Réforme des retraites : après l'Assemblée, le gouvernement se prépare à une bataille juridique pour faire adopter certaines mesures
En plus d'avoir à affronter la rue et les oppositions au Parlement, le gouvernement anticipe une bataille juridique autour de la réforme des retraites. Car l'exécutif risque de tomber dans un piège en présentant sa réforme comme un rectificatif au budget de la Sécurité sociale. Techniquement, c'est bien pratique, cela permet de dégainer un 49-3 et d'en conserver un dans sa manche pour un autre texte. Sauf que, comme son nom l'indique, c'est un texte budgétaire. Plusieurs experts pointent le problème et plusieurs sources gouvernementales en ont parfaitement conscience. Le Conseil constitutionnel peut ainsi estimer qu'une ou deux mesures dites "sociales" n'ont rien à faire dans ce texte.
Dans le jargon, c'est ce qu'on appelle des "cavaliers sociaux", à commencer par le désormais fameux index sur l'emploi des seniors, mais aussi certaines mesures sur la pénibilité. Le verdict est attendu après l'adoption du texte au Parlement, soit après le 26 mars. Si des dispositions sont censurées, elles ne pourront pas s'appliquer. Le risque est clair : que cette réforme présentée comme équilibrée (financièrement) et juste (socialement) perde sérieusement de sa substance. La semaine dernière, Laurent Fabius, le président du Conseil constitutionnel, cité par le Canard Enchaîné, envoyait même une première alerte au gouvernement.
Un deuxième texte en préparation
Mais l'exécutif a déjà trouvé la parade : il est en train de préparer un deuxième texte. L'idée est d'utiliser une autre loi pour recaser les mesures qui risquent d'être retoquées par les Sages. Initialement, ce texte devait servir à réformer Pôle emploi. Élisabeth Borne, elle-même l'a reconnu à demi-mot lors de ses vœux à la presse lundi : si des propositions émergent lors des débats sur les retraites au Parlement, ce projet de loi pourrait aborder des sujets comme le maintien dans l'emploi des seniors, "voire au-delà comme la qualité de vie au travail".
Cette deuxième loi n'est toutefois prévue que pour le printemps : l'exécutif se rassure. Même en cas de censure du Conseil constitutionnel, l'économie générale de sa réforme ne serait pas remise en cause, ni son calendrier. On reste bien sur une entrée en vigueur du décalage progressif de l'âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans, à partir du 1er septembre prochain. Conclusion d'une source gouvernementale : "Il ne faut pas commencer à se faire peur".
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