Réforme des retraites : l'Assemblée nationale examinera la motion référendaire du RN plutôt que celle de la Nupes, qui crie au scandale
"Scandaleux", "la honte", "inacceptable"... Les mots ne manquent pas, dans les rangs de la Nupes, pour qualifier la décision actée lors de la conférence des présidents de l'Assemblée nationale, mardi 31 janvier. Cet organe réunit notamment les présidents de groupes, ceux des commissions permanentes, mais aussi les vice-présidents de l'Assemblée. Il a validé mardi, au terme d'un processus inédit, l'examen de la motion référendaire du Rassemblement national contre le projet de réforme des retraites. Mais pas le texte de la Nupes.
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Une motion référendaire vise à suspendre le parcours législatif d'un texte de loi, pour le soumettre à un référendum. Une seule proposition de ce type peut être examinée à l'ouverture des débats dans l'hémicycle. Et c'est donc celle déposée par le parti de Marine Le Pen qui a été retenue, après un tirage au sort. Sur la base de cette motion référendaire du RN, les députés voteront lundi 6 février pour savoir s'il faut suspendre l'examen du projet de loi sur les retraites.
La motion de la Nupes déposée avant celle du RN
Ce long processus a pourtant bien débuté du côté gauche de l'opposition. La Nupes a déposé sa motion en premier, lundi 23 janvier, via le groupe PCF, auquel se sont joints près d'une centaine de députés de la coalition de gauche. "Un référendum relève d'une véritable obligation démocratique", ont-ils justifié dans l'exposé des motifs.
Le RN a, de son côté, déposé une motion le lendemain. De quoi irriter le patron des députés communistes. Dans un courrier daté du 26 janvier et adressé à la présidente de l'Assemblée nationale, André Chassaigne a défendu bec et ongles sa motion. "Dans la table analytique du règlement [de l'Assemblée], page 224, il est explicitement indiqué qu''une seule motion peut être déposée'. Cela lève donc le doute sur l'application de notre règlement à ce cas d'espèce : la motion déposée par les 98 députés le lundi 23 janvier fait obstacle au dépôt d'une autre motion à une date ultérieure", a-t-il assuré dans la missive, relayée sur Twitter par son collègue Fabien Roussel.
"Un choix politique inacceptable"
Mais la gauche n'a pas obtenu gain de cause. Mardi matin, face à un cas de figure inédit, les participants à la conférence des présidents ont d'abord voté pour décider si plusieurs motions référendaires pouvaient être déposées. Ils y ont répondu favorablement. Ils ont ensuite voté sur la façon de départager ces motions, et ont opté pour le tirage au sort. "Il n'y avait pas de précédent en la matière, c'est-à-dire le dépôt de deux motions, et le règlement ne précisait pas comment les départager", a justifié l'entourage de la présidente de l'Assemblée, Yaël Braun-Pivet, auprès de franceinfo.
C'est donc celle du RN qui a été tirée au sort, provoquant un tollé dans les rangs des députés de la coalition de gauche. "Yaël Braun-Pivet et la macronie changent les règles de l'Assemblée pour offrir sur un plateau la motion référendaire au RN", a immédiatement dénoncé Mathilde Panot, cheffe de file de La France insoumise à l'Assemblée nationale.
André Chassaigne a dénoncé "un choix politique inacceptable", tandis que Fabien Roussel, ex-candidat PCF à la présidentielle, a évoqué une "honte" et assuré que l'on entrait "dans une crise profonde". "Les soutiens du gouvernement continuent à faire la courte échelle au RN", a de son côté lancé Cyrielle Chatelain, présidente du groupe écologiste au Palais-Bourbon.
"Nous contestons l'interprétation faite du règlement"
Sur Twitter, le député Boris Vallaud a, lui, accusé "la majorité relative" de "se jouer du règlement de l'Assemblée". Le patron du groupe socialiste a ensuite précisé auprès de franceinfo : "On ne votera pas la motion du RN, nous contestons l'interprétation faite du règlement. Nous nous désolons de voir que [cette] interprétation finit par être plus favorable au RN qu'aux députés qui ont déposé une motion en premier."
"Ce n'est pas une décision de la présidente de l'Assemblée nationale, mais bien de la conférence des présidents, contrairement à ce que certains racontent", a rétorqué l'entourage de Yaël Braun-Pivet auprès de franceinfo.
Interrogée par La Chaîne parlementaire, Marine Le Pen a, quant à elle, estimé que "les règles ont été appliquées". Elle a ajouté que la Nupes "peut s'agacer contre la chance, mais personne d'autre".
La gauche demande "l'annulation du tirage au sort"
La Nupes ne compte cependant pas s'arrêter là. Dans un courrier adressé à la présidente de l'Assemblée nationale, mardi 31 janvier dans l'après-midi, les quatre présidents de groupe de la gauche demandent "l'annulation du tirage au sort intervenu ce matin".
Le texte, consulté par franceinfo, reprend les arguments déjà développés par André Chassaigne le 26 janvier. "Dès lors que vous avez acté la semaine dernière, en conférence des présidents, le dépôt de la motion signée par 98 députés le lundi 23 janvier à 20h10, vous n'auriez pas dû accepter le dépôt postérieur de celle du groupe RN", écrivent-ils.
Ils contestent également "les modalités" du vote. Selon eux, le tirage au sort aurait dû être "pondéré en fonction du nombre des signataires", ce qui n'a pas été le cas. La réponse de Yaël Braun-Pivet n'est pas encore connue.
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