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Présidentielle : "La gauche a renoncé à s'adresser" au "peuple de gauche", juge un député communiste

Alors que Christiane Taubira a dit "envisager d'être candidate" à l'élection présidentielle de 2022 ce vendredi dans une vidéo publiée sur Facebook, le député communiste Sébastien Jumel a jugé sur franceinfo que l'ancienne ministre de la Justice représente "la gauche morale", mais pas celle "qui parle aux caissières d'Auchan". 

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Le député communiste Sébastien Jumel à l'Assemblée nationale, le 11 mai 2021.  (MARTIN BUREAU / AFP)

Pour Sébastien Jumel, député PCF de Seine-Maritime invité vendredi 17 décembre de franceinfo, Christiane Taubira "c'est la gauche morale, la gauche éthique", mais "ce n'est pas la gauche qui parle aux caissières d'Auchan". L'ancienne garde de Sceaux "envisage d'être candidate à l'élection présidentielle" et donne rendez-vous à la mi-janvier dans une vidéo publiée sur Facebook. "La gauche qui est bonne sur les sujets sociétaux, c'est bien, mais je crois que la gauche a renoncé à s'adresser aux ouvriers, aux employés, aux aides-soignantes, à ceux qui, au bout du compte, font le peuple de gauche", estime Sébastien Jumel.

franceinfo : Allez-vous vous ranger derrière Christiane Taubira ?

Sébastien JumelIl y a suffisamment de candidats comme ça, on ne va pas les multiplier chaque jour comme des petits pains, au risque d'être la risée de tout le monde. J'ai du respect pour cette grande dame. C'est la gauche morale, la gauche éthique, la gauche qui a de l'épaisseur culturelle et qui inspire un profond respect. Cela dit, ce n'est pas non plus la gauche qui parle aux caissières d'Auchan avec lesquelles j'ai été ce matin, la gauche de la ruralité qui aspire à avoir des médecins, à replacer les services publics comme ciment de la cohésion sociale, ni même la gauche qui devrait ne pas renoncer à s'adresser au peuple qui manque, au peuple qui souffre, celui des frigos vides, à ceux qui se mobilisent chaque jour en se disant que tout augmente, sauf les salaires. La gauche qui est bonne sur les sujets sociétaux, c'est bien, ça fait plaisir à nous autres qui sommes dans le luxe, le calme et la volupté. C'est évidemment rassurant, mais je crois que la gauche a renoncé, depuis le think tank Terra Nova, à s'adresser aux ouvriers, aux employés, aux aides-soignantes, à ceux qui, au bout du compte, font le peuple de gauche. Vous savez, la fable de La Fontaine "Le lièvre et la tortue" : le lièvre prétend, comme il court plus vite, pouvoir partir plus tard, mais il arrive quand même à la fin derrière la tortue. La gauche serait bien inspirée de regarder qui est le mieux placé pour la représenter et faire face à l'extrême-droite qui est très forte, et à Macron qui, chaque jour un peu plus, doit sourire de voir la gauche aussi mauvaise.  

Anne Hidalgo propose un débat à la télévision avec les candidats de gauche. L'idée vous séduit-elle ?

Je ne sais pas si vous avez compris quoi que ce soit dans ce que propose Anne Hidalgo. J'ai l'impression que c'est un peu la Richard Virenque de la politique, qu'elle serait candidate à l'insu de son plein gré et qu'elle cherche depuis toutes les méthodes pour ne pas être candidate. Elle nous propose en fait un congrès du PS, en tout cas un congrès de la social-démocratie. Les débats sont utiles en démocratie et sont même source de vitalité, mais elle nous propose un congrès du PS à peine élargi à ceux qui l'ont quitté il y a peu, ou qui sont des partenaires de route du PS depuis toujours.

Croyez-vous encore à une gauche de gouvernement ?

Je suis un homme de gauche qui se désespère de voir la gauche tergiverser, se regarder le nombril alors que le peuple de gauche n'a pas disparu, que le peuple de gauche attend d'être incarné, mais que le peuple de gauche n'est pas ceux qui vivent en ce moment dans les salons dorés parisiens sur moquette épaisse. Les salariés, les métiers du lien qui sont les premiers de corvée et qui sont toujours les derniers reconnus, les maires ruraux qui tiennent à bout de bras la cohésion sociale dans leurs territoires, les "gilets jaunes" qui ont exprimé une désespérance et qui, pour l'instant, ne trouvent pas d'écho dans le débat présidentiel ... On a un président de la République qui nous fait Narcisse pendant deux heures à grande antenne, qui se regarde le nombril au point de pouvoir tomber dans la rivière, et la gauche qui se regarde aussi le nombril. Cela me désespère.

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