"Ouvrir des horizons" : nouveau prix littéraire, le Goncourt des détenus lancé à la maison d'arrêt de Nancy
Cinq écrivains jurés du Prix Goncourt sont venus vendredi à la rencontre de la quarantaine de détenus de la Maison d'arrêt de Nancy-Maxeville qui se sont engagés à lire les 15 ouvrages en lice. Au total, 500 détenus de 31 établissements participent à cette opération.
Nouveau prix dans le paysage littéraire français, le Goncourt des détenus a été lancé vendredi 9 septembre 2022 à la maison d'arrêt de Nancy-Maxéville en présence d'une quarantaine de détenus et de cinq des jurés du plus prestigieux des prix littéraires. "Faire entrer le livre en détention, c'est ouvrir des horizons et faire le lien entre dedans et dehors", a souligné Charlotte Picquenard, directrice adjointe de l'établissement.
500 détenus vont lire les 15 ouvrages en lice
A Nancy-Maxéville, trente hommes et dix femmes vont lire les 15 ouvrages sélectionnés par le jury du prix Goncourt et débattront de leurs lectures tous les 15 jours. L'oeuvre lauréate sera désignée le 15 décembre.
Au total, quelque 500 détenus de 31 établissements pénitentiaires en France participent à cette initiative qui entend favoriser l’accès à la lecture des publics qui en sont souvent éloignés. Parmi eux, Olivier*, 53 ans, est "fier" de participer à ce jury: en prison depuis plus de cinq ans, "la lecture me permet de m'échapper de mes 9 m2", raconte ce détenu qui purge une peine de 20 ans.
Une façon aussi pour ces hommes et femmes d'être vus "autrement" par la population et de pouvoir "avoir une voix et donner notre avis", ajoute Olivier, qui attend avec impatience de lire les livres de Murielle Barbery et de Carole Fives.
Rencontre en prison avec les cinq écrivains jurés
Pendant près d'une heure, la quarantaine de détenus a pu discuter avec les cinq écrivains jurés du prix Goncourt venus pour l'occasion, leur demandant ce qui faisait un bon livre ou comment se lancer dans l'écriture.
Pour l'écrivain Pierre Assouline, ce prix est "une façon de montrer que la lecture, c'est pour tout le monde". "Ce n'est pas parce qu'on a commis un délit, un crime, qu'on doit être privé de la littérature", insiste l'académicien.
Et pour l'administration pénitentiaire, pas question d'arrêter les activités culturelles en prison après la polémique de la prison de Fresnes cet été: "Aucune consigne n'a été donnée en ce sens", a tenu à rappeler Thierry Donard, directeur-adjoint de l'administration pénitentiaire. Une vidéo diffusée fin août montrant une série d'épreuves ludiques, dont du karting, dans une cour de cet établissement pénitentiaire du Val-de-Marne avait suscité une très vive controverse puis le lancement d'une enquête administrative.
L'importance de la culture en détention
"Je ne veux pas qu'on pense que ce qui s'est passé à Fresnes a eu comme conséquence une suppression de l'activité culturelle, éducative et sportive en prison", a insisté M. Donard, pour qui la lecture est aussi un moyen "de prévention de la récidive". "Il est important que ces activités se poursuivent en prison", a-t-il ajouté, précisant que l'administration pénitentiaire y avait consacré un budget de 19,8 millions d'euros en 2021.
Joint par l'AFP, le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti a aussi salué le lancement de ce prix littéraire, évoquant l'importance de la culture "dans le monde carcéral" pour des détenus qui ont parfois "un niveau d'étude nettement inférieur à la moyenne de la population". "C'est donc essentiel de leur permettre d'acquérir une meilleure connaissance de la langue et de renforcer leurs savoirs", a plaidé le ministre.
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