Procès des viols de Mazan : Gisèle Pelicot "porte une parole qui est au-delà de sa propre histoire", estime Laurence Rossignol
Laurence Rossignol, ancienne ministre socialiste des Droits des femmes et sénatrice du Val-de-Marne, espère jeudi 19 décembre sur franceinfo que "Gisèle Pelicot ait, au moins, à l'issue du procès où elle a été si courageuse, si exemplaire, gagné une vraie grande loi contre les violences faites aux femmes". Le verdict a été rendu dans le procès des viols de Mazan. L'ensemble des 51 accusés ont été reconnus coupables. Dominique Pelicot a été condamné à 20 ans de réclusion criminelle.
Pour la sénatrice, cette "loi intégrale contre les violences faites aux femmes", doit prendre en compte "à la fois la question des moyens, des évolutions du Code pénal et aussi la question des pratiques judiciaires, des pratiques policières, du traitement des victimes de la prévention des violences sexuelles". Elle espère voir inscrire à l'agenda du nouveau gouvernement de François Bayrou, et dans les exigences des dirigeants socialistes, Olivier Faure, Boris Vallaud et Patrick Kanner.
Dans cette loi, elle réclame des "moyens d'enquête et d'investigation" pour les violences sexistes et sexuelles (VSS) car "il y a un défaut majeur de recherche de preuves" dans ces affaires. Elle souligne le travail des enquêteurs dans le dossier Pelicot, qui "sont allés chercher les preuves", alors que "le plus souvent les preuves ne sont pas recherchées". Au-delà des forces de l'ordre, il y a la question des formations "à l'École nationale de la magistrature et les formations chez les avocats". Elle pointe cependant un angle mort dans ces formations qui sont "pour les primo-arrivants". Il ne faut donc pas oublier ceux déjà en exercice. Elle veut donc "des moyens" pour former les magistrats, les policiers et les avocats déjà en exercice.
Renforcer les formations
Laurence Rossignol insiste également sur l'importance de "la formation des médecins", rappelant les errances médicales de Gisèle Pelicot, plusieurs médecins n'ayant pas détecté qu'elle était victime de soumission chimique de la part de son mari, Dominique Pelicot.
L'ex-ministre des Droits des femmes se dit cependant "perplexe" quant à l'introduction de la notion de consentement dans la loi. Selon elle, le Code pénal, tel qu'il est rédigé aujourd'hui, permet "de couvrir bon nombre de cas". "Je pense que les hommes qui violent savent très bien que la victime n'est pas consentante, c'est d'ailleurs l'intérêt du viol que de passer outre le consentement d'une femme", explique la ministre. Or, "il faut faire attention à ce qu'en introduisant le consentement dans la loi, on n'introduise pas un critère supplémentaire", pointant notamment l'ambiguïté de ce concept utilisé dans le langage courant. "Consentir veut dire accepter, il ne veut pas dire désirer, je suis donc perplexe sur la nécessité d'introduire un mot ambigu pour clarifier le Code pénal", explique-t-elle.
Un procès historique
Gisèle Pelicot "porte une parole qui est au-delà de sa propre histoire", estime sur franceinfo Laurence Rossignol, ex-ministre socialiste des Droits des femmes et sénatrice. "Elle parle pour toutes les femmes", ajoute-t-elle. "C'est un procès historique."
Elle a également souligné plusieurs enseignements du procès. "Les violences sexuelles contre les femmes ont bénéficié pendant des siècles d'une complaisance, d'une omerta, d'un déni, et dans ce procès, dans tout ce qu'il génère comme parole d'experts, de philosophes, de militantes, contribue à ce qu'on comprenne mieux les mécanismes de violences sexuelles, de découvrir comment fonctionnent les prédateurs, comment les femmes réagissent, peuvent être solidaires et se défendre". Par exemple, le refus du huis clos de Gisèle Pelicot a permis, selon elle, de découvrir "qu'en fin de compte, cette histoire de huis clos, qui était toujours présentée comme étant au service de la victime, en fait, protégeait davantage les auteurs", analyse la ministre.
Jeudi, le verdict a été rendu dans ce procès-fleuve, débuté au mois de septembre. Dominique Pelicot était accusé d'avoir drogué sa femme, Gisèle, pendant plus de dix ans, pour la violer et la faire violer par au moins 50 autres hommes, durant près de dix ans. Tous, ont été reconnus coupables par la cour criminelle du Vaucluse. Dominique Pelicot a été condamné à 20 ans de réclusion criminelle.
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