Mort d'Emile : analyse des vêtements, prélèvements de la terre et de végétaux... Un ancien commissaire de police détaille les pistes des enquêteurs
La cause du décès du jeune Emile, deux ans et demi, disparu dans les Alpes de Haute-Provence cet été, reste inexpliquée mais le procureur de la République d’Aix-en-Provence a donné des indications supplémentaires, mardi 2 mars, lors d'une conférence de presse. Des vêtements que portait l'enfant lors de sa disparition ont été retrouvés et sont en cours d'analyses. Ces analyses pourraient révéler de précieux indices explique, sur franceinfo, Richard Marlet, commissaire divisionnaire honoraire chargé de cours de police scientifique.
Franceinfo : Les vêtements retrouvés peuvent-ils "parler" neuf mois après la disparition de l'enfant ?
Richard Marlet : Il va y avoir un examen extrêmement minutieux, du tee-shirt, de la culotte et puis des chaussures pour rechercher toutes traces de perforations, de coupure, de déchirement ou des traces qui pourraient correspondre à des morsures. Ça, c'est plutôt sur l'aspect morphologique de ces vêtements. Après, je pense qu'il va y avoir également des analyses un peu plus fines, c’est-à-dire des recherches probablement d'ordre biologique, génétique. Et puis et également aussi des analyses des terres, des végétaux, des pollens qui peuvent se trouver sur ces vêtements, notamment pour essayer de déterminer si l'endroit de la découverte de ces vêtements est un seul et même endroit ou si les vêtements ont pu passer dans plusieurs isotopes. Ça, on peut s'en rendre compte avec la nature des terres ou avec la nature des pollens pour voir s'il y a eu déplacement. Il peut s'agir de déplacements provoqués par une action humaine. Et puis, évidemment, il peut s'agir de déplacements provoqués soit par des animaux prédateurs, soit par des phénomènes météorologiques.
"L'idée est d'accumuler un certain nombre de réponses matérielles pour pouvoir déterminer un certain nombre d'hypothèses, et puis après les éliminer lorsqu'elles ne correspondent pas aux éléments matériels."
Richard Marletfranceinfo
Est-ce qu'il peut y avoir, neuf mois après, encore des traces génétiques ou des traces de sang, même invisibles à l'œil nu, que la science pourrait faire parler ?
Vous vous souvenez de l'affaire Maelys, où c'est une micro-gouttelette de sang qui va déterminer la présence de Maëlys dans le coffre du suspect. Là on peut imaginer que soit à l'intérieur des chaussures, soit sur les lacets, soit dans une couture, qu'on ait des micro-gouttelettes de sang. Évidemment, la génétique va démontrer qu'il s'agit très probablement du sang d'Emile. Mais voilà, déjà, je félicite l'ensemble de l'IRCGN (Institut de recherche criminelle de la Gendarmerie nationale, ndlr) pour la rapidité des analyses. Arriver à déterminer très vite qu'il s'agit bien du crâne du petit Émile. Arriver à déterminer que le crâne n'a pas été enterré. Arriver à déterminer aussi qu'il supporte des micro-fractures. Et puis les investigations scientifiques sur le terrain vont continuer, c’est-à-dire qu'il y manque des pièces d'ossements. Ça, c'est clair. Au moment où on a découvert les vêtements, il y a dû y avoir des prélèvements de terre pour essayer de retrouver la présence d'insectes nécrophages ou colonisateurs qui permettraient de déterminer le moment où ce corps a été exposé à la nature.
Est-ce qu'on peut encore découvrir des choses sur le crâne et les dents de l'enfant puisque le procureur a confirmé que les analyses se poursuivaient sur ces éléments ?
Oui, parce que le crâne n'a pas été enterré mais il doit quand même supporter un certain nombre de micro-traces. Des traces de terre ou de pollen qui arriveraient à démontrer l'histoire et le chemin de ce crâne. C’est-à-dire que manifestement, il n'est pas à proximité des vêtements. Est-ce qu'il a été transporté par un animal ? C'est tout à fait possible. Est-ce qu'il a été transporté par les perturbations atmosphériques ? Par ces micro-prélèvements, on va essayer de déterminer les endroits par lesquels ce crâne a pu passer.
Avec les éléments nouveaux est-ce que les chances de résoudre cette affaire sont minces malgré tout ?
On est devant beaucoup de questions. Je pense que la science va répondre à un certain nombre de questions. À partir du seul crâne, dès lors qu'on a trouvé et mis en évidence aucune fracture. Donc il y a des micro-fractures mais qui peuvent avoir été provoquées par l'action des animaux prédateurs. J'ai bien peur qu'en fait de simplement sur ce crâne, peut être qu'on en fera plus avec les vêtements, peut être qu'on va trouver d'autres ossements... Mais au moment où on se parle, on a beaucoup plus de questions que de réponses.
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