Présidentielle 2022 : quatre questions sur la redevance télé, que certains candidats veulent supprimer
Emmanuel Macron a annoncé lundi son souhait de supprimer la contribution à l'audiovisuel public s'il était réélu président. Cet impôt finance les médias du service public, dont franceinfo.
Pour son premier déplacement comme candidat à l'élection présidentielle, lundi 7 mars, Emmanuel Macron s'est engagé à supprimer la redevance télé, lors d'une rencontre à Poissy (Yvelines).
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Emmanuel Macron a présenté cette mesure au milieu d'une série de propositions pour soutenir le pouvoir d'achat, comme le triplement du plafond de la "prime Macron", instaurée depuis 2020 et qui permet aux entreprises de verser jusqu'à 1 000 euros sans charges ni impôts.
Franceinfo fait le point sur cet impôt payé par près de 28 millions de Français, qui permet notamment de financer les groupes publics France Télévisions et Radio France, et donc de financer le site web franceinfo.
1A quoi la redevance sert-elle ?
La redevance, appelée depuis 2009 "contribution à l'audiovisuel public", finance la radio publique depuis 1933 et la télévision publique depuis 1943. Elle contribue au fonctionnement des médias du service public, comme ceux de France Télévisions (dont franceinfo, France 2, France 3, France 4, France 5 et les chaînes publiques d'outre-mer), Radio France (les stations franceinfo, France Inter, France Culture, France Bleu...), France Médias Monde (France 24, RFI, TV5 Monde...), Arte et l'Institut national de l'audiovisuel (INA). Voici comment était utilisé ce financement par France Télévisions en 2018 :
Grâce à cette contribution, ces médias ont proportionnellement moins recours aux revenus publicitaires que les médias privés, le nombre de minutes de publicité par heure de diffusion est plus limité. Dans le cas de Radio France par exemple, un peu plus de 86% de son financement provient de la contribution à l'audiovisuel public, indique le site du groupe. Cela permet à des sites comme celui de franceinfo de proposer du contenu sans aucune bannière publicitaire.
La mission des médias public est de diffuser notamment "les émissions d’expression directe en faveur des formations politiques et des organisations professionnelles, des programmes religieux, les émissions des campagnes électorales, etc ", définit l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom).
2Qui la paie en France ?
La contribution à l'audiovisuel public est aujourd'hui payée par près de 28 millions de personnes. En 2022, elle devrait rapporter 3,7 milliards d'euros, selon la loi de finances publiée par le ministère de la Culture.
Depuis 2009, la contribution à l'audiovisuel public est payable par toute personne qui paye la taxe d'habitation et qui détient un téléviseur. Son montant, déterminé par le Parlement, s'élève actuellement à 138 euros dans l'Hexagone et à 88 euros dans les départements d'outre-mer.
Chaque foyer fiscal ne paie qu'une seule fois la redevance, même s'il possède plusieurs appareils ou plusieurs résidences. Plusieurs personnes sont exonérées de redevance, explique le site service-public.fr, comme les personnes de plus de 60 ans, celles qui touchent le minimum vieillesse ou l'allocation adulte handicapé, les veufs et veuves, les invalides...
3Que va-t-elle devenir avec la fin de la taxe d'habitation ?
Depuis 2005, la contribution à l'audiovisuel public est adossée à la taxe d'habitation. Or, la taxe d'habitation sur la résidence principale disparaît progressivement. Dès 2020, 80% de la population n'a plus payé la taxe d'habitation sur la résidence principale. En 2021, après les contribuables aux revenus les plus modestes, les ménages plus aisés ont commencé à bénéficier d'une exonération. La date de suppression totale de la taxe d'habitation était initialement fixée à 2023, mais ce calendrier pourrait être repoussé.
La contribution à l'audiovisuel public n'est cependant pas concernée par cette réforme, précise le site des finances publiques (PDF). "Les personnes totalement dégrevées de leur cotisation de taxe d'habitation doivent néanmoins régler la contribution à l'audiovisuel public", rappelle impots.gouv.fr.
4Quels candidats proposent de la supprimer ?
Selon le chef de l'Etat, la suppression de la contribution audiovisuelle est "cohérente avec la suppression de la taxe d'habitation", l'une des mesures phares de sa campagne en 2017, a-t-il justifié à Poissy, lundi soir.
Invité de France Inter mardi matin, le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a défendu cette mesure, dénonçant "un outil qui s'érode", alors que "de moins en moins de Français ont" une télévision.
.@GabrielAttal : "Evidemment, on continuera à financer l'audiovisuel public. On a besoin d'un audiovisuel public fort dans un contexte de désinformation. Il sera financé, ce peut être par le budget de l'État." #le79Inter pic.twitter.com/wYoao1UOBa
— France Inter (@franceinter) March 8, 2022
Emmanuel Macron, selon Gabriel Attal, garantira néanmoins les moyens de l'audiovisuel public, "par le budget de l'Etat", en donnant "de la visibilité sur plusieurs années" pour garantir l'indépendance éditoriale.
Les deux principaux candidats d'extrême droite, eux, vont plus loin. En plus de supprimer la redevance, Eric Zemmour et Marine le Pen ont annoncé qu'ils privatiseraient une partie ou la totalité des médias publics. "Au rythme où Emmanuel Macron copie mon programme, il va peut-être bientôt proposer la fin de l'immigration !", a lancé Zemmour, l'ancien polémiste de la chaîne privée CNews, dans un tweet. Le candidat de Reconquête ! souhaite supprimer la redevance audiovisuelle "grâce à la privatisation des principales chaînes de l'audiovisuel public". Il compte néanmoins maintenir franceinfo, ainsi que France Médias Monde et TV5 Monde "pour porter la voix de la France" à l'international, précise Le Monde.
Marine Le Pen souhaite aussi "privatiser l'audiovisuel public" pour "consolider le secteur audiovisuel privé qui subit la concurrence de plateformes aux moyens considérables". "C'est immédiatement 2,8 milliards (d'euros) de redevance que nous rendons aux Français. Nous sommes une grande démocratie, a-t-on encore besoin d'un audiovisuel public de cette taille ?", annonçait-elle au Figaro en septembre 2021. Mais certains médias ne sont pas concernés par la proposition, comme Arte, "l'audiovisuel d'outre-mer" et l'INA.
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