Accident mortel d'hélicoptère sur le tournage de Dropped : "La société de production s'est comportée comme des amateurs, des gamins", dénonce la mère d'une victime
Bénédicte Mei, dont la fille Lucie a été tuée lors du crash de deux hélicoptères en 2015 en Argentine lors du tournage de l'émission de télévision, accuse la société de production de n'avoir pas été à la hauteur.
Un homme de 49 ans a été mis en examen pour "homicide involontaire" dans l'enquête sur le crash de deux hélicoptères qui a coûté la vie à 10 personnes, dont les sportifs Alexis Vastine, Camille Muffat et Florence Arthaud, le 9 mars 2015 en Argentine. "Ils mettent tout un peu trop sur le dos du malheureux gars qui faisait la sécurité, a réagi sur France Bleu Normandie Alain Vastine, le père d'Alexis Vastine.. Il n'y a pas que lui, la société de production ALP est aussi coupable, même TF1" "Tout ça pour l'argent. [...] On est dans un autre monde, poursuit-t-il. Je suis dépassé par tout ça. En attendant j'ai perdu mon fils. Je ne le reverrai jamais. C'est dur."
Parmi les autres victimes, Lucie, journaliste pour l'émission. Sur franceinfo vendredi, sa mère, Bénédicte Mei, accuse la société de production de s'être comportée "comme des amateurs", "des gamins".
franceinfo : Quand avez-vous appris cette mise en examen ?
Bénédicte Mei : Il y a déjà quelques mois, trois, quatre, peut-être. Cet homme avait été embauché par la société de production de l'émission pour gérer l'ensemble des problèmes de sécurité. Ils l'avaient choisi parce qu'il avait déjà fait ça pour le format suédois de l'émission.
Qu'est-ce qui lui est reproché ?
Une série de choses assez extraordinaires : homicide involontaires pour des tas de négligences, ne pas avoir respecté l'usage auquel était destiné ces hélicoptères. C'est-à-dire que si on les utilisait pour des vols commerciaux, il fallait respecter un certain nombre de choses, ce qui n’a pas été fait. Ne pas avoir empêché les gens de monter dans l'hélicoptère, parce qu'en cas de vol en formation, il ne devait pas y avoir de passager. Ne pas s'être assuré que les pilotes savaient faire ça, parce qu'ils n'avaient jamais volé ensemble. Il y avait aussi quelque chose qui n'avait pas été enlevé. Enfin tout, c'est absolument incroyable.
Est-ce la faute d'un seul homme ?
Non, pas du tout. Dans les auditions, il dit qu'il n'est pas spécialiste des hélicoptères et des avions. C'est incroyable d'embaucher quelqu'un qui n'est pas spécialiste de ça alors que les hélicoptères étaient le cœur de l'émission puisqu'on était obligé de les utiliser dans la mesure où les gens étaient "droppés" [largués] à des endroits où il n'y avait aucune autre possibilité d'accès. C'était le logo de l'émission, deux hélicoptères. Le vol en formation, c'est quelque chose, dans les jeux, que l'on donne à faire à des militaires, des gens hyperspécialisés. La boîte de production disait que cet homme était formidable, qu'il savait tout faire. C'était leur argument massue pour dire qu'ils avaient pris toutes les protections possibles et imaginables et qu'ils étaient à l'abri de toutes poursuites.
Qu'attendez-vous de cette mise en examen ?
J'attends que la justice demande des comptes à la société de production. Dans notre idée à nous, quand on embauche quelqu'un comme ça on s'assure qu'il sait faire le travail. Or, là, il y a une défaillance manifeste. La société de production a voulu réaliser des économies. Il n'y a pas de contrat pour les hélicoptères, c'est 29 000 dollars donnés de la main à la main, les pilotes ne se connaissaient pas, ils n'ont pas respecté les dispositions légales et ils disent tout le temps que c'est la faute des pilotes. Ils sont morts, donc ils ne vont pas les contredire. C'étaient des anciens militaires. Un avait fait la guerre des Malouines, donc c'était un retraité.
Que pensez-vous de la façon dont a agi la société de production ?
La société de production s'est comportée comme des amateurs. Ce n'était pas à la hauteur de ce projet. Ils ont voulu jouer dans la cour des grands, se sont pris pour James Bond, ont voulu faire une scène de film alors que dans le cinéma c'est interdit. Ce n'étaient pas des reporters de guerre, ils étaient là pour donner du plaisir à d'autres personnes et on n'a pas pris en compte la mise en danger que c'était de les transporter de cette manière-là et de le faire travailler de cette manière-là. Je suis exaspérée et particulièrement en colère contre la société de production parce que dans toutes les audiences civiles elle continue à dire des énormités, qu'ils ne filmaient pas dans l'avion alors que c'est avéré, que c'était un transport alors que ce n'était pas un transport. J'en veux à la société de production qui s'est comportée comme des gamins.
Que représente cette mise en examen ?
Ca représente un grand pas parce qu'enfin des choses qui avaient été dites dans le rapport civil du BEA argentin se trouvent concrétisées. Enfin, il se passe quelque chose qui dit que les conditions de sécurité n'ont pas du tout été prises au sérieux. L'enquête pénale n'est pas terminée, je ne sais pas sur quoi d'autre cela va déboucher mais ce n'est pas fini. L'homme va se défendre. Il dit qu'il n'est pas d'accord pour porter le chapeau. Ils vont décortiquer les prises de décisions et qui a réellement décidé de faire ça et d'enfreindre tous les règlements de sécurité pour le faire.
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