"La confiance en soi des garçons finit par les mettre en danger" : la Sécurité routière cible les hommes, en majorité responsables des accidents mortels sur la route
Sur la route, huit morts sur dix sont des hommes, explique la Sécurité routière, qui lance une nouvelle campagne de prévention cette semaine.
"Soyez l'homme que vous voulez être, mais soyez un homme vivant", clame le slogan de la nouvelle campagne de la Sécurité routière lancée à partir de mercredi8 février. L'organisme axe cette campagne sur la mortalité des hommes, qui représentent 78% des personnes tuées en 2022 sur les routes selon le bilan de la Sécurité routière. La Sécurité routière fait le lien entre virilité et prise de risque au volant et incite à la prudence.
Sur la route, 8 morts sur 10 sont des hommes. Soyez l'homme que vous voulez être mais soyez un homme vivant #SécuritéRoutière pic.twitter.com/Ucevv2vENd
— Sécurité routière (@RoutePlusSure) February 6, 2023
"Et s'il fallait ajouter masculinité dans la liste des facteurs favorisant les accidents de la route ?", interroge la Sécurité routière. Pour justifier la question "moins provocante qu'il n'y paraît", l'organisme met en avant des chiffres du bilan 2021 de la Sécurité routière. Les hommes représentent 88% des jeunes conducteurs tués, 84% des présumés responsables d'accidents mortels, et 93% des conducteurs alcoolisés impliqués dans un accident.
"Agressifs" voire "un peu vulgaires"
Pour Adel, rencontré dans une station-service dans le sud de Paris, lundi 6 février, les disputes au volant sont quasi quotidiennes : "Pas plus tard que ce matin ! Il trainait devant moi, j'ai klaxonné. Il n'a pas aimé..."
Pour Elisabeth, retraitée, la conduite est de plus en plus pénible : "Ayant l'âge que j'ai, à savoir 66 ans, cela fait des années que je constate que les hommes au volant, même jeunes maintenant et conscients du problème, restent agressifs, voire un peu vulgaires." Léon, lui, avancent qu'hommes et femmes ont des "logiques différentes" : "En termes de réflexes, pour se faufiler... Peut-être qu'on est un peu plus vifs de temps en temps, alors que les femmes sont, elles, peut-être plus prudentes."
Fouad, patron d'une société de transport en Seine-Saint-Denis, constate tous les jours ces différences de comportements. "J'ai une quinzaine de chauffeurs, dont trois filles, explique-t-il. Et je n'ai jamais eu de problème avec les filles parce qu'au volant, elles sont plus concentrées ! Par exemple, une de mes conductrice travaille pour moi depuis quinze ans et j'ai seulement dû changer une fois un pare-choc."
"Mes chauffeurs, eux, ils font des accidents tous les jours : des accrochages, des excès de vitesse. 90% des infractions sont le fait des hommes ! Les femmes, si c'est limité à 50 km/h, elle vont rouler à 30 km/h."
Fouadà franceinfo
"Les chauffeurs vont prendre des sens interdits, jamais les femmes, termine Fouad. Pareil pour les limitations de hauteur : elles n'y vont pas, tandis que les hommes si, et ils finissent par casser. Malgré les panneaux, j'ai déjà eu carrément des camions décapotables !"
L'éducation des garçons se fait notamment autour de la voiture
"Que l'on ait 60 ans ou 18 ans, les stéréotypes sont les mêmes, indique de son côté Alain Mergier, sociologue et l'un des auteurs de l'étude qui a servi pour cette campagne. L'Éducation des garçons se fait, entre autres, autour de la voiture. Il a le sentiment très rapidement de savoir conduire, c'est à dire de bien maîtriser sa voiture."
"C'est un enjeu important pour les garçons d'être reconnus comme quelqu'un qui conduit bien. Cette confiance en soi, finalement, finit par les mettre en danger."
Alain Mergierà franceinfo
Pour la Sécurité routière, cette campagne est une piste de réflexion pour déconstruire ces stéréotypes dès le plus jeune âge à l'école, mais aussi peut être revoir l'apprentissage de la conduite dans les auto écoles.
La Sécurité routière pointe du doigt des comportements associés aux stéréotypes de genre comme la résistance à se faire doubler sur la route, ou la minimisation des effets de l'alcool sur la conduite. Ces stéréotypes "contribuent à perpétuer l'idée que l'homme, contrairement à la femme, aurait une forme d'aptitude naturelle à la conduite", favorisant les comportements à risque selon l'organisme. "Les statistiques rappellent qu'il n'en est rien", souligne la Sécurité routière qui insiste : "Il est urgent, dans le domaine de la conduite, de libérer les hommes des attentes sociales qui les incitent à associer virilité et prise de risque."
La nouvelle campagne passe par une courte vidéo composée d'images extraites d'un documentaire de Rémi Bezançon. Le réalisateur a filmé les premiers instants entre des pères et leurs fils en salle d'accouchement, un moyen selon la Sécurité routière de pousser les hommes à "résister à la pression sociale, quand la sécurité de tous est en jeu". "Tu n'as pas à suivre ce qu'attendent les gens d'un homme. Ecris l'homme que tu veux être", incite l'acteur Pio Marmaï, la voix de la campagne. La vidéo sera diffusée à partir de mercredi à la télévision, sur internet et dans les cinémas.
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