Reportage "On lui disait, laisse tout et va-t'en" : au procès de la rue d'Aubagne, les familles dressent les portraits des victimes de l'effondrement des immeubles

Huit personnes ont péri sous les décombres, il y a six ans à Marseille. À la barre, vendredi, les proches ont raconté les angoisses des locataires avant que leur immeuble ne s’écroule.
Article rédigé par franceinfo
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Au tribunal de Marseille, aprocès des effondrements d'immeubles de la rue d'Aubagne, le 7 novembre 2024. (CHRISTOPHE SIMON / AFP)

Le drame avait fait huit morts. Au procès des effondrements meurtriers des immeubles de la rue d'Aubagne à Marseille il y a six ans, le tribunal a entendu, vendredi 15 novembre, les familles des victimes, après avoir entendu des experts qui ont décrit la vétusté de ces immeubles et les alertes ignorées.

Parmi les récits bouleversants de proches de victimes, il y a notamment celui de Didjiak. Il raconte à la barre son frère Papé, qu'il décrit comme son idole. Il avait quitté le Sénégal dans "l'espoir d'une vie meilleure". Papé avait 40 ans, il est mort dans l'appartement de Simona. Il allait souvent chez elle, au 3e étage, "pour la rassurer". Simona, 30 ans, avait peur de cet immeuble mais "elle ne voulait pas que l'on s'inquiète", racontent ses parents. Ils s'étaient cotisés pour qu'elle déménage. "On lui disait : 'Laisse tout et va-t'en", pleure sa mère, "mais elle répétait : les experts disent qu'il n'y a pas de risques".

"J'attends que les responsables soient jugés"

Simona avait choisi Marseille pour le soleil, la mer, comme Marie. Cette artiste de 55 ans qui aimait son quartier, ses odeurs d'épices, ses habitants mélangés. Elle habitait au 5e étage. Son frère Paul, raconte, que quand leur mère a compris que Marie était sous les décombres, "elle est tombée au sol", victime d'un AVC. "J'attends que les responsables soient jugés", explique Paul.

"Qu'on puisse dire à tous ceux qui gèrent des logements qui ne sont pas dignes : 'Attention, la justice est là, elle veille et elle punit.'"

Paul, frère d'une victime

à franceinfo

Beaucoup de locataires avaient alerté sur l'état de l'immeuble. Jusqu'à ce dernier coup de fil au pompier, la nuit avant le drame, que le tribunal a diffusé. Un appel glaçant qui résonne dans l'immense salle d'audience. Il est 2h40 du matin le 5 novembre, quelques heures avant les effondrements. Marie est dans son lit et déclare entendre des bruits au pompier : "Il y a eu un gros crac, c'est effrayant ! Ça a fait une nouvelle fissure." "Les fissures s'agrandissent ?", demande le pompier.

"Oui, celle à côté de mon lit, elle s'agrandit", indique Marie qui explique qu'il y a eu, quelques jours auparavant, une intervention des secours, une visite d'un expert, mais que l'immeuble n'a pas été évacué. "Moi, je n'arrête pas d'appeler le syndic", dit-elle plusieurs fois. Marie demande au pompier : "Est-ce que ça peut tomber comme ça, d'un coup ?" "Non, répond le pompier, un immeuble, ça ne s'écroule pas subitement, vous pouvez vous rendormir."

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