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Grève à la SNCF : Le gouvernement gagne "pour l'instant" la bataille de l'opinion, selon l'Ipsos

Le gouvernement est en train de gagner la bataille de l'image face aux cheminots, selon Brice Teinturier, directeur général d'Ipsos, invité de franceinfo dimanche. Il assure néanmoins que le gouvernement doit "nourrir sa communication". 

Article rédigé par franceinfo
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Brice Teinturier, le directeur général d'Ipsos France, le 4 octobre 2017. (VINCENT ISORE / MAXPPP)

Les cheminots et le gouvernement se sont lancés dans la bataille de l'image visant à rallier l'opinion publique alors que la deuxième phase de la grève à la SNCF a commencé dimanche 8 avril. Les cheminots mettent en avant la défense du service public et agitent le spectre de la privatisation de la SNCF. De l'autre, le gouvernement mobilise Nicolas Hulot pour apporter une justification environnementale à la réforme du rail en France. Le ministre de la Transition écologique a publié dimanche 8 avril une tribune dans laquelle il soutient une réforme qui est, selon lui, "nécessaire".

Brice Teinturier, directeur général d’Ipsos France, estime sur franceinfo, que le gouvernement gagne pour l'instant la bataille de l'image mais "doit impartialement nourrir sa communication" pour mieux expliquer sa réforme. Selon lui, la convergence des luttes syndicales est "assez improbable et pas du tout à l'ordre du jour".

Franceinfo : Pour l'instant, qui gagne la bataille de l'image ?

Brice Teinturier : Pour l'heure, les Français soutiennent la ligne gouvernementale. Ils considèrent que globalement la réforme de la SNCF est justifiée et que globalement les cheminots ont des avantages qui apparaissent malgré tout inconsidérés eu égard à d'autres catégories de la population. Le mouvement reçoit une assise minoritaire dans l'opinion. Mais malgré tout, ce qui me frappe, c'est que les points d'appui des uns et des autres sont fragiles. Pour les Français, il n'y a pas un lien évident entre la réforme de la SNCF et l'amélioration de la qualité du service qui est au cœur de leur préoccupation. C'est pour ça que la tribune de Nicolas Hulot - dans le Journal du dimanche - me paraît importante indépendamment du volet écologique.

Cette tribune peut-elle aider à la compréhension de la réforme ?

Nicolas Hulot dit des choses qui me paraissent importantes, comme par exemple que la question de la dette est une chose importante pour contribuer à avoir de nouveau des financements si on veut sauver le train et avoir une qualité de service meilleure. Donc, il met bien en relation cette question de la dette avec la qualité de service. Il rappelle également ce que le gouvernement est prêt à mettre sur la table en termes d'investissements. Ce sont ces arguments qui n'ont pas été jusqu'à maintenant assez développés. Les Français en ont une intuition générale. Ils ne suivent pas les grévistes à cause des désagréments que ce mouvement de grève procure mais également parce qu'ils ont le sentiment que ce système bloqué depuis des décennies doit être réformé. L'enjeu est de leur donner des éléments encore plus concrets sur ce que cette réforme va apporter (...) Le soutien reste majoritaire mais le gouvernement doit impérativement nourrir sa communication.

Les cheminots peuvent-ils compter sur le lien fort des Français avec l'entreprise publique ?

Les cheminots auraient tort de surestimer ce lien qui existe entre la SNCF et eux-mêmes d'une part, et les Français d'autre part. Les Français considèrent malgré tout qu'aujourd'hui, les cheminots exercent un travail dont la pénibilité ne justifie pas une grande partie des avantages auxquels ils ont droit en termes de retraite, d'utilisation gratuite de ces transports, mais aussi l'accès à des logements qui peuvent être facilités ou à la médecine, etc. L'écart est grandissant entre la perception du statut par des cheminots et la question de l'équité, eu égard à d'autres catégories de personnes. Oui, les Français aiment la SNCF et leurs cheminots, mais ce n'est pas une corde sur laquelle les cheminots peuvent tirer éternellement. S'ils donnent le sentiment de bloquer pour préserver malgré tout un statut essentiellement, ils perdront la bataille de l'opinion. C'est ce qui est en train de se produire aujourd'hui.

La solution ne serait-elle pas pour les cheminots de favoriser une convergence des luttes ?

Ils peuvent tenter d'agréger ces mécontentements qui ont des racines et des objectifs différents. Même s'il y a deux visions de la France qui s'affrontent, on peut aussi considérer que chacun de ces mouvements a vraiment ses spécificités et ses catégories. L'idée d'une coagulation, qu'il faudrait d'abord un chef d'orchestre, me paraît assez improbable et pas du tout à l'ordre du jour.

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