Procès du 13-Novembre : Salah Abdeslam explique avoir "visé la France" parce que des "avions français ont bombardé l'Etat islamique"
Au sixième jour du procès, mercredi, le président de la cour d'assises spéciale de Paris a donné la parole aux accusés, pour qu'ils expriment leur position sur les faits qui leur sont reprochés.
"On a attaqué la France, visé la population, des civils, mais il n'y avait rien de personnel." Au sixième jour du procès des attentats du 13-Novembre, mercredi 15 septembre, le principal accusé, Salah Abdeslam, a tenté de justifier les attaques par l'intervention militaire de la France contre le groupe Etat islamique en Irak et en Syrie. Dans une salle d'audience à l'ambiance pesante, le seul membre des commandos du 13-Novembre encore en vie a blâmé les "avions français qui ont bombardé l'Etat islamique, les hommes, les femmes, les enfants".
Le président de la cour d'assises spéciale, Jean-Louis Périès, a donné la parole aux 14 accusés présents – six autres sont absents et jugés par défaut – afin qu'ils fassent une "déclaration spontanée", "succincte", sur les faits qui leur sont reprochés. Salah Abdeslam a été invité à s'exprimer en dernier. Pendant cinq minutes, l'accusé a déroulé son propos avec un ton calme et posé, contrastant avec ces éclats de voix des derniers jours.
"Je veux être sincère"
Masque noir baissé sur sa barbe, t-shirt sombre et veste polaire foncée sur le dos, il a d'abord affirmé que les "terroristes, jihadistes, radicalisés" auxquels on avait pu se référer pendant l'audience étaient en fait "des musulmans". "Il s'agit de l'islam authentique", a-t-il soutenu. L'homme de 32 ans a ensuite tenu à expliquer pourquoi les assaillants avaient choisi de frapper la France. "Quand on a visé ces gens-là, on a visé la France, et rien d'autre", clame-t-il. Et d'ajouter : "François Hollande a dit que nous avons combattu la France à cause de ses valeurs, mais c'est un mensonge."
"Quand François Hollande a pris la décision d'attaquer l'Etat islamique, il savait que sa décision comportait des risques."
Salah Abdeslamdevant la cour d'assises spéciale
Salah Abdeslam a affirmé que l'ancien chef de l'Etat, qui sera auditionné par la cour en novembre, "savait qu'en prenant cette décision, des Français allaient trouver la mort."
"Je sais que mes propos peuvent choquer (...) surtout des âmes sensibles. Mais le but n'est pas d'enfoncer le couteau dans la plaie", a poursuivi l'accusé. "Le minimum, c'est de dire la vérité. On dit souvent que je suis provocateur, mais ce n'est pas vrai, je veux être sincère", a-t-il conclu, assurant que le "but" de ses déclarations n'était pas de "blesser". Sur le banc des parties civiles, venues nombreuses, son discours s'est pourtant révélé difficilement audible. Certains se sont mis à pleurer, d'autres se soutenaient les uns les autres, d'autres encore sont restés prostrés, semblant accuser le coup.
Mohamed Abrini reconnaît sa participation
Les autres accusés se sont quant à eux lancés dans des déclarations plus succinctes, niant ou minimisant leur participation. Seuls deux d'entre eux n'ont pas souhaité s'exprimer : Sofien Ayari et Osama Krayem, deux compagnons de cavale de Salah Abdeslam en Belgique. Plusieurs ont clamé leur innocence. "Je ne sais pas pourquoi je suis ici. Je suis désolé pour toutes les victimes", a lancé Muhammad Usman, soupçonné d'avoir voulu commettre une autre attaque en France, le soir du 13 novembre, au côté d'Adel Haddadi, également renvoyé devant la cour d'assises spéciale.
"Je condamne avec la plus grande fermeté ces atrocités. Je clame depuis le premier jour mon innocence", a embrayé Yassine Atar, accusé d'avoir détenu une clé de la planque où s'est réfugié Salah Abdeslam. "Je ne suis pas Oussama Atar", a-t-il tenu à rappeler à la cour, en référence à son frère, considéré comme l'ordonnateur des attaques et présumé mort en Syrie. C'est aussi le nom d'Oussama Atar qu'a invoqué Mohamed Abrini pour minorer son rôle. L'homme de 36 ans est suspecté d'avoir aidé aux préparatifs des attaques. S'il a reconnu sa "participation" aux attentats, Mohamed Abrini s'est défendu en ajoutant n'être ni "le commanditaire" ni "le cerveau des opérations".
Les accusés seront entendus plus longuement en novembre, cette fois dans le cadre d'un interrogatoire sur leurs personnalités. Ce n'est qu'en janvier, puis en mars, qu'ils seront interrogés précisément sur les faits. D'ici-là, l'examen minutieux du déroulement des attentats, qui ont fait 130 morts et des centaines de blessés, va se poursuivre dans les prochains jours. La cour visionnera, jeudi et vendredi, des photographies et des vidéos des attaques au Stade de France, sur les terrasses parisiennes et au Bataclan.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.