"Un drôle de 14-Juillet" : comment le gouvernement en sursis se prépare à célébrer la fête nationale dans un contexte politique inédit après les législatives

Article rédigé par Margaux Duguet
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Emmanuel et Brigitte Macron lors du défilé militaire, le 14 juillet 2023 sur les Champs-Elysées, à Paris. (LUC NOBOUT / MAXPPP)
Les ministres vont assister dimanche au traditionnel défilé du 14-Juillet, depuis la tribune présidentielle, alors que tous les regards sont tournés vers la nouvelle Assemblée nationale, où les députés de tous bords négocient pour tenter de former un nouveau gouvernement.

"Ça aurait pu être pire. On aurait pu avoir Bardella assis à côté de Macron dans la tribune présidentielle", soupire un ancien conseiller du pouvoir. Faute de majorité absolue à l'Assemblée nationale et alors qu'aucun accord de coalition gouvernementale n'a été trouvé à cette heure, c'est bien le gouvernement de Gabriel Attal, toujours pas démissionnaire, qui sera aux côtés du président de la République pour les festivités du 14-Juillet, prévues dimanche. Outre le contexte politique inédit, le cadre sera moins grandiose que les années passées, puisque le traditionnel défilé militaire aura lieu avenue Foch et non sur les Champs-Elysées, réquisitionnés pour les Jeux olympiques de Paris.

Au programme de cette édition 2024 : "Les 80 ans des débarquements de Normandie et de Provence, et l'olympisme, à douze jours de la cérémonie d’ouverture des JOP 2024", précise le site du ministère des Armées. La flamme olympique fera à cette occasion "ses premiers pas dans la capitale". C'est bien ce sujet qu'aura en tête la ministre des Sports. Amélie Oudéa-Castéra "sera au défilé du 14-Juillet et sur l'étape parisienne du relais de la flamme, assure son entourage. Elle est concentrée sur le réglage des derniers paramètres de l'organisation des Jeux".

"Toujours ministre" et "fière d'avoir fait barrage" en se désistant

Patricia Mirallès, secrétaire d'Etat chargée des Anciens combattants et de la Mémoire, assure elle aussi être à cette heure "toujours ministre" et avoir repris ses dossiers, comme les commémorations des "80 ans du débarquement de Provence". L'ancienne députée, qui s'est désistée dans l'entre-deux tours, dans sa circonscription de l'Hérault pour faire barrage au Rassemblement national, assistera donc bien au défilé.

Au sein du gouvernement, elle n'est pas la seule à ne pas avoir été réélue. "Je suis fière d'avoir fait barrage aux RN dans ma circonscription et d'avoir pris mes responsabilités, confie Fadila Khattabi, la ministre déléguée chargée des Personnes handicapées. Je suis soulagée, aussi, de constater que le RN n'a pas la majorité. Pour moi, c'est l'essentiel". C'est dans cet état d'esprit "plutôt serein" que la ministre, nommée fin juillet 2023, participera à son premier défilé, depuis la tribune présidentielle.

"Trop nouvelle en politique pour en faire une maladie"

Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'Etat chargée de la Citoyenneté et de la Ville, qui s'est, elle aussi, désistée pour contrer l'extrême droite à Marseille, en vain cependant, répondra également présente. "J'ai le sens de la hiérarchie, c'est la fête nationale. On ne nous demande pas des états d'âme mais des états de service", livre-t-elle, tout en reconnaissant que "pour le gouvernement, mais aussi pour la France, ce sera un drôle de 14-Juillet pour tout le monde".

"Il y a pire comme situation que d'être ministre et d'être invitée au 14-Juillet. C'est la fête nationale, je tiens mon rang. Il faut tenir son rang."

Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'Etat chargée de la Citoyenneté et de la Ville

à franceinfo

La perte de son siège de députée ? "Je suis trop nouvelle en politique pour en faire une maladie et puis la vie est longue", balaye-t-elle. "Aucune" nostalgie non plus pour le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Stanislas Guerini, qui a été battu, à Paris, face à la candidate écologiste du Nouveau Front populaire. Lui aussi sera présent dans la tribune présidentielle : "C'est pour moi le sens le plus élémentaire des responsabilités." D'autres ministres n'ont, eux, pas été candidats aux législatives et savent qu'une page de leur vie politique se tourne également. C'est le cas de Bruno Le Maire, resté sept ans en poste à Bercy, et qui sera lui aussi de la partie pour le défilé. "Il fera son travail pour le pays jusqu'au bout', souligne son entourage.

L'incertitude planait pourtant, quelques jours avant les célébrations, sur la présence des membres du gouvernement à ce 14-Juillet. "Il est probable que j'y sois, si nous sommes toujours en fonction d'ici là", confiait, mercredi, le ministre délégué aux Comptes publics, Thomas Cazenave, réélu en Gironde. "Le 14-Juillet, c'est encore loin", souriait, le même jour, le ministre délégué chargé de l'Europe, Jean-Noël Barrot, réélu dans les Yvelines. Mais la plupart des membres du gouvernement seront bien présents aux côtés du chef de l'Etat, à l'exception du ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, qui sera à Angers. Ce proche d'Edouard Philippe doit y retrouver prochainement son fauteuil de maire. 

"On continuera tant qu'il faut le faire"

Tous savent qu'ils peuvent pourtant rester potentiellement longtemps encore en fonction au sein d'un gouvernement qui serait chargé uniquement de la gestion des affaires courantes. Mercredi, dans une lettre aux Français, le chef de l'Etat a demandé aux "forces républicaines" de "bâtir une majorité solide", tout en estimant qu'il faut "laisser un peu de temps aux forces politiques pour bâtir ces compromis avec sérénité et respect de chacun". Un appel immédiatement fustigé par une grande partie de la classe politique, et en particulier la gauche. Au gouvernement, on se fait donc peu d'illusions sur un dénouement rapide.

"Ça peut encore durer des mois, la situation politique n'est pas stabilisée. Et puis, Emmanuel Macron met déjà deux mois à constituer un gouvernement avec les siens, alors maintenant...", soutient un membre du gouvernement. "On continuera tant qu'il faut le faire, on attend", abonde un conseiller ministériel. En attendant, un siège de la tribune présidentielle, traditionnellement dévolu au quatrième personnage de l'Etat, restera vide : celui du président ou de la présidente de l'Assemblée nationale. Car les députés ne procéderont que le 18 juillet au vote de celui ou celle qui s'installera au perchoir.

Du côté des députés, la plupart d'entre eux devraient être dans leurs circonscriptions pour les festivités du 14-Juillet, à l'image de Geneviève Darrieussecq, ancienne ministre et députée réélue dans les Landes. "Restons tous modestes. Le plus important n'est pas la représentation du gouvernement en tribune mais le défilé, les hommes et femmes qui y participent et leurs unités mises à l'honneur, relativise-t-elle. Les Français aiment cet événement et c'est surtout le défilé qu'ils regardent !"

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.