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Incendie d'un gîte à Wintzenheim : origine du feu, normes de sécurité, identité des victimes... Les questions qui se posent après le drame

Le feu qui a piégé mercredi matin des vacanciers en train de dormir dans une ancienne grange rénovée a fait 11 morts.
Article rédigé par franceinfo
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Les pompiers éteignent l'incendie d'un gîte à Wintzenheim (Haut-Rhin), le 9 août 2023. (VINCENT VOEGTLIN / MAXPPP)

C'est l'incendie le plus meurtrier enregistré en France depuis celui d'un bar à Rouen en 2016. Onze personnes, dont 10 adultes souffrant de handicaps mentaux légers, ont péri, mercredi 9 août, dans l'incendie d'un gîte de vacances à Wintzenheim (Haut-Rhin). Au total, 28 personnes se trouvaient dans ce bâtiment de deux étages. Dix-sept d'entre elles ont pu sortir à temps du bâtiment, selon la préfecture. Au lendemain du drame, les circonstances de l'incendie restent encore floues, tandis que les enquêteurs tentent d'établir l'existence ou non de responsabilités pénales.

Comment le feu a-t-il pris ?

La justice a ouvert une enquête pour recherche des causes de la mort, a annoncé Nathalie Kielwasser, vice-procureure de la République de Colmar. "On ne sait pas pourquoi ils ont été piégés" par les flammes, a-t-elle dit, mercredi, avançant que "l'origine serait vraisemblablement pour le moment un feu qui a couvé", sans qu'il soit possible "à ce stade" de déterminer "les causes de ce feu couvant". Selon les toutes premières constatations, et au regard de la structure du bâtiment, "le bois a dû mettre quelques heures avant de s'embraser", a ajouté la magistrate.

Un feu couvant est "un processus de combustion lente", qui n'émet ni flammes ni lumière, ce qui rend sa détection plus difficile et tardive, d'après le Laboratoire national de métrologie et d'essais. "Les principaux risques de cette combustion 'invisible' proviennent du fait qu'elle peut être facilement déclenchée par des sources de chaleur trop faibles pour allumer des flammes", précise cet organisme public.

Dans le cas de Wintzenheim, sur la base de cette hypothèse, le feu naissant se serait accompagné d'une "accumulation de gaz chaud", expliquent les pompiers à BFMTV. "Puis, à un moment donné, il y a une montée en température qui provoque un embrasement généralisé de toute la structure en bois", d'où un temps limité laissé aux occupants pour réagir et "une grosse section" du bâtiment "complètement carbonisée".

Les normes de sécurité et d'accueil du gîte étaient-elles respectées ?

Des interrogations émergent sur la conformité réglementaire du gîte où logeaient les vacanciers. "Il apparaît qu'aucune commission de sécurité n'a visité les lieux et pu rendre un avis", a annoncé dans un communiqué, jeudi, Nathalie Kielwasser. Sur BFMTV, elle a souligné que la mission d'une commission de sécurité, obligatoire pour les établissements recevant du public (ERP), est notamment de veiller à la présence de portes coupe-feu, d'alarmes de détection et "de couloirs et de fenêtres qui permettent des doubles évacuations, ce qui n'était visiblement pas le cas". Le bâtiment disposait bien de détecteurs de fumée, "mais pas suffisants pour ce type de structure". "On ne peut pas pour le moment vérifier s'il y avait ou non des extincteurs", a ajouté la représentante du parquet. 

Les obligations relatives aux ERP s'imposent aux structures de grande capacité, pouvant accueillir plus de 15 personnes. Au total, 28 personnes se trouvaient dans le gîte au moment du drame. Cette grange, bien que commercialisée comme deux gîtes distincts, était soumise à la réglementation des ERP, a confimé la vice-procureure dans son communiqué de jeudi.

Toutefois, la magistrate reste prudente quant à d'éventuelles responsabilités pénales, notamment de la propriétaire des lieux. "Il faut corréler juridiquement la raison du sinistre. (...) Est-ce que ça a un lien avec les règles de sécurité ? Je n'ai pas le retour des investigations criminelles pour le moment."

D'après les premiers éléments de l'enquête, la jauge du nombre de visiteurs était "tout à fait respectée", avec "des couchages et des chambres qui respectaient visiblement les capacités d'accueil", a affirmé la vice-procureure sur BFMTV. Les investigations "se poursuivent" toutefois concernant la conformité en lien avec le public accueilli, en situation de handicap, a-t-elle précisé.

Jeudi après-midi, le premier adoint au maire de Wintzenheim a apporté un nouvel élément, en affirmant que le "bâtiment n'a jamais été déclaré" comme une structure "pouvant accueillir du public". Administrativement, l'ancienne grange pour animaux était donc toujours répertoriée comme un local à usage agricole.

Qui sont les 11 victimes ?

A ce stade, aucune identité n'a été rendue publique. Mercredi, des familles étaient encore "en attente de connaître la réelle identité" des personnes tuées dans les flammes, a souligné la vice-procureure Nathalie Kielwasser. Les corps des victimes devaient être passés au scanner, avec des résultats attendus sous 48heures "ou lundi au plus tard".

Certains proches ont déjà eu confirmation de la perte d'un des leurs. "Il avait 33 ans et il avait une légère déficience mentale. Je suis effondrée", témoigne ainsi dans Le Parisien Sarah, sœur de l'une des victimes. Ce travailleur handicapé, qui "n'avait ni femme ni enfant", exerçait dans un établissement d'aide et de service par le travail (Esat) à Saint-Max, dans la banlieue de Nancy (Meurthe-et-Moselle), et vivait dans le foyer qui y était rattaché, baptisé L'Eau vive.

Trois autres victimes étaient hébergées dans cette même structure gérée par l'association AEIM-Adapei 54, selon France 3 Grand Est. Dotées d'une "autonomie relative" nécessitant un encadrement par un tiers, toutes les quatre étaient sous tutelle et avaient "entre 20 et 50 ans", précise le président de l'association, Denis Renaud. Elles se prénommaient Jennyfer, Claude, Jérôme et Jimmy, selon l'AFP.

Les sept autres victimes étaient originaires de Moselle, rapporte France Bleu. Quatre dépendaient du foyer Robert Gautier à Amnéville, une autre du foyer Marie-Louise Laurichesse à Pierrevillers et une sixième, de l'établissement public social et médico-social du Saulnois, à Albestroff. La dernière vivait au sein du foyer Antoine Moulinier de Rombas.

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