Parquet national antiterroriste : le Syndicat de la magistrature dénonce une mesure "totalement artificielle" qui "créera des problèmes"
Le Premier ministre a présenté le nouveau dispositif d'action contre le terrorisme. Le secrétaire national du Syndicat de la magistrature, Vincent Charmoillaux, juge ce dernier "artificiel".
"On est en train de créer quelque chose qui est totalement artificiel", a réagi vendredi 13 juillet sur franceinfo Vincent Charmoillaux, secrétaire national du Syndicat de la magistrature et vice-procureur de Lille, après la confirmation par Edouard Philippe de la création d'un parquet national antiterroriste (PNAT) pour faire face à la menace terroriste en France.
Le magistrat a dénoncé un "effet d'annonce", car selon lui "cela ne changera rien de décisif et créera des problèmes qui n'existent pas aujourd'hui." Pour lui, on met en place une "usine à gaz" avec laquelle il sera "plus compliqué de mobiliser du monde très vite." Le Syndicat de la magistrature serait plus favorable à une "compétence inter-régionale" qui "éviterait l'engorgement d'une seule structure."
franceinfo : Pourquoi êtes-vous contre cette création d'un parquet national anti-terroriste ?
Vincent Charmoillaux : On est essentiellement dans l'effet d'annonce sur cette mesure. La justice antiterroriste est centralisée. Il y a un procureur national en charge du contentieux terroriste qui est le procureur de Paris et cela depuis une trentaine d'années. Là, on est en train de créer quelque chose qui est totalement artificiel. On va prendre la section antiterroriste du parquet de Paris et on va la séparer artificiellement du parquet de Paris en créant une nouvelle entité. Cela ne changera rien de décisif et cela créera des problèmes qui n'existent pas aujourd'hui.
Quels problèmes cela va-t-il engendrer ?
Dans le cadre des attentats du 13-Novembre, dans la mesure où c'était le parquet de Paris dans son ensemble, donc un nombre important de magistrats qui étaient compétents pour le terrorisme, on a pu mobiliser des dizaines de magistrats très vite. Si on est sur une structure séparée, autonome, il y aura juste une trentaine de magistrats. Ce sera beaucoup plus compliqué de mobiliser du monde très vite. J'entends qu'on envisage des espèces d'usine à gaz, de délégation, de collecte temporaire. Cela ne fait qu'inventer une solution bancale à un problème qui n'existe pas aujourd'hui.
Le parquet de Paris est-il suffisant et peut-il gérer toutes ces affaires qui s'accumulent ?
Nous sommes très critiques, au Syndicat de la magistrature, sur le principe de cette centralisation absolue du contentieux terroriste. On serait beaucoup plus en faveur d'une compétence inter-régionale sur le modèle de ce qui se fait en matière de criminalité organisée ou de délinquance économique et financière. On serait sur un échelon qui permettrait de conjuguer à la fois la spécialisation et une meilleure connaissance du terrain et qui éviterait l'engorgement sur une seule structure menacée d'embolie. Là, on est sur quelque chose qui existe déjà et qui est très loin d'une décentralisation.
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