Ralentir l'érosion du littoral avec des bactéries marines, une solution testée par des chercheurs de La Rochelle
Avec 5500 km de côtes, la France fait partie des pays européens les plus vulnérables à la submersion marine, avec le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Elle menace 1,4 millions de résidents. Quant à l'érosion, elle concerne 25% de nos côtes.
Avec 419 km de côtes, le littoral de Charente-Maritime est l'un des plus concernés par cette érosion. En mai dernier, dix communes du département ont d’ailleurs intégré un décret publié le 30 avril dernier, listant les 126 collectivités particulièrement vulnérables face à la montée des eaux et le recul du littoral. Face à cette situation, les travaux menés par les chercheurs de l’Université de La Rochelle se révèlent très encourageants. Le 30 mai, une équipe constituée de Marc Jeannin et Sophie Sablé, tous deux enseignants-chercheurs et membres du Laboratoire des Sciences de l'Ingénieur pour l'Environnement à La Rochelle, a permis au grand public de comprendre un processus naturel.
Les chercheurs ont identifié des bactéries biocalcifiantes, présentes naturellement dans l’océan, "un milieu riche en ions calcium, magnésium et en bactéries" explique Marc Jeannin. Un processus biologique permet à ces bactéries de produire une sorte de colle qui va servir de ciment entre les sédiments. Naturellement, au fil du temps, des amas rocheux résistants se forment.
Bactéries et courant électrique
Pour les chercheurs, cette découverte peut s’avérer encore plus intéressante si elle est couplée avec une autre expérience, menée dans le quartier de Port-Neuf à La Rochelle, où des grilles métalliques traversées par un courant électrique continu de faible intensité ont été installées depuis plusieurs années. Grâce au phénomène d’électrolyse de l’eau de mer, les sédiments sont venus s’accumuler et se coller aux grilles. Aujourd’hui, elles sont quasiment invisibles.
L'objectif, ce serait donc d’associer les bactéries marines biocalcifiantes à ce processus de protection cathodique pour accélérer la formation de structures résistantes, bien utiles pour stabiliser des profils de plages et celui des enrochements servant de brise-lames.
L'urgence face à l'érosion
Le procédé est d’autant plus intéressant que sa mise en œuvre semble assez simple et peu coûteuse. Mais pour voir l’application de ce procédé à grande échelle (et qui fait l'objet de plusieurs thèses), il faudra encore patienter quelques années. L’urgence est pourtant là. Car l’érosion n’est pas près de s’arrêter. Des études ont montré que sa principale cause était due au déficit des stocks sédimentaires. Un déficit provoqué par la multiplication des barrages le long des fleuves qui piègent les sédiments avant leur arrivée sur le littoral. Le changement climatique vient aggraver ce phénomène. Il réduit le débit des cours d’eau, augmente le niveau de la mer et l’intensité de tempêtes particulièrement dévastatrices.
La Charente-Maritime est bien placée pour le savoir. En 2010, le passage de Xynthia a laissé un souvenir douloureux. Dans plus d’une quarantaine de communes du département, l’eau avait envahi des milliers d’habitations et provoqué la mort de 12 personnes. Autant dire qu'ici, on scrute ces travaux avec beaucoup d’intérêt.
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