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Mobilisation des "gilets jaunes" : un mort, 400 blessés, des incidents partout... Pourquoi les blocages du 17 novembre ont dégénéré

Un mort, des blessés, des interpellations ... Des dérapages se sont produits pendant la journée organisée samedi par les "gilets jaunes" contre la hausse du prix des carburants.

Article rédigé par franceinfo
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Des gens bloquent une rocade lors d'une manifestation de "gilets jaunes" contre la hausse des carburants, le 17 novembre 2018 à Bordeaux (Gironde). (NICOLAS TUCAT / AFP)

Les blocages des "gilets jaunes" contre la hausse du prix des carburants a tourné au drame, samedi 17 novembre. Une femme d'une cinquantaine d'années est morte à Pont-de-Beauvoisin (Savoie) après avoir été heurtée par une conductrice qui, selon ses premières déclarations, voulait emmener sa fille chez un médecin.

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Plusieurs autres incidents ont été recensés au cours de cette journée pour un bilan de 47 blessés dont trois grièvement. De quoi soulever de nombreuses critiques de la part des "gilets jaunes" ou de certains politiques qui estiment que le gouvernement a mal encadré ces manifestations

Parce que le dispositif policier était difficile à calibrer

Trente unités de force mobile, soit 2 500 policiers et gendarmes, étaient mobilisables en "renfort des effectifs normaux", a expliqué le ministère de l'Intérieur. Ces effectifs étaient-ils suffisants ? "Pour apprécier le nombre de policiers à déployer, encore faut-il que la manifestation soit déclarée, ainsi qu'un nombre potentiel de manifestants, pointe un policier rompu à ce genre de manifestations contacté par franceinfo. Or, seule une centaine d'actions avaient été déclarées dans les préfectures."

On ne peut pas estimer le nombre de manifestants uniquement en se basant sur les réseaux sociaux, en sachant que la mobilisation est largement passée par Facebook.

Un policier

à franceinfo

"Du coup, on mesure mal les besoins et on expose les forces de l'ordre à des dangers. Par endroits, on va se retrouver avec des gendarmes locaux qui ne servent à rien face à des milliers de personnes, précise cette source qui préfère rester anonyme. Il s'agit évidemment d'un maintien de l’ordre non seulement sous-dimensionné, mais risqué pour les collègues".

"Là où ça a été déclaré, on a pu diligenter des équipes sur place pour faire de la médiation et pour éviter de se trouver dans une situation de tension, surenchérit le secrétaire général police CFDT, Denis Jacob, sur franceinfo. Mais là où malheureusement, nous n'avons pas été prévenus en avance, c'est plus compliqué d'anticiper et d'éviter un drame comme celui de Pont-au-Beauvoisin". 

Parce que les pouvoirs publics manquaient d'interlocuteurs

C'était l'un des problèmes à résoudre pour le ministère de l'Intérieur. Trouver les représentants de ce mouvement pour pouvoir discuter et se coordonner avec eux. "Ce qui est difficile, c'est qu'on n'a pas une organisation syndicale – qui a l'habitude de faire une manifestation – qui l'organise", reconnaissait d'ailleurs en début de semaine Christophe Castaner. "On connaissait peu de responsables", confirme une source policière à franceinfo.

Selon une note du renseignement territorial (ex-RG) que s'est procurée RTL, les initiateurs du mouvement étaient inconnus au bataillon avant la fronde contre la hausse du prix des carburants. "Les premiers appels au blocage lancés sur Facebook le 10 octobre dernier" émanaient, selon la radio, de huit Franciliens, "cinq hommes et trois femmes, âgés de 27 à 35 ans (...). Il s'agit d'individus au profil plutôt neutre, ne révélant aucun engagement militant, et sans lien connu avec des groupes à risque", écrit RTL. Leur seul point commun était la passion des "rassemblements automobiles" qui les liait sur Facebook, bien avant l'opération "gilets jaunes". 

Parce que les manifestants n'étaient pas encadrés par des services d'ordre

Les manifestations classiques sont "déclarées avec un parcours à la préfecture", insiste le policier contacté par franceinfo. "Ce parcours peut faire l'objet d'une discussion entre organisateurs et préfecture avant d'être accepté", ajoute-t-il. La police peut réclamer un détour pour éviter un bâtiment en particulier qui pourrait susciter la colère de manifestants, le siège social d'une entreprise, par exemple.

Cette déclaration permet surtout de "sécuriser l'itinéraire", de surveiller les rues par lesquelles vont passer les manifestants et de détourner ou interdire la circulation dans certaines artères : "L'objectif est de ne pas plonger les gens dans la panique. Dans une manifestation, la voiture en panique ça n'arrive jamais ! La circulation est déviée.", affirme le fonctionnaire interrogé. Autre avantage des défilés avec des "services d'ordre organisés type CGT", précise le policier interrogé par franceinfo, "ces services d'ordre tentent d'éviter les infiltrations de personnes qui cherchent la casse, le vol ou la provocation."

Dans des manifestations et des blocages disséminés sur tout le territoire, comme ce samedi 17 novembre, les policiers vont chercher à "éviter les situations de conflit, de tension avec les automobilistes. Il faut laisser passer les véhicules pour éviter d'envenimer la situation. Là où il n'y a pas eu blocage, mais filtrage, il n'y a pas eu d'incident", conclut Denis Jacob.

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