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"Pas d'évier, pas de douche, juste des toilettes sèches" : la vie précaire de Katell dans un mobile home

Katell Le Corre, 34 ans, vit depuis trois ans dans une habitation qu'elle pensait provisoire. Elle fait partie des 3,8 millions de personnes mal-logées en France.

Article rédigé par Anne Brigaudeau
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
La famille Le Corre vit dans ce mobil-home abrité dans un hangar (photo prise le 27 janvier 2016) (KATELL LE CORRE)

Quatre cents pages accusatrices. La Fondation Abbé Pierre remet, jeudi 28 janvier, son 21e rapport annuel. Désormais, la France compte près de 4 millions de personnes, qui vivent sans le minimum de confort, avec des effets souvent délétères sur la santé.

Parmi celles-ci, Katell Le Corre. Cette jeune femme de 34 ans habite depuis trois ans dans un mobile home, en Loire-Atlantique, avec son compagnon Alexandre, 36 ans, et sa fille de 2 ans et demi. Elle a répondu à notre appel à témoignages sur les logements insalubres et a raconté à francetv info l'engrenage infernal dans lequel elle est prise.

Un terrain mais pas d'argent pour construire une maison

"J'ai rencontré mon conjoint, se souvient-elle, alors que je venais de signer un compromis de vente sur un terrain en Loire-Atlantique, entre Nantes et La Roche-sur-Yon". Elle a investi les 70 000 euros qu'elle a reçus en héritage, à la mort de ses parents, dans ce terrain. Le mobile home était une solution provisoire, avant la construction, qu'elle pensait rapide, de sa maison.

La vie en a décidé autrement : "Deux semaines après notre arrivée, poursuit-elle, j'ai appris que j'étais enceinte. A plus de trente ans, cela faisait des années que je désirais un enfant. En vain." Elle doit abandonner ses recherches d'emploi. Il reste juste assez d'argent au couple pour construire un hangar (qui abrite désormais le mobile home). "Mon conjoint, chauffeur-routier, ne gagne pas assez pour un crédit immobilier. Du coup, nous n'avons jamais pu transformer le hangar en maison", déplore Katell.

"Pour l'eau, j'ai juste un tuyau d'arrosage"

Le précaire s'éternise et le camping se mue en mode de vie subi, avec ses conséquences pernicieuses. "J'ai beaucoup d'affaires qui moisissent à cause des infiltrations d'eau, énumère la jeune femme. L'étanchéité n'a pas été faite. Nous avons l'électricité parce qu'ERDF a accepté de prolonger pour un an le raccordement au réseau. Mais pour l'eau, j'ai juste un raccordement à l'extérieur avec un tuyau d'arrosage. Pas de raccordement intérieur. Pas d'évier, pas de douche, juste des toilettes sèches."

"On a récupéré une petite caravane qui nous sert de cuisine, à l'extérieur, avec une plaque de gaz et un micro-ondes. Car ce n'est pas possible de faire la cuisine dans le mobil-home : trop vieux, il risquerait de prendre feu", explique-t-elle encore.

Coups de blues à répétition

Avec l'humidité ambiante et les allers-retours dans la caravane extérieure qui leur sert de cuisine, Katell a désormais "une bronchite chronique". Cette fille d'enseignante a dû laisser chez son frère, pour qu'il ne s'abîme pas, le mobilier de sa vie d'avant : un sèche-linge, une machine à laver et une cuisine. Un souvenir qui lui brise le cœur : "Ça fait drôle de ne plus avoir de maison, de ne plus avoir accès à ses meubles, depuis trois ans qu'on vit dans ce fichu mobile home."

Ce logement précaire lui mine le moral. Elle avoue avoir vécu "plusieurs périodes de grosse dépression" et nombre de coups de blues, mais elle tient pour et grâce à sa fille. Son compagnon, lui, multiplie les états grippaux et se dit en état de fatigue chronique : difficile de se reposer dans un tel environnement. 

Un prêt via une plateforme de financement participatif ?

Fin 2015, pour ne rien arranger, Alexandre a perdu son emploi. Katell Le Corre ne sait plus vers qui se tourner. "Pour les aides, on ne rentre dans aucune case, dit-elle. Si je veux poursuivre la construction de la maison, je n'ai aucun droit au prêt à taux zéro. Je ne suis pas considérée comme primo-accédant parce que j'ai hérité avec mon frère d'une maison de mes parents, qui a été vendue pour le partage."

Elle qui n'a pu mener à bien, à cause d'un pépin de santé, un BTS après un bac scientifique rêve désormais d'un métier artisanal : "Peut-être la boucherie". Un métier qu'elle pourrait exercer une fois sa fille rentrée en maternelle. Katell caresse aussi l'ultime espoir de trouver, via une plateforme participative, un prêt pour pouvoir construire sa maison. Car, elle en est sûre, "à partir du moment où il y a la maison, tout se débloquera".

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