3,6 millions de personnes sont très mal logées en France, selon le 16e rapport de la Fondation Abbé Pierre
Avec la crise économique, des milliers de ménages jusqu'à présent épargnés ont aujourd'hui des difficultés à se loger.
Le problème concerne aussi les propriétaires, selon le rapport publié mardi. Fin 2010, plus de 3,6 millions de personnes étaient très mal logées (cabanes, familles nombreuses en chambres d'hôtel...), 33.000 étaient sans abri.
"Les plus fragiles sont renvoyés vers des solutions de logement toujours plus indignes et plus fragiles, et ceux sur le fil ont commencé à basculer", résume Christophe Robert, le directeur des études de la Fondation Abbé Pierre.
Dans ces conditions, les services d'hébergement d'urgence sont "sous pression", les plus démunis se réfugient dans des cabanes, des caves, des parkings. Ils se rassemblent sur des "territoires d'exclusion" et génèrent une "tiers-mondisation" du parc de logements, relève la Fondation.
Des ménages au revenu moyen basculent
De plus en plus de ménages basculent à l'occasion d'un licenciement ou d'une séparation. Parmi eux, on trouve des salariés aux rémunérations "faibles ou même moyennes", des chômeurs, des commerçants, des retraités, des intermittents du spectacle, des auto-entrepreneurs qui ne peuvent plus faire face à l'explosion des prix de l'immobilier.
"C'est le monde des (...) 15 millions de personnes dont les fins de mois se jouent à quelques dizaines d'euros près, selon le Médiateur de la République", précise le rapport.
L'Union sociale pour l'habitat (USH) estime que "les impayés de plus de trois mois ont augmenté de plus de 13% entre fin 2008 et fin 2009". "Les décisions de justice prononçant l'expulsion n'ont jamais été aussi nombreuses depuis dix ans (106.938 en 2009)", note encore la Fondation Abbé Pierre.
Les propriétaires touchés
Un deuxième volet du rapport critique la politique d'une "France des propriétaires" défendue par le président Nicolas Sarkozy. Accéder à la propriété peut être "un piège", en particulier lorsque l'endettement, "banalisé", devient trop important. Et les ménages modestes, qui gagnent entre 1,5 et 3 fois le Smic, sont de moins en moins nombreux à pouvoir devenir propriétaires: "Ils représentaient 45% des acquéreurs de résidences principales en 2003, à peine plus de 30% cinq ans plus tard."
Le "mal logement" peut aussi toucher les propriétaires: faute de revenus suffisants, certains ne peuvent plus entretenir leur logement ou payer les échéances et finissent parfois par être expulsés.
Pour résoudre le problème du mal-logement en France, la Fondation estime qu'"il faudrait produire environ 500.000 logements par an pendant plusieurs années". Mais le nombre de mises en chantier ne cesse de diminuer depuis 2007 (environ 350.000 en 2010 contre 435.000 en 2007).
Elle plaide pour une "maîtrise des prix" notamment grâce à un encadrement des loyers de relocation, un renforcement de la loi SRU qui impose un quota de 20% de logements sociaux aux communes de plus de 3.500 habitants ou encore un programme quinquennal de résorption des 600.000 logements indignes.
Pour la Fondation Abbé Pierre, les candidats à la présidentielle devraient faire du logement "un des trois ou quatre thèmes majeures de leurs programmes".
Propositions de la CFDT et de la CGT
Les syndicats CGT et CFDT ont fait des propositions mardi pour s'attaquer à la crise du logement, en particulier limiter la progression des loyers des logements de petite surface et renforcer la loi SRU (Solidarité et renouvellement urbain).
Présent à la journée de présentation du rapport de la Fondation Abbé Pierre, le secrétaire général de la CFDT François Chérèque a proposé d'instaurer "un prix maximum pour les petits logements, de moins de 25/30 mètres carrés, tant que l'on n'est pas arrivé à un système concurrentiel raisonnable".
Dans un communiqué, la CGT propose quant à elle que "l'objectif de 20% minimum de logements locatifs sociaux dans les communes de plus de 3.500 habitants (prévu dans la loi SRU, ndlr) devienne une obligation forte, en réduisant de 18 ans à 6 ans le délai laissé aux communes pour atteindre ce seuil".
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