Affaire Le Roux : comment l'un des fils de Maurice Agnelet a rebattu les cartes
Le septuagénaire est jugé une troisième fois pour le meurtre d'Agnès Le Roux, disparue en 1977. Son fils Guillaume livre un témoignage qui bouleverse le procès.
Le coup de théâtre intervient en plein procès. La cour d'assises d'Ille-et-Vilaine a ordonné, lundi 7 avril, un mandat de dépôt à l'encontre de Maurice Agnelet, à la suite de la déposition d'un de ses deux fils, Guillaume. Ce dernier accuse son père d'avoir tué sa maîtresse, Agnès Le Roux, une héritière d'un casino niçois mystérieusement disparue en 1977.
Condamné en 2007 en appel à vingt ans de prison pour l'assassinat de sa maîtresse, Maurice Agnelet, 74 ans, est jugé une troisième fois. Retour sur une journée décisive.
Acte 1 : Guillaume Agnelet accuse son père
Dimanche, "en début d'après-midi, le fils, Guillaume, est venu voir l'avocat général de Chambéry pour dire qu'il avait des révélations à faire", explique l'avocat général du parquet de Rennes, Philippe Petitprez. "Il dit qu'il a eu des confidences de son père quand il avait 14 ans [en 1983] : son père lui a dit qu'il savait où était le corps", ajoute le magistrat.
"Anne Litas, sa mère, lui aurait dit dans les années 1990 que son père avait expliqué avoir tiré une balle dans la tête d'Agnès Le Roux alors qu'ils faisaient du camping sauvage en Italie près de Monte Cassino. Il aurait alors crié pour faire croire à un suicide mais, comme il n'y avait personne, il aurait abandonné le corps dans une forêt, après l'avoir dénudé, précise Philippe Petitprez. Il aurait ensuite abandonné le Range Rover d'Agnès près d'une gare, avec les clés sur le volant, toujours du côté italien."
"Dans un troisième temps, (...) interrogé, son père n'aurait pas démenti l'avoir tuée. Il aurait aussi fait comprendre [à Guillaume] que son frère Thomas, 'plus intelligent' que lui, avait compris depuis longtemps", explique aussi l'avocat général. Un coup de théâtre, alors que Guillaume avait jusqu'alors pris la défense de son père devant les caméras, comme le montre ce reportage de France 3.
Acte 2 : il persiste et signe
"Je n'allais pas bien depuis que j'avais 16 ans. Si je ne le faisais pas maintenant, j'aurais eu des regrets jusqu'à la fin de ma vie", a déclaré, par visioconférence Guillaume Agnelet, 45 ans, lundi, en réponse à une question du président de la cour d'assises, qui lui demandait pourquoi il livrait maintenant ce témoignage. Guillaume Agnelet a affirmé ne pas avoir témoigné plus tôt "pour le bien de la famille". Interrogé, après son témoignage, par le président de la cour au sujet de la nature de Maurice Agnelet, il répond : "En un mot, 'perverse'."
Par visioconférence, lundi, devant la cour d'assises, il a réitéré ses accusations. "Ma mère m'a dit : 'Je vais te dire qui est ton père'. Ils [Maurice Agnelet et Agnès Le Roux] sont allés faire du camping dans un coin tranquille près de Monte Cassino. Il aurait, pendant son sommeil, tiré sur Agnès puis hurlé pour demander du secours", a notamment déclaré le fils de l'accusé.
Acte 3 : ces révélations bouleversent le déroulement du procès
Maurice Agnelet dormira en prison. Jusqu'ici, l'accusé comparaissait libre. Mais la cour a justifié sa décision en raison des "risques de fuite ou de pression". Par ailleurs, ces révélations ont bouleversé le déroulement de l'audience. Guillaume Agnelet sera de nouveau entendu mercredi, cette fois devant la cour d'assises de Rennes.
Anne Litas, "entendue vendredi dernier, et qui avait juré ne détenir aucun élément lui permettant d'accuser son ex-mari", rapporte Le Figaro.fr, sera également réentendue mercredi. "Guillaume viendra en personne le même jour, pour une spectaculaire confrontation intra-familiale, car Thomas sera là aussi", poursuit le site du quotidien.
Acte 4 : la famille règle ses comptes
Le frère de Guillaume, Thomas, qui était cité comme témoin par la défense, a affirmé lundi qu'il ne savait "rien des faits", allant jusqu'à qualifier son frère de "schizophrène". "Je tombe des nues, je suis abasourdi. On est dans un film de Gabin où la famille règle ses comptes à la barre", a-t-il dit.
Réagissant à la situation créée par les révélations de Guillaume Agnelet, l'avocat de Maurice Agnelet, François Saint-Pierre, a déclaré à la presse : "C'est un coup de théâtre ou plutôt une tragédie qui s'ouvre. C'est une situation tendue qui s'est installée dans cette cour d'assises." A son client, il glisse : "C'est une tragédie familiale. Il est toujours temps d'évoluer et de dire les choses", rapporte sur Twitter une journaliste d'Europe 1 présente à l'audience. Mais, hilare, l'accusé s'emmêle dans ses réponses, tweete pour sa part un journaliste du Figaro.
Les réponses d'#Agnelet n'ont plus aucun sens. Ses mots, ses rires, ses gesticulations ne participent plus vraiment au procès.
— S. Durand-Souffland (@DurandSouffland) April 7, 2014
Invité à réagir aux déclarations de son fils Guillaume, Maurice Agnelet avait déclaré plus tôt : "Guillaume est en pleine dépression, c'est le délire de ce garçon qui va lui retomber dessus, il ne se rend pas compte", relate Le Figaro.fr. Maurice Agnelet a également mis en cause "l'imagination" de son fils et "sa nouvelle femme", qui l'aurait influencé.
Acte 5 : une ex-épouse de Maurice Agnelet demande à être entendue
Lundi après-midi, Françoise Lausseure a fait part de sa volonté d'être entendue, rapporte Le Parsien.fr. Vivant au Mexique, elle est un témoin-clé de cette affaire. Au début de l'enquête, elle avait déclaré qu’"au moment de la disparition d’Agnès Le Roux, (...) Maurice Agnelet était avec elle, en Suisse, à Genève", explique le site du quotidien. "Fort de cet alibi, Maurice Agnelet avait bénéficié d’un non-lieu en 1985, avant d'épouser Françoise Lausseure."
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