: Vidéo Grand Paris Express : un métro à travers champs suscite la controverse
Au sud-ouest de Paris, dans l’Essonne, le plateau de Saclay est l’un des rares poumons verts encore préservés près de la capitale. Mais dans quelques années, le métro 18 va traverser les champs pour desservir notamment les grandes universités françaises. Un projet qualifié d’intérêt national par l’Etat, qui a procédé à des acquisitions de terres agricoles.
Cristiana Modica cultive des champs de blé et légumineuses en bio depuis 26 ans à Villiers-le-Bâcle (Essonne). Elle a dû céder 14 hectares contre indemnisation, l’équivalent de 20 terrains de foot. "Le métro va passer dans les champs", se désole l'agricultrice. Le préjudice est bien plus que financier, il est environnemental, selon elle. "C’est d’une violence inouïe. C'est juste un massacre et une ineptie de bétonner le peu de terres qui sont restées aux portes de Paris", regrette-t-elle.
Pour défendre ses terres, l’agricultrice a accueilli une ZAD, une zone à défendre, sur ses champs. Le camp est sous haute surveillance. Il fait partie des 42 sites sensibles recensés par le ministère de l’Intérieur car "susceptible de se radicaliser", d’après les autorités qui ont posé un ultimatum. La ZAD doit être évacuée par ses occupants avant le lundi 5 juin.
"Voir le plateau de Saclay bétonné me fend le cœur"
Sabrina dort dans une petite cabane installée dans la ZAD, comme une vingtaine de militants qui vivent sur le camp depuis 2 ans. Et même s’ils sont amenés à quitter le site, ils entendent maintenir leur combat avec un message clair : "pas de béton sur les terres fertiles" d’Île-de-France. "Depuis une dizaine d’années, je vois le plateau se construire, être bétonné, ça me fend le cœur", s'attriste une militante. Quant à Sabrina, du collectif "contre la ligne 18", elle dénonce le tracé de ce métro : "La ligne ne dessert pas grand monde. Ce sont des villages qui sont là, de l’ordre de 2 000 habitants".
La société du Grand Paris réfute l’argument des écologistes et affirme et que le métro accueillera jusqu’à 118 000 voyageurs par jour. Au total, 190 000 emplois sont par ailleurs concernés par la ligne 18. Néanmoins, sur un tiers de la ligne, entre Saint-Aubin et Versailles, la fréquentation sera limitée. "Son utilité sociale immédiate paraît assez faible, les trafics attendus, même en 2030 restant limités à 1 000 à 2 000 voyageurs à l’heure de pointe du matin", selon la dernière enquête publique de 2021.
Certains villages n’en profiteront même pas. La ligne les traversera sans s’arrêter. C’est le cas de Villiers-le-Bâcle, une commune de 1 200 habitants. "Le problème, c'est qu’il n’y a pas de gare prévue juste en face du village. On a les inconvénients sans avoir les avantages", regrette un habitant. "Il passe juste derrière le village, on espère qu’on n'aura pas trop de bruit", s'alarme une autre habitante de Villiers-le-Bâcle.
"Le métro est un vrai plus pour pouvoir desservir le plateau de Saclay"
Malgré l’inquiétude de certains riverains, le projet est défendu par de nombreux élus, comme le maire de Palaiseau. Il y voit une formidable opportunité de relier les banlieues entre elles et de réduire le recours à la voiture.
"Est-ce qu’on veut que les gens qui viennent déjà travailler tous les jours ici, qui viennent étudier ici, et vivent ici, se déplacent en voiture et viennent créer des bouchons monstres dans tout le territoire ? Ou est-ce qu’on veut que ces gens puissent se déplacer en métro automatique, qui est une solution économique, sociale et environnementale ? Moi, je pense que le métro est un vrai plus pour pouvoir desservir ce plateau de Saclay", défend Grégoire de Lasteyrie, maire (Horizons) de Palaiseau (Essonne).
Contactée, la société du Grand Paris affirme que la ligne n’impactera que 22 hectares de terres agricoles. Les premiers métros, eux, devraient circuler en 2026.
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