Reportage "On peut imaginer ce que ça va devenir" : en Alsace, la réhabilitation du canal Rhin-Rhône ne fait pas l'unanimité

Le projet porté par la région Grand Est prévoit de réhabiliter 24 kilomètres de canal, avec une dizaine d'écluses, sur une portion laissée à l'abandon depuis une soixantaine d'années.
Article rédigé par Boris Hallier
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
Sur cette portion au centre de l'Alsace, le canal du Rhin au Rhône n'est plus exploité depuis les années 1960. (BORIS HALLIER / RADIOFRANCE)

En Alsace, la réhabilitation d'une portion de canal entre Strasbourg et Colmar sème la discorde. Les travaux ont commencé lundi 26 août sur l'ancien canal qui faisait la jonction entre le Rhin et le Rhône, l'objectif étant de permettre aux bateaux de plaisance d'y naviguer à nouveau. Mais pour certains habitants, ce projet va altérer paysage et biodiversité.

Aujourd'hui, seuls les cyclistes ou les piétons peuvent profiter de ce canal bucolique. "C'est réservé aux cyclistes ici, il n'y a pas de voitures, ni rien", indique Charlie, un promeneur. D'ici quatre ans, des plaisanciers pourront aussi passer par là. "Cette valeur paysagère va disparaître", estime le militant associatif Francis Guth.

"À l'endroit de l'écluse, on a un bel aperçu du canal, revenu à la nature depuis près de 60 ans. Et on peut facilement imaginer ce qu'il va devenir avec des arbres qui seront coupés à gauche, à droite", ajoute Pascal Lacombe, un autre militant attaché au lieu. Les arbres, parfois couchés sur l'eau, vont effectivement être élagués pour permettre le passage des bateaux. La fin des travaux est prévue pour 2028. Pour Francis Guth, l'impact sur la faune est incontestable.

"Ces branches offrent de l'ombre et permettent de rafraîchir l'eau. Les poissons souffrent quand l'eau chauffe."

Francis Guth

à franceinfo

Le militant craint aussi une imperméabilisation des berges, qui menace les zones humides à proximité. "On souhaite que le canal reste dans cet état, qu'on peut appeler sauvage, renaturé", explique-t-il.

Un intérêt touristique évident

Ces revendications arrivent un peu tard, estime Joël Clog, président de l'association Rhône au Rhin Plaisance. Lui s'imagine déjà sur le canal, sur son bateau. "Ce canal nous permet de rejoindre la capitale alsacienne, Strasbourg, sans emprunter le Rhin. Et donc sans les contraintes que cela implique : des autorisations spéciales et des interdictions lors des crues, explique-t-il. C'est un peu dommage que quelques personnes qui se réveillent au dernier moment puissent bloquer un beau projet comme celui-là." Car les opposants au projet promettent de saisir la justice pour empêcher les travaux.

Péniche-hôtel, location de bateaux… L'intérêt touristique et commercial est évident pour Frédéric Pfliegerdoerffer, conseiller régional et maire de Marckolsheim : "Quand vous êtes sur le canal du Rhône au Rhin, vous êtes en Centre-Alsace, près de Sélestat, Colmar ou encore le Haut-Koenigsbourg. L'idée, c'est d'arriver autour de 5 800 pénichettes par an." Les travaux doivent s'achever en 2028, avec un coût estimé à 48 millions d'euros et un objectif de 10 à 12 millions d'euros de retour sur investissement chaque année.

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