme ici, à Paris, où Audry, retraité de 68 ans, s'y est résolu : il met en vente son appartement situé tout près de Nation. "Ce n'est pas juste une petite hausse d'impôt, c'est du lourd", souffle-t-il. Sa dernière locataire vient de quitter ce deux-pièces, petit, mais joli et bien organisé, décrit-il : "On a une petite chambre qui donne sur une petite cour. C'est très calme. C'est un appartement qui a été entièrement rénové en 2021. Je n'aurais aucun mal à trouver un locataire, mais c'est interdit. Donc voilà, c'est pour ça que j'ai décidé de vendre."
Ce propriétaire pourrait le rénover pour améliorer le DPE, mais les travaux sont trop importants à ses yeux. "On a des murs qui donnent sur l'extérieur. Alors, si je voulais monter de catégorie, il faudrait que ce mur-là soit doublé, celui-ci également. Pratiquement tous mes murs... C'est très lourd. Et pour des motivations que je ne partage pas, parce que les rénovations énergétiques, il faut le faire, mais il ne faut pas y aller à la hache comme ça", regrette-t-il.
"Il y a tellement d'étudiants ou de jeunes salariés qui se mordent les doigts de ne pas pouvoir trouver un petit logement à Paris. Humainement, c'est quand même grave. On a tort de faire ça"
Audry, un propriétaire parisienà franceinfo
Pour Sylvie, propriétaire avec son mari d'un studio classé G en plein cœur de Paris, la liste des travaux nécessaires est encore plus longue et coûteuse.
"C'est un bien qui va être vide !"
Alors, cette habitante du sud de la France se sent coincée. "Je ne vais pas pouvoir le louer. Je ne veux pas le vendre. Voilà, c'est un bien qui va être vide la plupart du temps !", dénonce-t-elle. À 59 ans, elle s'inquiète pour ses finances : "Ce petit bien, c'était pour notre future retraite. En sachant que nous avons toujours un prêt sur ce bien de 1 159 euros par mois. Moi, à la retraite, je vais avoir 1 400 euros. En plus, si on ne le loue pas, on va payer la taxe des logements non occupés. On est puni dans tous les sens du terme. Donc, je préfère ne pas s'y penser pour l'instant".
Mais Sylvie l'avoue : elle a encore un peu d'espoir. "Ce matin, j'étais encore sur internet en train de chercher passoires énergétiques, actualités DPE, nouveau gouvernement... parce que je me dis que ça va bouger. Il y a des choses qui vont changer, ce n'est pas possible", espère-t-elle. Sylvie compte en effet sur le nouveau gouvernement pour revoir les règles du DPE.
Une proposition de loi visant à clarifier le texte et à adapter le calendrier aux contraintes des copropriétés avait été présentée fin octobre à l'Assemblée nationale, mais son examen est bloqué depuis la censure du gouvernement Barnier.
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