Reportage "C'est un non-sens écologique et social" : dans la Drôme, le projet d'un "méga poulailler" divise les riverains et les agriculteurs

Le préfet de la Drôme vient de donner son accord pour l'extension d'un élevage à Peyrins, pour passer de 30 000 à 143 000 poulets. De quoi inquiéter certains riverains et défenseurs des animaux.
Article rédigé par franceinfo - Antoine Gallenne
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Un élevage de poulets en batterie, à Plougoulm, dans le Finistère. (Illustration) (FRED TANNEAU / AFP)

À Peyrins, près de Romans-sur-Isère, le poulailler déjà existant sera bientôt agrandi, passant de 30 000 à 143 000 volailles. Un nouveau projet, colossal, porté par l'entreprise Duc. Il comportera trois nouveaux bâtiments pour une production potentielle d'1,1 million de poulets par an. 

Du sommet d'une petite colline, Bernard Pipon observe le poulailler actuel, qui sera bientôt en travaux, à quelques centaines de mètres de chez lui. Il dénonce un "non-sens écologique et social". "On voit les trois silos à grain, et il va y avoir trois autres bâtiments qui vont être adjoints à celui-là."

"On fera tout pour que ce poulailler ne se fasse pas, ni ici, ni ailleurs."

Bernard Pipon, opposé à l'agrandissement

à franceinfo

Ce membre du collectif opposé au projet d'extension dénonce notamment les futures conditions d'élevage des poulets. Pour lui, "143 000 poulets entassés avec moins d'une feuille A4 comme surface vitale pour chacun, c'est quelque chose qui est inconcevable". Il compte se battre et envisage même de saisir la justice.

Le maire de Peyrins, Philippe Barneron, s'inquiète aussi. Selon lui, l'élevage attire déjà beaucoup de mouches dans le voisinage. Si le poulailler est étendu, cela augmentera aussi le trafic routier, avec deux gros camions par jour.

11 000 mètres cubes d'eau par an

Surtout, il consommera 11 000 mètres cubes d'eau par an dans une zone touchée par la sécheresse. L'élu l'assure, "on aura beaucoup moins d'eau, c'est une évidence". "Ça fait deux ans de suite qu'il y a des limitations d'arrosage dans notre zone. On est limité à un prélèvement pour l'irrigation, pour nettoyer les voitures et remplir les piscines. Pourquoi on permettrait à certains d'augmenter leur consommation d'eau et pas à d'autres ?"

Le maire a refusé de signer les permis de construire, mais le préfet lui a donné tort. "J'ai essayé, mais ils ont gagné, se désole Philippe Barneron. J'ai l'impression qu'on n'a pas été entendus. On est tout petits. Dans notre petite commune de 1 700 habitants, on n'a pas un service juridique étoffé, on se sent très seul." 

Une production française 

Au contraire, Thierry Momé, représentant de la filière avicole à la chambre d'agriculture de la Drôme, défend l'extension du poulailler et de cette production française. "Les volailles importées, même si ça peut être des produits de qualité, ne respectent pas les mêmes cahiers des charges que ce à quoi on nous oblige, nous, éleveurs français", assure-t-il. Interdire des élevages en France reviendrait à "favoriser de l'importation avec une alimentation qui sera moins normée que celle qu'on veut interdire en France", selon lui.

Quant au bien-être animal, avec 21 poulets par mètre carré, l'élevage respecte la norme européenne, rappelle l'agriculteur.

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