Edward Snowden, "un cadeau inespéré pour le contre-espionnage russe"
Arrivé à Moscou, poursuivi par la justice américaine, l'homme qui a révélé la surveillance d'internet par le renseignement américain et demandé l'asile politique à l'Equateur semble avoir disparu. Analyse d'Alban Mikoczy, correspondant de France 2 à Moscou.
Edward Snowden a demandé l'asile politique à l'Equateur, mais nul ne sait où il se trouve. Parti de Hong Kong pour Moscou dimanche 23 juin, l'homme qui a révélé la surveillance d'internet par le renseignement américain ne serait pas sorti de l'aéroport international de la capitale russe. Washington a demandé à la Russie de l'extrader, mais aucune convention n'existe entre les deux pays. Peu de chance de voir cette demande aboutir donc. L'analyse d'Alban Mikoczy, correspondant de France 2 à Moscou.
Francetv info : Sait-on où est Edward Snowden ?
Alban Mikoczy : Une seule certitude, plusieurs témoignages attestent qu'il était dimanche sur le vol Hong Kong-Moscou d'Aéroflot, arrivé en fin d'après-midi. L'ambassadeur de la République d'Equateur s'est ensuite rendu en deux occasions dans les salons privés de la zone internationale de l'aéroport de Cheremetievo. En sortant, il n'a pas démenti avoir rencontré Edward Snowden, mais n'a pas voulu en dire davantage aux centaines de journalistes présents. Son ministre de tutelle, RicardoPatiño, a confirmé lundi matin lors d'un déplacement en Corée du Sud que l'Equateur "analysait avec esprit de responsabilité" la demande d'asile effectuée par l'informaticien américain.
Edward Snowden avait ensuite réservé un siège sur le vol Moscou-La Havane du 24 juin à 15h05 (heure de Moscou) mais cette fois, personne ne l'a vu. Et au siège qu'il était censé occuper, il y avait un autre passager qui figurait en liste d'attente. Donc Snowden est invisible pour le moment. Les pistes sont brouillées. Et c'est l'objectif de Moscou.
A quoi joue la Russie?
Les autorités américaines faisaient peser sur Hong Kong une pression diplomatique forte. Washington a demandé l'extradition de Snowden en vertu d'un accord réciproque, et cette extradition aurait fini par avoir lieu. Le gouvernement hongkongais a donc objecté quelques raisons techniques pour gagner du temps et affirme ensuite avoir été surpris par la fuite de Snowden. Le département américain de la Justice s'est dit "déçu de la décision particulièrement troublante" de HongKong.
En partant pour Moscou, Snowden savait que les autorités russes n'auraient pas d'hésitation. Elles n'accèderont pas à une quelconque demande américaine. D'abord, il n'y a pas d'accord entre les deux pays. Surtout, le Kremlin ne fera rien pour simplifier la tâche de l'administration Obama.
La venue, de sa propre volonté, d'Edward Snowden à Moscou est un cadeau inespéré pour le contre-espionnage russe. Tout porte à croire qu'en échange d'une protection juridique et sans doute physique, il a dû raconter au FSB, les services secrets russes, tout ce qu'il sait des programmes d'écoute américains. Selon un expert militaire russe à la retraite, Snowden a eu à Moscou une soirée bien remplie, une nuit sans sommeil pour satisfaire la curiosité de ses hôtes. Il est permis de penser qu'une des causes de son départ retardé est liée à l'appétit des services russes.
Officiellement, comment réagit Moscou à cette affaire ?
Intox, mensonges, fausses-pistes ; on se croirait revenu au temps de la guerre froide. La Russie veut éviter de donner à la CIA la moindre chance d'intervenir et de capturer Snowden. Les fausses informations généreusement distribuées compliquent la recherche. Et les Russes ne laisseront évidemment pas les Américains intervenir militairement dans cette affaire. Edward Snowden est donc en relative sécurité à Moscou.
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